Le plan Marshall occupe une place à part dans l’imaginaire collectif. Comme l’écrit Alan Greenspan, ancien président de la Réserve fédérale, « des dirigeants du monde entier ne cessent d’en appeler à un nouveau plan Marshall », mais combien comprennent réellement de quoi il était question dans ce plan, comment il a été créé et comment il a été mené à bien ? Mais le plan Marshall ne se réduit pas, loin de là, au seul programme de redressement économique de l’Europe ; il a été conçu comme un instrument de combat destiné à empêcher Staline, qui avait établi son hégémonie sur une partie de l’Europe, de s’emparer de l’autre, l’occidentale. À ce titre, comme le démontre Benn Steil, c’est bien le plan Marshall qui a été le fait majeur déclencheur de la guerre froide, qui a recouvert de son manteau l’Europe et le monde durant quatre décennies et dont toutes les réminiscences n’ont pas totalement disparu.
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Ancien directeur du département international d’économie du Conseil des relations étrangères, Benn Steil s’est spécialisé dans la clarification de sujets complexes. On lui doit The Battle of Bretton Woods: John Maynard Keynes, Harry Dexter White, and the Making of a New World Order (2013, Princeton University Press), récompensé par plusieurs prix et unanimement salué par la critique. Voilà qu’il livre certainement une des études les plus fouillées sur les origines de la guerre froide. En effet il ne s’en tient pas à la seule histoire diplomatique de cette période charnière qui s’étale de la mort de Roosevelt, le 12 avril 1945 à l’adoption de la Loi fondamentale allemande, le 8 mai 1949, mais il y ajoute une description minutieuse des fondements économiques à la base du plan Marshall. Il s’étend sur la libéralisation des échanges, la réforme monétaire allemande effectuée en mars 1948 dans les secteurs occidentaux et l’utilisation des fonds de contrepartie…
En 1944, Franklin Delano Roosevelt animé de sa vision wilsonienne d’un monde de paix et de coopération par le droit et les institutions internationales, entreprit de bâtir un nouvel ordre mondial au sein duquel l’Union soviétique, puissance de premier ordre, bien qu’ayant ses intérêts particuliers, aurait toute sa place. Le Président américain restait persuadé que l’URSS conviendrait de collaborer avec les nouvelles Nations unies et lui concéda, pour se faire, un droit de veto au sein du Conseil de sécurité, et consentit, en compensation des souffrances endurées durant la guerre, à ce que la Biélorussie et l’Ukraine puissent disposer d’un siège à l’ONU. Ce programme paraissait au départ viable. Mais s’y ajouta d’emblée un volet économique et financier, les États-Unis s’attendaient à ce que l’URSS adoptât peu ou prou le principe du libre-échange et ouvrît davantage son économie. L’URSS avait participé d’ailleurs aux négociations de Bretton Woods qui établirent le FMI. Mais juste avant la date butoir du 1er janvier 1946, pour la ratification de l’accord sur le FMI, elle s’en retira, car elle n’avait nullement l’intention de se plier aux règles économiques et financières édictées par les États-Unis.
En pragmatique Staline cherchait deux choses. D’une part à ce que le nouveau système monétaire se traduise par un gonflement de la valeur de son stock d’or ; d’autre part il s’attendait à davantage d’aide financière inconditionnelle pour son pays, ce au plan purement bilatéral ; on envisageait à Moscou un prêt de 10 Md$ (quelque 100 Md$ d’aujourd’hui), comme il l’avait reçu pendant la guerre. Lorsqu’il devint manifeste que cette aide ne viendrait pas, il s’en détourna. Les États-Unis ne pouvaient l’ignorer, or, en lançant le plan Marshall dix-huit mois plus tard, ils convièrent l’Union soviétique et ses satellites. Entretemps Staline avait commencé à établir son hégémonie sur les pays libérés par l’Armée rouge. Il consolida son emprise sur ce qui devait constituer le camp socialiste en maintenant l’Armée rouge dans les territoires libérés, mais aussi en signant avec chacun d’entre eux des accords commerciaux qui liaient les économies des pays socialistes à l’économie soviétique. Les tensions entre les deux puissances surgirent vite et s’élargirent. Mais on n’était pas encore entré en période de guerre froide, malgré les premiers affrontements au sujet de l’Iran en 1946, de la guerre civile qui avait éclaté en Grèce et des prétentions territoriales de Staline en Libye où à l’égard des détroits turcs.
C’est ici que se situe l’analyse très fine de Benn Steil, qui s’est efforcé d’en dater avec précision l’irruption. On savait bien que l’année 1947 constitua le tournant décisif, un an après le fameux discours de Churchill de Fulton sur le « rideau de fer ». Ce fut d’abord l’énoncé de la doctrine Truman, le 12 mars, dans lequel le Président américain annonçait une aide d’urgence de 450 M$ à la Grèce et à la Turquie, puis le discours d’Harvard du général George Marshall du 5 juin. Par ces deux discours fondateurs, les États-Unis abandonnaient la vision rooseveltienne d’« un seul monde » (« One World ») au profit d’une nouvelle architecture économique et sécuritaire appropriée à une Europe divisée en deux mondes (« Two Worlds ») ; un monde capitaliste et un monde socialiste, une vision qui fut reprise en septembre 1947 par la doctrine Jdanov et la création du Kominform. Dès le début de l’année, les responsables américains se rendirent compte que la fin de la Pax Britannica les obligeait à endosser le rôle de garant de l’ordre mondial et que c’était le retrait américain après la signature du Traité de Versailles qui avait conduit à la Seconde Guerre mondiale. Ils ne devaient plus répéter cette erreur et cette fois-ci s’engager à fond en Europe, telle fut la conviction d’Arthur Vandenberg qui avait été isolationniste dans les années 1930 ; son rôle est bien mis en valeur par l’auteur.
Benn Steil a raison de placer le plan Marshall au centre de la guerre froide. Le discours de Truman n’était qu’un pur énoncé doctrinal qui, pour important qu’il fût, ne constituait nullement un programme d’action précis et durable, ce que fut le plan Marshall. Ce dernier dépassait en effet l’octroi d’une simple aide bilatérale que Washington accordait à ses alliés, mais était conditionné à l’effort collectif que devaient effectuer les pays européens, en coordonnant leurs plans de redressement. Les pays bénéficiaires devaient apporter la preuve des résultats réalisés pour continuer à bénéficier de l’aide américaine. En particulier l’administration en charge de la mise en œuvre du plan, l’ERP (European Recovery Program), exigeait l’élimination des obstacles aux échanges intra-européens ; elle demandait aux bénéficiaires de concevoir des plans de production coordonnés. Et pour harmoniser leurs positions, il était demandé aux pays européens de mettre sur pied des organismes multilatéraux, comme l’UEP (Union européenne des paiements) et l’OECE (Organisation européenne de coopération européenne). On peut dire ainsi que le plan Schuman de mai 1950, inspiré par Jean Monnet, alors commissaire général au Plan, un des organes chargés de mettre en musique le plan Marshall, s’est bien inscrit dans l’esprit de ce dernier. En mettant l’accent sur le sérieux avec lequel Staline traita la menace qu’il représentait pour la nouvelle zone tampon si durement conquise en Europe centrale et orientale, Benn Steil impute donc au plan Marshall la responsabilité du déclenchement de la guerre froide.
Le Vojd fut en effet pris, si l’on peut dire, à contrepied. Il pensait, faisant référence aux années 1920 lorsque le Sénat américain avait rejeté le traité de la SDN, que les États-Unis retireraient très vite leurs boys d’Europe comme Roosevelt avait promis de le faire, laissant derrière eux une Allemagne affaiblie, qui ne manquerait pas de succomber aux sirènes de Moscou, en acceptant sa neutralisation pour prix du maintien de son unité. Une Allemagne réduite à son rôle agricole (ce fut l’objectif du plan Morgenthau) tout en étant capable, ce qui représentait une première contradiction, de payer de substantielles réparations à l’URSS pour financer sa reconstruction et son développement. Les événements allèrent plutôt dans le sens contraire, car Washington s’efforça très vite de reconstruire l’économie allemande qui devait être très vite intégrée à l’économie européenne, renaissante. Tout s’est finalement joué en quinze semaines entre le moment où l’ambassadeur britannique à Washington fit part au Département d’État de la décision de Londres de stopper toute aide à la Grèce et à la Turquie, avant la fin février et le discours d’Harvard du 5 juin. Dès son entretien avec Staline, le 15 avril, le général Marshall comprit que celui-ci n’était pas disposé à coopérer avec les États-Unis, selon les termes fixés par eux. Au moment où, en janvier 1947, le général Marshall devint Secrétaire d’État, des hommes comme Dean Acheson, George Kennan, Will Clayton et le sénateur républicain Arthur Vandenberg, sans lequel la nouvelle orientation américaine n’aurait pas pu être mise en œuvre, étaient disposés à remodeler la politique américaine sur de nombreux fronts.
De fait, malgré certaines divergences d’approche et des sensibilités différentes, ils forgèrent un consensus bi-partisan qui jeta les bases de la politique américaine à l’égard de l’URSS pendant des décennies. Au départ, l’approche de cette équipe était purement économique et partait de la constatation bien simple que l’effondrement économique de l’Europe de l’Ouest mènerait à l’instauration de régimes communistes, en France et surtout en Italie, ce qui présenterait une perte stratégique d’envergure pour les États-Unis et les obligerait à augmenter significativement leurs dépenses militaires. L’aide Marshall n’était donc pas à sens unique, en outre elle permettait d’écouler le surplus de leur production en évitant aux Européens de les payer en or ou en dollars, dont ils étaient cruellement dépourvus (« dollar gap »). La philosophie du plan Marshall reposait sur le principe selon lequel seul l’octroi d’une aide économique urgente et massive éviterait à terme un engagement militaire américain en Europe. Pour George Kennan, c’est en renforçant leurs économies et non en bénéficiant d’une aide militaire américaine que les pays européens résisteraient le mieux au communisme. Mais cette aide ne devait pas – disposition essentielle qui fonda la coopération économique européenne ultérieure – être constituée d’une série d’aides bilatérales, mais être octroyée à la condition que les pays européens établissent entre eux une véritable coopération, un clearing dans leurs échanges, et se dotent d’une institution appropriée pour ce faire ; ce fut l’OECE, ancêtre de l’OCDE.
Le plan Marshall a-t-il-représenté un piège que les Américains auraient tendu aux Soviétiques ? « Un piège », titre du cinquième chapitre, certainement le plus important du livre ? En précisant toutes les conditions auxquelles les pays bénéficiaires devaient souscrire – ouvrir leurs statistiques aux experts américains, suivre leurs « conseils », importer les biens de consommation américains, tenir à l’écart les ministres communistes (pour les pays de l’Ouest), etc. – les architectes du plan Marshall, au premier chef George Kennan, l’auteur du long télégramme, les avaient définies pour faire en sorte que l’URSS ne soit pas en mesure de les accepter. C’est bien ce qui arriva, lors de la conférence de Paris qui se déroula du 27 juin au 2 juillet 1947. Molotov arriva à Paris avec une délégation de 89 personnes, ce qui démontait a priori le sérieux avec lequel la direction communiste prenait le plan américain. Mais il quitta les discussions début juillet, au motif qui venait de lui être dicté de Staline, que l’URSS n’avait pas l’intention de soumettre ses ressources ou ses besoins à une évaluation externe, ou de participer à une quelconque forme de coordination dictée par Washington. Moscou dénonça avec véhémence que le plan Marshall ne visait qu’à permettre aux monopoles américains de mettre la main sur les économies européennes et qu’il en résulterait un empiètement de leur souveraineté.
L’Union soviétique, pressentant qu’en acceptant l’offre américaine les pays de l’Est finiraient par lui échapper et de ce fait ne leur permit pas de s’y joindre. D’où le fait que la Pologne, puis la Tchécoslovaquie, avant le coup de Prague de février 1948, aient été « priées » de rentrer dans les rangs. Aussi, conclut l’auteur, si l’on veut déterminer une date de naissance précise de la guerre froide, on a de bonnes raisons de suggérer le 7 juillet, le jour où Molotov donna l’ordre d’envoyer de nouveaux télégrammes au pays satellites annulant les instructions de la veille d’envoyer des délégations à Paris. Ce n’est qu’à partir de ce moment que les deux camps, les États-Unis et l’Union soviétique s’engagèrent irrévocablement à assurer leurs sphères d’influence respectives sur le plan politique, économique et militaire sans se consulter de façon mutuelle. C’en était fini de l’esprit de Yalta et de Potsdam. Les droits quadripartites sur l’Allemagne deviendront peu à peu une fiction. Fait essentiel : l’Europe qui avait été divisée entre alliés, anciens ennemis et pays neutres, était désormais divisée en « États Marshall » et « bloc soviétique ».
Cette dichotomie ne dura pas très longtemps, car avec le pacte Atlantique du 4 avril 1949, la catégorie des pays « neutres » ressurgit avec la Suède, la Finlande, l’Autriche et la Suisse. Puis avec la sortie de la Yougoslavie du camp socialiste, chapitre sur lequel l’auteur ne s’étend pas, apparaîtra la catégorie des non-alignés lors des années 1950, mais au-delà des limites de son ouvrage. La sortie de Molotov des discussions de Paris a été jugée comme quasi miraculeuse par la diplomatie américaine car, en adhérant au plan Marshall, l’Union soviétique aurait pu, en se référant aux accords de Potsdam, exiger 50 % de toutes les valeurs financières disponibles, ce qui aurait coulé le plan. Les Soviétiques et leurs satellites auraient pu épuiser l’offre de Marshall à force d’exigences et de griefs. Pourquoi ne l’ont-ils pas fait ? Que disent sur ce point les archives soviétiques ? Peut-on s’en tenir à ce qu’avait dit Harriman : « L’oncle Joe nous a une nouvelle fois aidés. » ?
En tout cas ce tournant dans la politique américaine est à la fois le produit et l’effet d’une série d’événements qui se sont enchaînés en réaction au plan Marshall, plus précisément de la volonté américaine d’y incorporer pleinement l’Allemagne de l’Ouest en abandonnant toute idée d’une Allemagne restée unie et neutre qui risquait d’être « communisé ». Alors que la doctrine de l’endiguement était statique, la nouvelle approche américaine devint dynamique, voire offensive. Par contre, le blocus de Berlin, le coup de Prague, autant de réponses de Staline au plan Marshall ont conduit à la signature du pacte Atlantique, en avril 1949, puis à la division de l’Allemagne qui a été actée entre mai et octobre 1949.
Le plan Marshall, en tout 13,2 Md$ (130 Md$ d’aujourd’hui), a été, sur le plan économique, incontestablement un succès, bien que l’auteur avoue qu’il ne soit pas facile d’en mesurer l’impact avec précision. En moyenne, la production industrielle a augmenté de 60 %, mais 24 % en Suède et 241 % en Allemagne de l’Ouest. Les experts ont calculé que la croissance de la productivité en 1948 - 1949 a été de 2 à 5 % supérieure à ce qu’elle aurait pu être en l’absence du plan. Mais si succès économique il y eut sur le plan géostratégique, le plan Marshall,n’a pas du tout répondu aux attentes de ses initiateurs. Il avait été conçu à l’origine, on l’a vu, comme le moyen le plus sûr d’éviter un engagement militaire américain massif et durable sur le continent européen. Or, celui-ci s’est avéré en définitive indispensable et il a été réclamé dès le printemps 1948 avec insistance par la plupart des pays européens, la France de Paul Ramadier en tête. La barrière entre crédits Marshall et crédits militaires tomba vite. Le besoin de sécurité physique devint tout aussi impérieux que la recherche d’une sécurité économique. Plan Marshall et pacte Atlantique apparurent les deux faces d’une même monnaie. Tous deux eurent raison des réticences françaises à l’égard du redressement industriel allemand ; Paris se résolut de considérer son voisin, non plus comme une menace potentielle, mais comme un partenaire qui devint vite privilégié du fait de la position de Londres de se tenir à l’écart du processus d’unification européenne qui prenait son élan. Les paramètres principaux de la guerre froide, la division de l’Europe de l’Allemagne, de Berlin « bastion du monde libre » et la défense du camp occidental, tous ces éléments qui ont scandé notre histoire pendant quarante ans, trouvent leurs sources dans ces quelques semaines décisives.
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L’intérêt de cet ouvrage est loin d’être purement historique. D’abord, puisque l’on semble s’acheminer vers une nouvelle forme de guerre froide, cette fois-ci sino-américaine, il s’avère utile d’avoir à l’esprit les points d’affrontement entre les États-Unis et l’URSS, et qui ont été à l’origine de la première. Si l’affrontement américano-soviétique a été principalement d’essence idéologique, il fut également un heurt d’intérêts ou de conceptions économiques. On retrouve, aujourd’hui en accentué, cet aspect notamment dans la bataille des normes qui se déroule sous nos yeux au sujet de la 5G et du leadership qu’occupe (encore) Huawai dans ce domaine. Mais aussi par ce que l’histoire comporte souvent d’étranges cheminements ou similitudes. Observons que si la réforme monétaire allemande de mars 1948 a conduit au blocus de Berlin puis à la division de l’Allemagne, l’union économique et monétaire de mars 1990, en contrepoint, en a accéléré la réunification. Plus largement en incorporant les ex-satellites européens de l’URSS au sein de l’Otan, avant qu’ils n’intègrent l’Union européenne, l’Occident a repris son raisonnement de 1947. En effet, on a fait valoir, alors que leur entrée dans l’Alliance consoliderait leur démocratie et apporterait stabilité, mais cela était la tâche d’une organisation économique et non d’une alliance militaire. Or, l’Otan que l’on s’en réjouisse ou que l’on le déplore, de pure organisation défensive, durant toutes les années 1949-1990 est devenue un outil offensif en Serbie, en Afghanistan et en Libye, créant ainsi un nouveau malentendu entre la Russie et l’Occident. Qu’une telle constatation apparaisse sous la plume d’un auteur américain, reconnu, ne donne que plus de force à son analyse. Après tout, rester hors de l’Otan n’a pas eu d’effet négatif sur la démocratie ou sur les idées pro-occidentales en Suède ou en Finlande, alors que la Turquie, qui n’était pas une démocratie libérale, lorsqu’elle entra dans l’Otan en 1952, n’en est pas devenue une, sous le leadership d’Erdogan. La Pologne et la Hongrie ont régressé sur l’échelle démocratique.
George Kennan, le père spirituel de l’endiguement n’a-t-il pas écrit en 1997 que « l’élargissement de l’Otan serait l’erreur la plus fatale de la politique postérieure à la guerre froide ». Est -ce un hasard, si les relations avec la Russie commencèrent à se dégrader entre 2004 et 2007 comme elles l’avaient fait après 1947 après le discours de Marshall. Sans pouvoir pousser plus loin l’analyse, disons qu’aujourd’hui, comme hier, l’Occident, pressé d’engranger les gains qu’il avait obtenus après l’effondrement du camp socialiste et la chute de l’URSS, n’a peut-être pas été assez imaginatif, courageux ou attentif aux besoins de sécurité de la Russie pour établir avec elle des relations de confiance et de sincère coopération. Un demi-siècle après le fameux triptyque du général de Gaulle, nous en sommes toujours à espérer la détente, l’entente et la coopération. C’est dire que la philosophie qui a présidé à la conception et à la mise en œuvre du plan Marshall ne s’est pas totalement dissipée.