La libération des camps et la RDN
Le 75e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz-Birkenau par les troupes soviétiques, le 27 janvier 1945, doit nous rappeler combien l’Enfer avait été réalité durant la période nazie. Certes, d’autres camps de concentration avaient déjà été libérés, comme celui du Natzweiler-Struthof, situé dans la montagne vosgienne, le 23 novembre 1944. Les Alliés avaient mis du temps à percevoir l’indicible ; on évoquait effectivement des camps de concentration, comme celui de Dachau, dans la banlieue munichoise et ouvert peu après l’arrivée d’Hitler à la Chancellerie, au début de 1933.
L’horreur que les Alliés ont découverte au fur et à mesure de leur avancée dans les camps a été très vite documentée en vue des futurs procès des dirigeants nazis, permettant d’accumuler les preuves criminelles. Ainsi, le réalisateur John Ford, à la demande du général Eisenhower, filma les découvertes des camps et leur cortège de misère et de crimes. Cette documentation fut utilisée lors du procès de Nuremberg afin de soumettre les chefs du Reich face à leurs responsabilités.
À l’époque, la dimension exterminatoire, notamment vis-à-vis des populations d’origine juive, n’avait pas été complètement perçue. Il fallut attendre les années 1960-70 pour que la Shoah soit alors comprise dans toute son ampleur.
Lorsque la Revue Défense Nationale est à nouveau publiée avec le numéro de juillet 1945, la Seconde Guerre mondiale n’est pas encore achevée et se poursuit en Asie contre le Japon jusqu’au 2 septembre. Toutefois, pour l’opinion publique, depuis le 8 mai, le conflit est fini avec la capitulation sans condition du Reich signée à Reims, puis à nouveau à Berlin le lendemain pour satisfaire Staline. L’Allemagne est alors sous statut d’occupation, les derniers restes du Reich autour de l’amiral Karl Dönitz, successeur d’Hitler, étant démantelés le 23 mai. C’est donc un néant total que les Alliés pas encore désunis doivent gérer avec des villes détruites, une infrastructure ferroviaire inexploitable, des populations livrées à elles-mêmes, sans ressources véritables, des millions de prisonniers de guerre à encadrer, mais aussi des millions d’anciens prisonniers de guerre qu’il faut rapatrier dans leurs pays respectifs et les centaines de milliers de survivants des camps de concentration et d’extermination dont la priorité est d’essayer de les faire survivre sur le plan médical.
La tâche est alors immense pour les Alliés, avec autant de questions et de problèmes à régler tant localement qu’au niveau politique et économique avec le devenir de ce territoire désormais vaincu. C’est l’objet de l’article publié par René Lauret dans ce premier numéro du renouveau. René Lauret est né en 1852 à Neufchâteau dans les Vosges. Agrégé d’allemand, il a été traducteur pour les forces britanniques lors de la Première Guerre mondiale. Il a été correspondant pour le journal Le Temps à Berlin à partir de 1929. En 1945, il est le chef du service politique du journal Le Monde dirigé par Hubert Beuve-Méry depuis sa création en 1944, avec l’appui du général de Gaulle. René Lauret dirigea ce service jusqu’en 1953. En 1961, il reçut le prix de l’Académie française. Il s’est éteint à Paris en 1975.
Il s’agit donc du premier texte sur l’Allemagne post-8 mai et apporte ainsi un éclairage très utile sur cette période. Les camps de concentration sont évoqués, de même que les persécutions concernant les grandes confessions religieuses, sans que la question juive soit directement évoquée. Il y a une certitude : les Allemands pourront supporter les restrictions qu’ils ont imposées partout en Europe, mais il faut trouver un nouveau projet, écartant tout risque d’un retour du nazisme. Un état des lieux rédigé en juin 1945, quand l’Allemagne commençait à comprendre l’ampleur du désastre causé par Hitler, que le peuple allemand avait soutenu dans sa quasi-totalité et jusqu’à la chute avec une foi aveuglée par l’idéologie nazie.
Cliquez ici pour lire l’article de René Laurent, « Problèmes allemands »
Un texte de Jérôme Pellistrandi
Crédit photo : Bibi595/Wikipédia
Publié le 27 janvier 2020
Jérôme Pellistrandi