La force française de dissuasion et l’Alliance atlantique (janvier 1977)
Je me propose, comme souvent dans ces sortes de conférences, de commencer par des analyses, relativement abstraites, à la fois du vocabulaire et des théories, pour aborder le problème le plus difficile qui domine la pensée militaire française, mais que l’on a rarement le courage d’aborder franchement. Ce problème est le suivant : Comment peut-on concilier la participation française à l’Alliance atlantique avec l’affirmation d’une défense autonome fondée sur la dissuasion ?
Le concept de dissuasion n’est pas neuf dans la pensée militaire, mais il a pris au cours de ces dernières années une extension et une signification qui ne lui étaient pas reconnues dans le passé. On nous a toujours enseigné dans les écoles que si l’on voulait la paix, il fallait préparer la guerre, ce qui est une formule de dissuasion, l’hypothèse étant que dans la mesure où l’on est capable de gagner la guerre on n’aura pas à la livrer. Cependant, jusqu’à présent dans l’histoire, cette formule n’a jamais été confirmée par l’événement. D’autre part, même une fortification pouvait être considérée, de divers points de vue, comme un moyen de dissuasion : dissuasion d’une attaque portant sur une région déterminée du pays et, indirectement, moyen de détourner l’attaque vers une autre partie de la frontière ou de la ligne de feu.
Dissuasion - défense, une fausse antinomie
Le terme de dissuasion a pris, avec la mise au point des armes nucléaires, une signification inédite puisque l’on a couramment opposé dissuasion et défense. L’actuel chancelier de l’Allemagne Fédérale a écrit un livre qui s’appelle « Abschreckung oder Verteidigung » (« dissuasion ou défense »), comme si les deux termes étaient antithétiques.
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