Extraits de l’allocution du président de la République, au Palais de l’Élysée, le jeudi 5 janvier 2006. La rédaction a retenu pour ce dossier les points de ce discours portant sur l’énergie.
Vœux aux forces vives
Hopes for energy conservation
Extracts from a short address given by President Jacques Chirac at the Elysée Palace on Thursday, 5 January 2006. The editorial staff has selected those parts of his speech which referred to energy.
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Dans un monde qui change et dont les changements sont à la fois technologiques, économiques, sociaux, culturels, identitaires. Alors que la mondialisation ne cesse de rebattre les cartes, la France a des atouts maîtres, et me semble-t-il, elle n’en a pas toujours suffisamment conscience.
Elle est forte de ses grandes entreprises conquérantes, de ses succès industriels et scientifiques. Elle fait vivre ses valeurs, notamment l’exigence de cohésion sociale et de solidarité. Elle est à la pointe dans le monde des grands combats pour l’environnement ou pour l’aide au développement.
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La France doit aussi être à la pointe des progrès technologiques. J’ai voulu relancer la politique industrielle et d’innovation. Nous avons mis en place les instruments : les pôles de compétitivité, l’Agence de la recherche, l’Agence de l’innovation industrielle. Il faut affirmer nos priorités nationales et y consacrer des moyens massifs. Il faut franchir maintenant des étapes décisives dans les secteurs du numérique et de l’énergie.
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La seconde de nos priorités industrielles, c’est l’énergie. Le climat et l’après-pétrole, sont les défis du siècle qui s’ouvrent. Nous devrons diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050, c’est inéluctable. Nous devrons apprendre à nous passer progressivement de pétrole.
Dans ce domaine, la France a l’ambition d’être une référence mondiale, car avec ses entreprises, avec ses infrastructures, avec ses recherches, elle dispose d’atouts majeurs.
Notre pays est le premier producteur d’énergie renouvelable en Europe. Grâce à l’hydro-électricité, grâce au choix du nucléaire, nous émettons aujourd’hui, par habitant, 40 % de gaz à effet de serre de moins que la moyenne des pays développés.
Et avec la loi d’orientation sur l’énergie de juillet dernier, nos grands choix énergétiques sont clairs. Nous devons maintenant en accélérer la mise en œuvre, afin de préparer l’avenir.
Nous devons d’abord intensifier notre effort pour économiser l’énergie dans l’habitat ; et en priorité dans les bâtiments existants, avec pour objectif de diviser par quatre la consommation d’énergie d’ici 2050. Un grand programme d’amélioration de l’habitat a été lancé. Il doit permettre aux Français d’économiser l’équivalent de la production annuelle de deux tranches nucléaires. Les matériaux de construction les moins performants ne seront plus proposés à la vente. L’évaluation des performances énergétiques des logements vendus est rendue obligatoire. Des incitations sont mises en place : un crédit d’impôt augmenté et des financements de la part des grands fournisseurs d’énergie.
Des programmes de recherche seront engagés pour construire des bâtiments producteurs nets d’énergie et améliorer fortement le rendement des panneaux solaires.
Nous devons réserver l’utilisation du pétrole aux transports et à la chimie, et développer le plus possible des substituts, comme la chimie verte. La production de biocarburants sera multipliée par cinq d’ici deux ans. Fin 2007, les voitures des administrations — tout un symbole mais un encouragement je l’espère — et des établissements publics devront utiliser un tiers de biocarburants. Nous engagerons des recherches sur des processus avancés de production de biocarburant, sur l’utilisation de l’hydrogène et sur les piles à combustible. Il faut aussi développer, dans les dix ans, la voiture électrique à grande autonomie et le diesel hybride. Il faut également mettre au point les centrales à charbon propre. Je souhaite que l’Agence de l’innovation industrielle contribue, dès cette année, au lancement de ces projets. Et par ailleurs, la RATP et la SNCF ne devront plus consommer une goutte de pétrole d’ici vingt ans.
Enfin, il faut préserver notre avance dans le nucléaire. Nous avons lancé l’EPR à Flamanville. Et c’est la France qui a été choisie pour implanter Iter : l’enjeu, c’est la domestication de l’énergie du soleil à l’horizon de la fin du siècle. Mais nous devons prendre, en attendant, de nouvelles initiatives : de nombreux pays travaillent sur la nouvelle génération de réacteurs, celle des années 2030-2040, qui produira moins de déchets et exploitera mieux les matières fissiles. J’ai décidé de lancer, dès maintenant, la conception, au sein du Commissariat à l’énergie atomique, d’un prototype de réacteur de 4e génération, qui devra entrer en service en 2020. Nous y associerons, naturellement, les partenaires industriels ou internationaux qui voudraient s’engager.
Pour conforter ces choix, il nous faut maintenant opter pour l’une des solutions proposées afin de stocker les déchets radioactifs. À l’issue du débat public en cours, le Parlement sera saisi d’un projet de loi, qui devra être voté avant la fin de l’été. Enfin, pour faire progresser encore la confiance, j’ai demandé au gouvernement de créer par la loi sur la transparence nucléaire, dès cette année, une autorité indépendante chargée du contrôle de la sécurité nucléaire, de la radioprotection et de l’information.
Les enjeux de notre politique énergétique dépassent évidemment le cadre national. C’est au niveau européen qu’il nous faut bâtir une politique énergétique ambitieuse. Elle ne saurait se résumer à l’ouverture des marchés à la concurrence. Lors du prochain Conseil européen, la France présentera un mémorandum sur la politique énergétique. ♦
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