En ce 4 avril 2024, le général Pellistrandi revient sur la création de l'Otan, il y a 75 ans. Créée en 1949, alors que la guerre froide en était à ses prémices, face à l'influence soviétique et à ses menaces en Europe et dans le monde occidental, l'Organisation du traité de l'Atlantique nord reste un outil de sécurité internationale, comptant désormais 32 États, soit vingt de plus que lors de sa création.
Éditorial – L’Otan, 75 ans déjà (T 1590)
Il y a 75 ans, le 4 avril 1949, 12 États signaient, à Washington, le document mettant sur pied le Conseil de l’Atlantique Nord, début de l’alliance militaire – l’Otan – qui allait permettre de défendre l’Europe de l’Ouest face à la menace soviétique alors en pleine expansion. Sous l’impulsion de Staline, au pouvoir depuis 1922, l’URSS sortie vainqueur de la Seconde Guerre mondiale a étendu sa zone d’influence sur toute l’Europe centrale, imposant des pouvoirs communistes subordonnés à Moscou dans tous les États, depuis la partie est de l’Allemagne occupée jusqu’à la Bulgarie au bord de la mer Noire, sans oublier la malheureuse Pologne, dépecée depuis des siècles.
Staline s’appuie également sur les partis communistes très actifs dans l’Europe de l’Ouest, en particulier en France et en Italie, le PCF de Maurice Thorez prenant directement ses ordres au Kremlin. De plus, l’Europe de l’Ouest est encore exsangue des dégâts de la guerre, le Plan Marshall décidé en 1947 commençant tout juste à faire ses preuves. À cela se pose la question du statut de l’Allemagne occupée par les vainqueurs avec à l’ouest, les zones française, américaine et britannique, à l’est la zone soviétique et, bien sûr, Berlin où les forces alliées sont « encerclées » par les troupes russes. Depuis le 24 juin 1948, les accès routiers, ferroviaires et fluviaux permettant de ravitailler Berlin-Ouest ont été bloqués par les Soviétiques. Le blocus de Berlin oblige la mise en place d’un pont aérien permettant de ravitailler la ville et de montrer la détermination des trois alliés à ne pas accepter l’Oukase de Staline, qui n’osa pas aller jusqu’à donner l’ordre d’abattre les avions occidentaux.
Cette période de tension maximale se fait sur fond de recherches sur les bombes atomiques. Certes, les États-Unis ont encore le monopole de l’arme nucléaire, mais les Soviétiques ont accéléré leurs travaux aboutissant, le 29 août 1949 – soit à peine quatre mois après la création de l’Otan – à une première explosion avec le test RDS 1. Plus loin, en Asie, alors que la France est engagée dans le conflit indochinois, les troupes communistes de Mao, aidées par Staline, sont en train de prendre l’avantage au point de pouvoir proclamer la République populaire de Chine le 1er octobre de la même année.
Cette année 1949 est donc une année terrible, où la guerre froide imposée par Staline obligea les Alliés à réagir et à renforcer leur cohésion avec la mise en place de l’Otan. Bien sûr, la puissance militaire des États-Unis est sans commune mesure avec celle des pays européens qui peinent à remonter en puissance leurs armées. Mais, très vite, l’aide américaine va pouvoir permettre le réarmement avec la livraison d’une nouvelle génération d’équipements capables d’affronter ceux de l’URSS.
Pour la France, c’est aussi une étape importante d’autant plus que le siège de l’Otan va être installé à Paris et de nombreux états-majors de l’Alliance vont essaimer dans la banlieue parisienne (Fontainebleau, Rocquencourt, Saint-Germain-en-Laye…) et que des bases américaines et canadiennes vont voir le jour comme à Châteauroux, Toul, Dreux, Évreux… Une empreinte qui dépassera le simple cadre militaire et qui aura une influence sur la transformation de la société française de la IVe République s’apprêtant à vivre les Trente Glorieuses.
En ce 75e anniversaire, certes, les défis de l’époque ont changé, mais les menaces actuelles en particulier depuis le 24 février avec la guerre provoquée par la Russie contre l’Ukraine amènent à souligner combien la création de l’Otan fut déterminante pour protéger l’Europe et ce n’est pas un hasard si, aujourd’hui, ce sont désormais 32 États qui assument ce choix d’une alliance militaire indispensable pour préserver une paix devenue très fragile avec une guerre froide 3.0 conduite par Moscou et directement dirigée vers l’Europe. ♦