Tour de France 2020 et anecdotes historiques :
4 septembre / De l'Aveyron au Tarn, antimilitaristes et bérets rouges
4 septembre / De l'Aveyron au Tarn, antimilitaristes et bérets rouges
Vue du projet d'installation de la 13e DBLE
Si Millau, ville départ, accueillit entre 260 et 300 blessés en permanence pendant la Grande Guerre dans ses hôpitaux, c’est bien le Camp du Larzac qui focalise l’intérêt médiatique durant la décennie 1970. Ce camp, juché sur un plateau aride, fut ouvert en 1902. Avec ses 3 000 hectares et dans une zone très faiblement peuplée, il fit l’objet d’un projet d’extension visant à le porter à 14 000 ha. Mais, dans la mouvance de mai 1968, une forte contestation antimilitariste se développa contre cette idée : le général Maurin, alors chef d’état-major des armées, l’a d’ailleurs évoqué dans son intervention devant les auditeurs de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) en avril 1974. De nombreuses manifestations eurent lieu, amenant, juste après l’élection de François Mitterrand en 1981, à l’annulation de ce plan. Paradoxalement aujourd’hui, l’implantation de la 13e Demi-brigade de la Légion étrangère (DBLE) – stationnée à Djibouti de 1962 à 2011 –, apparaît comme un ballon d’oxygène économique pour la région. L’unité représente 1 300 légionnaires et 320 familles et un programme d’amélioration des infrastructures est prévu jusqu’en 2023. Un autre aspect du camp du Larzac est moins connu mais a été essentiel dans l’aventure spatiale française. En 1941-1942, le colonel Jean-Jacques Barré (1901-1978) y a expérimenté les premières fusées françaises à combustible liquide, permettant ainsi de préparer les expérimentations qui seront conduites après-guerre au Laboratoire de recherches balistiques et aérodynamiques (LRBA) de Vernon (Eure).
Les coureurs traverseront le village de Saint-Affrique, où naquit en 1851 le futur général d’armée de Castelnau, un des grands chefs militaires de la Première Guerre mondiale. Catholique fervent et élu député en 1919, il ne fut pas fait Maréchal en raison de ses convictions religieuses, alors que sa valeur militaire le justifiait pleinement. En 1940, malgré sa grande vieillesse, il s’opposa au Maréchal Pétain et à sa politique et a concrètement soutenu la Résistance en cachant notamment de l’armement dans son château. Lors de ses obsèques en mai 1944, l’évêque de Toulouse, Mgr Saliège, très hostile à Vichy, vint lui rendre hommage.
Avant d’arriver dans la plaine toulousaine à Lavaur, le peloton passe à Castres, ville de garnison et de ballon rond. Une première caserne est financée par la municipalité dès 1764 et accueille 688 hommes et 144 chevaux. Des unités d’artillerie vont s’y succéder à partir de 1874 avec la construction du Quartier Fayolle, dont le 9e Régiment d’artillerie (RA) jusqu’en 1921. La 16e Brigade d’artillerie y est implantée avec son poste de commandement situé à l’hôtel Beaudecourt construit en 1786, devenu sous-préfecture sous l’Empire et confié en 1874 au ministère de la Guerre. Cet ensemble constitue aujourd’hui le mess du 8e Régiment parachutiste d’infanterie de Marine (RPIMA), installé à Castres depuis 1962. Le 8e RPIMA a été créé en 1951 et a été l’un des tous premiers régiments entièrement professionnalisés depuis 1978. Il est l’un des fleurons de la 11e Brigade parachutiste et entretient des liens étroits avec le Castres Olympique, ayant gagné à 5 reprises le Brennus (le bouclier décerné à l’équipe qui remporte le championnat de France de rugby à XV). Castres est aussi la ville de naissance de Jean Jaurès en 1859. L’avocat et homme politique, bien que pacifiste – ce qui provoqua son assassinat le 31 juillet 1914 – était particulièrement intéressé par les questions de défense avec de nombreux écrits préconisant une armée de milices.
Lavaur, dans la grande banlieue toulousaine, contribue au développement industriel lancé lors de la Première Guerre mondiale avec les constructions aéronautiques dont le fleuron est Airbus, même si la crise de la Covid-19 vient fragiliser cet écosystème.
Publié le 04 septembre 2020
Jérôme Pellistrandi