La pandémie de la Covid-19 a démontré les faiblesses des réponses initiales et la nécessité de raisonner et travailler désormais sur un éventail plus large, par définition international. La dimension européenne est ainsi pertinente et contribuera à renforcer la sécurité sanitaire des Français.
Gestion des pandémies : renoncement des États au profit des agences internationales ?
Managing Pandemics: States Relinquishing to International Agencies?
The Covid-19 pandemic has demonstrated the weaknesses in initial responses and the need henceforth to consider and work on a far wider scale, by definition international. The European dimension is therefore pertinent and will contribute to improving public health and safety for the French population.
La France a très longtemps été opposée à toute délégation de ses prérogatives en termes de santé à l’Europe. Hormis l’Agence européenne du médicament qui donne les fameuses autorisations de mise sur le marché des médicaments, il n’y a pas de décisions en santé qui soient dans le giron de la Commission européenne. La crise de la Covid a fait évoluer les esprits et a encouragé des projets comme la création d’une agence de préparation et de réponse aux urgences sanitaires sur le modèle du Biomedical Advanced Research and Development Authority (BARDA) américain. Les premières orientations de la Commission européenne sur ce sujet s’axent essentiellement sur le partage d’informations et la constitution d’un plan permettant à l’Europe de pouvoir développer, produire puis distribuer rapidement une solution thérapeutique aux Européens en cas d’urgence sanitaire. Concrètement, il s’agit de vaccins pour les épidémies virales ou bactériennes, de nouveaux antibiotiques contre des germes résistants ou de dispositifs de protection en cas d’exposition à des radiations ou des agents chimiques.
En revanche, il n’est pas question de déléguer à l’Europe quelques décisions que ce soit en termes de restrictions de libertés (déplacements, frontières, vaccination, utilisation des solutions thérapeutiques).
Pour bien comprendre ce sujet, il faut d’abord se rappeler que les développements de médicaments, de vaccins ou de dispositifs médicaux ou d’algorithmes médicaux ne sont plus développés et distribués à l’échelle nationale. La moindre société de biotechnologies va lever des fonds dans le monde entier puis recruter les meilleurs experts internationaux avant de lancer sa solution en Europe et aux États-Unis a minima. Dans la majorité des cas, la société sera rachetée par un géant américain, le plus souvent, ou européen, moins souvent, et distribué dans le monde entier. Le vaccin Pfizer a été conçu par une société allemande, son développement clinique financé par une société américaine, Pfizer en l’occurrence, qui l’a ensuite distribué en négociant avec l’Europe et les pays du monde entier. Le gouvernement américain, en participant à l’effort dans le développement du vaccin, a permis aux États-Unis de jouer le premier rôle dans cette success story.
L’Europe s’est vite mobilisée pour produire ce vaccin à large échelle afin d’augmenter la production mondiale, mais aussi d’assurer sa sécurité vaccinale. Cette stratégie était la bonne si l’on considère les risques sanitaires, économiques et politiques à voir un pays européen ne pas disposer de vaccins en quantité suffisante. Ensuite, la mise en synergie des moyens de production européens permet de produire bien plus que l’addition des moyens nationaux sans coopération.
Un autre sujet ancien, mais qui revient sur le devant de la scène avec la crise, est la négociation du prix des médicaments ou des autres solutions de santé directement par l’Europe. Cet aspect est plus délicat, car les intérêts économiques des pays producteurs de médicaments comme la Suisse, la France ou l’Allemagne ne sont pas les mêmes et les influences des pays pour privilégier ses laboratoires nationaux seraient à craindre. En revanche, si certains des tous premiers laboratoires refusent de venir en France en raison d’une négociation trop difficile, remonter la négociation à l’Europe serait un moyen de bénéficier d’un meilleur rapport de force. Au risque d’une négociation moins favorable ?
Ainsi, les initiatives comme la création de l’Agence européenne de préparation et de réponse aux urgences sanitaires permettraient de renforcer la sécurité sanitaire des Français sans endommager la souveraineté nationale. ♦