Le massacre d'Oradour-sur-Glane et celui des pendus de Tulle ont eu lieu dans les premiers jours qui ont suivi le Débarquement en Normandie, il y a tout juste 80 ans. Le colonel Claude Franc revient, dans cet article, sur le contexte dans lequel ces crimes ont eu lieu, en pointant précisément la responsabilité du commandement allemand.
Il y a 80 ans – Tulle et Oradour-sur-Glane, deux crimes de guerre de l’armée allemande – 8 et 9 juin 1944 (T 1609)
© Keith Ellwood / Wikimedia commons via Flickr
Le massacre d’Oradour-sur-Glane, comme l’affaire des pendus de Tulle, s’ils ont été perpétrés par la même grande unité, la 2e Panzer SS Das Reich, relevaient, en réalité, d’une logique de planification et d’exécution d’une politique de terreur à l’encontre de la population française, dont le commandement allemand à l’Ouest, le maréchal von Rundstedt, commandant l’OB West, porte l’entière et pleine responsabilité.
Fin mai 1944, en effet, le maréchal von Rundstedt, représentant emblématique de la tradition militaire prussienne puis allemande, commandant le théâtre occidental, transmet au général von Spültnagel, qui exerce les fonctions de Militär Befehls Haber in Frankreich, autre représentant de la vieille tradition militaire prussienne et, à ce titre, fortement impliqué dans la conjuration du 20 Juillet, ses directives relatives au maintien de l’ordre, dès lors que l’occurrence du débarquement allié en France se fait chaque jour plus prégnante. Il y spécifie que les grandes unités, en cours de remise en condition dans le Sud de la France, après une dure campagne d’hiver en Ukraine, devraient mettre sur pied des « colonnes » chargées de terroriser la population par des actions de représailles, dans les régions où les maquis se sont développés, notamment le Massif central. Stülpnagel endosse ces directives et les transmet à son niveau.
La légende du harcèlement des grandes unités allemandes par les maquis
Il convient de reconnaître que les mouvements opérationnels des unités allemandes, rameutées pour être dirigées vers la Normandie, s’ils ont souffert des destructions systématiques du réseau ferré français par ses propres agents dans le cadre d’un plan préétabli, le Plan « Vert », ou des actions particulièrement redoutables de l’aviation alliée disposant d’une maîtrise absolue de l’espace aérien français (1), n’ont, contrairement à une idée reçue, pratiquement pas eu à subir d’actions de harcèlement de la part des maquis dans les zones qu’elles étaient amenées à traverser. Et ceci pour une raison très simple, les maquis manquaient cruellement d’armement, aussi bien individuel que collectif, élément capital quand on veut créer un climat d’insécurité face à des unités blindées mécanisées, ou simplement motorisées. Ce n’est qu’au mois de juin, à l’issue du Débarquement après les demandes réitérées du général Koenig, commandant les Forces françaises de l’intérieur (FFI), au Supreme Headquarters Allied Expeditionary Force (SHAEF), qu’Eisenhower, convaincu de l’appui que la Résistance intérieure pouvait apporter à ses opérations, consentit à armer 140 000 combattants, essentiellement par parachutages. C’est ce qui lui a fait écrire dans ses mémoires, Croisade en Europe, que l’action de la résistance française s’apparentait à celle d’une quinzaine de divisions. De fait, en août, dans le Midi de la France, en soutien de Dragoon, ce sont cinq divisions allemandes qui sont fixées par la Résistance, qui viennent s’ajouter à celles qui le sont dans les Alpes.
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