C’est peu dire que ce livre était attendu. L’auteur, en effet, est le directeur de l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (Irsem). Sa nomination a surpris à l’époque, car il était inconnu, même du milieu.
Et à regarder sa bibliographie, on ne trouvait pas grand chose, sinon la direction de quelques ouvrages collectifs, et quelques articles. Bref, si on ne doutait pas qu’en sa grande sagesse, l’État avait désigné la personne idoine, on s’interrogeait quand même. Voici donc qu’à la sortie de l’été 2010 surgit cet ouvrage, assez bref mais, disons-le d’emblée, habilement construit et conçu. Les officiers préparant l’École de guerre, qui persistent à se croire obligés à exécuter un plan en trois parties qui serait de rigueur (militaire), trouveront là un modèle du genre : trois grandes parties, trois chapitres chacun, trois subdivisions, trois idées, le rythme ternaire anime l’ouvrage, avec d’ailleurs le liant suffisant pour que cela ne lasse pas : on voit là beaucoup de métier que l’on crédite à l’auteur. La langue est souple, il y a des constats et des idées, des références nombreuses sans être pesantes : autant dire que l’ouvrage est convaincant et qu’il couvre le sujet.
L’auteur soutient un européisme raisonnable qui part du constat que la France a du mal aujourd’hui à avoir une politique étrangère robuste, à cause d’un environnement très versatile et de l’affaiblissement des possibilités de puissance. Il n’est toutefois pas sûr que l’Europe constitue le meilleur moyen de redonner de la raideur à cette diplomatie… L’auteur insiste sur la notion d’influence, et déplore le manque de politique appuyée en la matière ; pour le coup, nous partageons son diagnostic : il ne s’agit pas de s’interroger pour savoir si la France compte encore, « la question est plutôt de faire savoir à l’extérieur pourquoi la France compte toujours, et de faire comprendre pourquoi il est bon qu’il en soit ainsi. (...) La diplomatie française doit offrir des avantages comparatifs qui justifient le choix de la France comme partenaire plutôt que d’autres » (p. 189).
Au final, un livre agréable, qui traite son sujetde façon sérieuse et plaisante, sans être forcément novatrice. C’est un ouvrage qui fait plus le point qu’il n’ouvre de grandes perspectives, mais qui constitue la base de départ du travail plus ample et plus ambitieux que l’on attend. Si l’auteur a donc un peu calmé nos impatiences, il ne les a pas totalement rassasiées.