L’Otan a fait ses preuves et remplit jusqu’à ce jour ses fonctions politiques et militaires (organisation de la défense collective, dissuasion nucléaire). Dans ce contexte, l’intégration de l’Allemagne a été pleinement menée à bien. La majorité des membres européens de l’Otan, dont l’Allemagne, considèrent la garantie de sécurité nucléaire des États-Unis comme un élément indispensable de leur propre sécurité. La guerre en Ukraine a rappelé l’importance de ce fait. En raison de la réorientation de la politique américaine vers la région du Pacifique, les Européens doivent envoyer un signal aux États-Unis pour leur indiquer qu’ils sont prêts à « partager le fardeau ». Ils sont en même temps contraints de penser une contribution européenne à la dissuasion nucléaire, qui pourrait un jour s’avérer nécessaire. Les premières idées à ce sujet doivent être examinées par l’Allemagne et la France. Le projet d’armement Système de combat aérien du futur (SCAF) pourrait être un premier pas vers une telle option.
L’Otan au XXIe siècle : une perspective allemande
Le contexte historique d’une défense européenne après la Seconde Guerre mondiale
« NATO was created to keep the Soviet Union out, the Americans in, and the Germans down (1). »
Lord Hastings Lionel Ismay, premier secrétaire général de l’Otan
Face à la perception par l’Europe occidentale d’une menace croissante de l’expansionnisme soviétique au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, un certain nombre d’initiatives visant à mettre en place une politique de sécurité commune virent le jour dès le début des années 1950, aboutissant au projet, tout à fait légitime en termes de politique de défense, d’une « communauté européenne de défense » (2). Les puissances occidentales victorieuses souhaitaient intégrer la République fédérale d’Allemagne (RFA), créée en 1949, dans les structures européennes, et faire ainsi en sorte que l’Allemagne ne puisse plus jamais troubler la paix sur le continent (3).
Après avoir dans un premier temps refusé le réarmement allemand, les Alliés occidentaux modifièrent leur position, l’Union soviétique ayant démontré dès 1949 qu’elle possédait des armes nucléaires, tandis que les événements de Corée en 1950 soulignaient la volonté du monde communiste d’étendre son influence (4).
L’affirmation de l’URSS comme grande puissance mondiale contraignit les États-Unis à renforcer non seulement leur arsenal nucléaire, mais aussi leurs capacités conventionnelles, afin de protéger le monde occidental. La crainte, dans les démocraties d’Europe occidentale, d’une évolution similaire à celle de la Corée, facilita l’intégration politique et militaire de l’Allemagne : « Dès l’après-guerre, la France avait œuvré pour arrimer les États-Unis à l’Europe de l’Ouest par une alliance permanente, afin de ne pas revivre les années 1920, protéger l’Europe de l’Ouest contre la menace soviétique et, sans le dire, encadrer la question allemande (5). »
Le 24 octobre 1950 eut lieu la présentation du plan Pleven, du nom du président du Conseil français René Pleven. Le projet visait à fonder une armée européenne intégrant des contingents allemands. Après des négociations difficiles, et que les États-Unis eurent imposé la subordination des 57 divisions européennes prévues au commandement de l’Otan, les traités furent soumis à la signature le 27 mai 1952, mais échouèrent le 30 août 1954 en raison du refus de ratification par l’Assemblée nationale française (6).
La persistance de la supériorité conventionnelle de l’Union soviétique conduisit les Européens de l’Ouest à réaliser que, en plus de leurs propres efforts conventionnels, seul le potentiel nucléaire des États-Unis constituerait un moyen de dissuasion efficace. Ces considérations donnèrent naissance à l’idée d’une « garantie de sécurité américaine » pour l’Europe occidentale, capable à la fois de dissuader Moscou d’une attaque et de faire contrepoids à une Allemagne de l’Ouest réarmée, autrement dit de garantir la sécurité avec l’Allemagne en même temps que vis-à-vis de l’Allemagne.
C’est ainsi que, dans le cadre du Traité de l’Atlantique Nord du 4 avril 1949 (7), est née d’une part la volonté d’établir une structure de commandement centrale pour la défense de l’Europe et d’y subordonner toutes les forces armées déployées dans la zone du Supreme Allied Commander Europe (SACEUR), d’autre part le dessein d’associer la RFA à la défense du continent. Dans ce contexte, l’Otan imposa des limites strictes au développement des forces armées de l’Allemagne de l’Ouest : citons, entre autres, l’interdiction de rétablir le Grand état-major général (der große Generalstab) et, en 1954, l’obligation faite à la RFA de s’engager à renoncer aux armes atomiques, biologiques et chimiques (8).
L’adhésion du pays à l’Otan en 1955 ouvrit finalement la voie au développement des forces armées ouest-allemandes, avec 12 divisions et des effectifs plafonnés à 500 000 hommes. Cela signifiait que, malgré les protestations soviétiques, l’Allemagne contribuait désormais à la défense de l’Europe de l’Ouest, tandis que se mettait en place un partenariat de sécurité transatlantique basé sur une dissuasion nucléaire et conventionnelle adéquate contre l’URSS. La formule précitée du premier secrétaire général de l’Otan était donc bien réalité.
Les stratégies de l’Alliance et l’élargissement depuis 1990
Depuis la création de l’Otan, deux périodes distinctes se sont succédé, au cours desquelles la réflexion stratégique de l’Organisation a évolué : la guerre froide et l’après-guerre froide.
De 1949 à 1991, la stratégie de l’Otan se définit principalement par la défense et la dissuasion, même si au cours des deux dernières décennies de cette période le dialogue et la détente occupèrent une place de plus en plus importante. Durant cet intervalle, quatre concepts stratégiques (9) furent adoptés. L’Allemagne de l’Ouest, principal champ de bataille potentiel, dépendait alors essentiellement de la dissuasion nucléaire et des forces conventionnelles et nucléaires des États-Unis stationnées dans le pays. Cette situation a, jusqu’à aujourd’hui, un impact durable sur les forces armées allemandes. L’Otan exerce depuis toujours une dissuasion nucléaire principalement soutenue par les États-Unis. Certains alliés (dont l’Allemagne) y contribuent encore aujourd’hui, par exemple par le biais d’exercices conjoints ou en assurant un soutien opérationnel technique avec la présence d’avions appropriés et le stockage d’armes nucléaires sur leur territoire. Dans le cadre du Groupe des plans nucléaires (NPG), tous les membres de l’Otan, à l’exception de la France, participent à la planification et au contrôle de la politique nucléaire de l’Alliance (10).
La chute de l’URSS et la dissolution du Pacte de Varsovie ont suscité de nombreuses interrogations quant à la pérennisation de l’Alliance atlantique, alors qu’une période de paix s’annonçait en Europe. Pourtant, l’Otan a continué à s’acquitter de ses tâches fondamentales, à savoir contribuer à la stabilité du continent, servir d’enceinte de consultation transatlantique, exercer la dissuasion et préserver l’équilibre stratégique européen, sans voir son existence frontalement remise en cause par ses membres.
Au contraire, l’Otan s’est élargie. La République tchèque, la Hongrie et la Pologne sont devenues membres en 1999. La Bulgarie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie y ont adhéré en 2004. Au Sommet de Bucarest d’avril 2008, il a été décidé d’inviter l’Albanie et la Croatie, qui ont rejoint l’Alliance en 2009. Pour la majeure partie des nouveaux membres intégrés à partir de 1990, l’Otan est perçue comme le moyen de protéger l’intégrité de leur territoire sans avoir à supporter le coût très élevé d’une politique nationale de défense. L’élargissement du concept de sécurité, au cœur des concepts stratégiques de 1991 et 1999 (11), a en effet permis à l’Otan d’élargir son champ d’action et de s’engager dans des missions de gestion de crise sur des territoires situés en dehors de ses limites géographiques, par exemple dans les Balkans occidentaux.
Le concept stratégique de 1999 précise que l’Otan devra faire face à des « risques complexes pour la paix et la stabilité euro-atlantiques, risques liés à des politiques d’oppression, à des conflits ethniques, au marasme économique, à l’effondrement de l’ordre politique et à la prolifération des armes de destruction massive » (12). En réaction à ces nouvelles menaces, l’Otan s’engage militairement en Afghanistan (2001-2021) et en Libye (2011).
L’élargissement de l’Otan était en pratique bloqué depuis 2008, en raison des pressions russes pour mettre un terme à l’extension de l’Alliance vers l’est. Le refus de la France et de l’Allemagne d’engager, en 2008, un processus d’adhésion de l’Ukraine est le signe très clair de cette réticence, malgré la volonté américaine d’engager l’Alliance dans cette voie. De même, le processus d’adhésion de la Géorgie, engagé en 2008, s’est enlisé à la suite de la crise russo-géorgienne de la même année.
La crise de Crimée (2014) et la guerre en Ukraine, lancée en février 2022 par la Russie, ont, encore une fois, profondément bouleversé les cartes du continent. La Suède et la Finlande, pays traditionnellement neutres, sont ainsi devenues membres de l’Alliance (13). Cette évolution répond, en définitive, à la question de la nécessité de l’Otan car, aujourd’hui encore, la mission principale de l’Alliance est la défense collective au titre de l’article 5 (14) : « Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties, et en conséquence elles conviennent que, si une telle attaque se produit, chacune d’elles, dans l’exercice du droit de légitime défense, individuelle ou collective, reconnu par l’article 51 de la Charte des Nations unies, assistera la partie ou les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée, pour rétablir et assurer la sécurité dans la région de l’Atlantique Nord (15). »
L’agression en Ukraine : le tournant
L’escalade agressive du président de la Fédération de Russie a brutalement fait prendre conscience à l’Europe, notamment en Allemagne et dans les pays de l’Europe de l’Est, de sa dépendance à la protection américaine. Or, les déclarations de Donald Trump à l’approche de la Conférence sur la sécurité de Munich du mois de février 2024 ont clairement démontré que celle-ci ne peut être tenue pour acquise (16).
La fiabilité de l’Amérique au sein de l’Otan pourrait se voir sérieusement mise à mal, par exemple dans le cas d’une réélection de Donald Trump, ou simplement par un successeur de Joe Biden qui, sans agir de manière aussi erratique que D. Trump, aborderait froidement l’Europe sous l’angle d’un calcul « coûts-bénéfices » au demeurant tout à fait compréhensible (17). Enfin, même en cas de réélection de Joe Biden, contenir la Chine restera une priorité stratégique de la politique étrangère des États-Unis. À cela s’ajoutent les deux attentes de Washington à l’égard de ses alliés européens : qu’ils assument une part plus élevée des dépenses de l’Otan pour leur propre sécurité et qu’ils soutiennent les États-Unis dans leur politique d’endiguement à l’égard de la Chine qui constitue, aujourd’hui déjà, et sans doute pour longtemps, l’axe principal de la politique étrangère américaine (18).
Après trente années de déflation militaire, et sans avoir jamais atteint l’objectif des 2 % de PIB préconisés pour la défense, les forces armées allemandes se trouvent dans une situation de dénuement capacitaire extrême à un moment où, pour la première fois depuis 1945, une guerre de haute intensité impliquant une grande puissance éclate aux portes de l’Europe, tandis que le principal allié du pays, les États-Unis, menace de remettre en cause les garanties de sécurité apportées de longue date.
La réponse apportée par le chancelier Scholz consiste à aborder ce « changement d’ère » (Zeitenwende) avec un programme de rééquipement majeur de la Bundeswehr. Dans un discours historique devant le Bundestag, Olaf Scholz déclarait ainsi que « le 24 février 2022 marqu[ait] un changement d’ère (Zeitenwende) dans l’histoire de notre continent » (19). Utilisant des termes forts, il affirmait son intention de faire des forces allemandes l’armée conventionnelle la mieux équipée d’Europe, annonçant la dotation d’un fonds spécial (Sondervermögen) de 100 milliards d’euros destiné à financer les grands programmes d’achats militaires à venir. Cette Zeitenwende est fortement tournée vers les États-Unis, premier partenaire et pourvoyeur de sécurité du pays. Berlin a brutalement redécouvert en février 2022 l’importance du parapluie nucléaire américain (20) et la nécessaire pérennité de l’Alliance atlantique en tant que cadre fondamental, aussi bien sur le plan conceptuel que doctrinal, de la Bundeswehr. L’Allemagne, et avec elle la plupart des autres pays européens membres de l’Otan et de l’UE (en particulier ceux de l’Est), considère toujours l’Otan comme la structure la plus importante pour organiser et garantir la défense euro-atlantique et comme un « pilier de l’ordre transatlantique » reliant les États-Unis et le Canada à l’Europe (21). Les contributions américaines restent, dans ce cadre, cruciales pour la capacité d’action de l’Otan : sans les contributions conventionnelles et nucléaires américaines, il n’est possible à l’heure actuelle d’assurer ni une dissuasion crédible, ni la défense militaire de l’Europe.
Avec la Zeitenwende, la première puissance économique d’Europe soulignait sa volonté de contribuer d’une façon adéquate à la défense conventionnelle de l’Europe dans le cadre de l’Otan (22). Le pays ayant par ailleurs réaffirmé, dans l’article 3 du Traité du 12 septembre 1990 (dit « Traité 2 + 4 ») (23), sa renonciation à la possession d’armes nucléaires, deux questions s’imposent : comment encourager les États-Unis à maintenir la dissuasion nucléaire en Europe ? Et quelles sont les options alternatives ?
La dissuasion nucléaire : un sujet difficile pour l’Europe en 2024
Si, en 1991, l’Ukraine avait réussi à conserver sur son territoire, au lieu de les abandonner, les armes nucléaires datant de l’ère soviétique, il est probable que son intégrité territoriale serait aujourd’hui encore garantie. L’idée de la nécessité d’une dissuasion nucléaire est donc à nouveau bien réelle en Europe. C’est le seul moyen de freiner la « soif de puissance » de la Russie et son agressivité envers ses voisins – même si le succès n’est pas garanti. Cette vision affecte particulièrement les États qui, comme l’Allemagne, ne disposent pas, et pour cause, de leurs propres armes nucléaires, mais ont délégué leurs besoins de dissuasion aux États-Unis en tant que principale puissance de l’Otan.
Répondre au besoin de dissuasion nucléaire implique par ailleurs de reconnaître les faiblesses et les contradictions de ce concept. Ainsi, pour être crédible, toute dissuasion nucléaire suppose d’abord de faire connaître à l’adversaire l’existence d’un arsenal nucléaire approprié. Non seulement l’existence de ces armes doit être vérifiable, mais il faut également démontrer que leur utilisation est elle aussi crédible, voire plausible. Outre des conditions techniques telles que des vecteurs suffisants (avions, fusées), cela nécessite également de réunir des conditions politiques et de planification démontrant que l’utilisation d’armes nucléaires est sérieusement envisagée.
Indépendamment de ces contradictions finalement insolubles, il n’existe actuellement, pour l’Allemagne et les autres puissances non nucléaires d’Europe occidentale, aucune alternative à la dissuasion nucléaire, c’est-à-dire à la dissuasion nucléaire étendue au moyen du parapluie américain dans le cadre de l’Otan.
Les Européens de l’Est, en particulier, ne font pas confiance à une structure de sécurité purement européenne, nécessairement basée sur les capacités françaises : « Néanmoins, dans l’architecture stratégique actuelle de l’Europe, Paris peut difficilement faire croire que ses intérêts dans l’ordre européen et international sont si importants qu’il accepterait la destruction de son propre pays pour défendre ses alliés. Même si la France jouait un rôle plus important dans l’architecture politique européenne, des aspects géographiques et économiques fondamentaux feraient toujours obstacle à une dissuasion française crédible. Au contraire, avec sa politique envers la Russie ces dernières années, Paris a suscité des doutes fondamentaux, en particulier parmi les pays d’Europe centrale et orientale, quant à sa capacité à placer les intérêts nationaux derrière les objectifs paneuropéens (24). »
Si les armes nucléaires représentent une constante de la politique de sécurité internationale et si la dissuasion nucléaire, malgré toutes ses contradictions, reste un élément central de la préparation en matière de sécurité allemande, européenne et transatlantique, alors il est impératif que tous les partenaires abordent à nouveau les questions de stratégie nucléaire. Cela est particulièrement vrai dans le contexte d’une éventuelle réélection de Donald Trump et dans l’hypothèse, impossible à exclure, de voir les États-Unis concentrer leur politique étrangère et de sécurité sur la région indo-pacifique, sur fond d’une réduction drastique de l’implication américaine en Europe.
Dans ce contexte, il est impératif d’avoir un débat au sein de l’Otan, mais aussi entre partenaires européens (25), même si les positions des uns et des autres apparaissent actuellement comme très contradictoires (26). S’il est évident que les négociations entre 32 États-membres aux intérêts très divergents ne sauraient se dérouler sans accrocs, il n’en reste pas moins que la stratégie nucléaire de l’Alliance nécessite un réalignement, et devra notamment répondre aux questions de stationnement (27) et d’équipement (28).
Voir la France (et éventuellement la Grande-Bretagne) se substituer complètement aux États-Unis dans l’exercice de la dissuasion nucléaire étendue est considéré comme difficilement concevable, ni même acceptable, en particulier par les pays partenaires d’Europe de l’Est. Il semble en revanche concevable que la France joue un rôle complémentaire à la dissuasion nucléaire étendue des États-Unis.
Une nouvelle approche, peu ou prou comparable à l’initiative MLF lancée par les États-Unis en février 1963, qui visait à construire un parc nucléaire sous le contrôle des Européens mais n’avait pas rencontré à l’époque l’approbation des puissances nucléaires France et Grande-Bretagne, n’aurait probablement aujourd’hui non plus aucune chance de succès (29).
Même avec une présence réduite des troupes américaines en Europe, la France n’abandonnera pas le contrôle de son arsenal nucléaire, mais elle pourrait renforcer la crédibilité de sa promesse de sécurité en impliquant dans une certaine mesure ses alliés. « Dans ce contexte, la réaction aux propositions du président Macron en faveur de davantage de dialogue entre Européens sur le rôle de la dissuasion française n’a sans doute pas été à la hauteur des espérances de l’Élysée. Cependant, des actions modestes et concrètes sont peut-être plus réalistes. Ainsi, un avion ravitailleur italien a participé récemment à un exercice des Forces aériennes stratégiques (FAS), intitulé Poker, en prenant place dans le dispositif ennemi (30). »
Au-delà de l’engagement très clair du ministre allemand de la Défense Boris Pistorius en faveur d’une « participation nucléaire » au sein de l’Otan (31) dans le contexte de l’extension de son territoire, il est certain que l’incertitude des évolutions à venir aux États-Unis rend nécessaire un réalignement de la posture de dissuasion nucléaire de l’Alliance, qui pourrait intégrer davantage que par le passé les positions de la France. Les options suivantes seraient envisageables :
– consultations sur l’implication et la place institutionnelle de la France au sein du NPG ;
– coopération accrue (FRA-Otan) dans les exercices des forces nucléaires respectives ;
– consultations franco-allemandes (avec les Britanniques ?) sur le développement prospectif d’une « participation nucléaire européenne » (32) basé sur le projet Scaf (Système de combat aérien du futur).
Otan et UE
Outre la question de la dissuasion nucléaire, redevenue d’actualité à la suite de la guerre en Ukraine, le rôle de l’UE et ses relations avec l’Otan doivent également être réalignés. Dans ce contexte, les forces conventionnelles sont particulièrement importantes.
En 2022, trois mois après la présentation par l’Union européenne (UE) de sa Boussole stratégique (33), qui confère à l’Otan une importance de premier plan, l’Alliance s’est exprimée comme suit au sujet de l’UE (34) : « L’Otan reconnaît l’intérêt d’une défense européenne plus forte et plus performante, qui contribue réellement à la sécurité transatlantique et mondiale, complète l’action de l’Otan et soit interopérable avec celle-ci. Les initiatives destinées à augmenter les budgets de défense et à mettre en place des capacités cohérentes dans un esprit de renforcement mutuel tout en évitant les doublets inutiles sont un volet essentiel de notre effort conjoint visant à rendre la zone euro-atlantique plus sûre (35). »
Le renforcement de la politique de sécurité et des capacités militaires de l’UE ne doit pas nécessairement se faire au détriment de l’Otan. Au contraire : si l’UE peut utiliser ses nouveaux instruments pour améliorer, par exemple, la capacité d’innovation et l’offre de compétences de ses membres, l’ensemble des forces en Europe en bénéficiera. Dans d’autres domaines, comme la mobilité militaire, les projets de l’UE offrent à l’Otan la possibilité de mener pleinement à bien sa mission.
À long terme, l’UE devrait disposer des compétences et des structures nécessaires pour planifier et mener une intervention civilo-militaire en cas de crise dans le Sud, principalement en Afrique, sans aucune aide des États-Unis. En même temps, les forces armées européennes doivent apporter une contribution sérieuse à la défense conventionnelle de l’Europe dans le cadre de l’Otan, sous peine de porter préjudice aux acquis du partenariat transatlantique. Un véritable « partage du fardeau » est aujourd’hui plus que jamais nécessaire.
À cet effet, les capacités américaines seront complétées ou remplacées par une contribution des Européens. Cet objectif doit être atteint grâce à une coopération étroite entre les services de l’UE et de l’Otan dans le domaine de la planification des forces (36). De plus, les projets convenus dans le cadre du fonds de défense de l’UE doivent correspondre aux objectifs de l’Otan. De cette manière, la valeur ajoutée des initiatives européennes pourra être clairement démontrée aux États-Unis (37).
Le défi consiste à renforcer la capacité des États européens à agir sans mettre en péril les relations politiques, militaires et industrielles avec les États-Unis dans le cadre de l’Otan. Laisser entendre à Washington que l’Europe pourra bien se passer de son aide serait une grave erreur qu’il convient d’éviter, car une telle assertion est parfaitement irréaliste à moyen terme. Politiquement non plus, il n’y a pas en Europe d’alternative à la reconnaissance du leadership des États-Unis en tant que puissance centrale.
Ce n’est d’ailleurs pas ce que souhaite la majorité des partenaires de l’Alliance. Toutefois, si les États-Unis devaient s’écarter de ce rôle et abandonner les commandes, il est probable que la seule option serait de voir un trio de dirigeants européens, composé (malgré le Brexit) de Londres, Berlin et Paris, occuper le siège resté vacant. L’Allemagne devrait, d’ores et déjà, préparer un tel scénario de manière informelle avec ses partenaires, au premier rang desquels la France. En raison du caractère particulièrement sensible de la question nucléaire, évoquée ci-dessus, celle-ci devrait également être discutée au préalable de manière confidentielle entre ces deux ou trois puissances clés (38).
Il n’en reste pas moins que les principales puissances européennes devraient faire tout ce qui est en leur pouvoir pour garantir a minima la préservation de la composante nucléaire de la contribution américaine à la dissuasion en Europe. C’est, de fait, dans l’intérêt de l’Allemagne (39). Cependant, dans l’hypothèse d’une réduction de l’engagement américain, voire d’un retrait d’Europe, il est essentiel d’avoir une idée de la manière dont l’Europe organiserait sa propre stratégie de défense et de dissuasion. Il faut prendre en compte ici le potentiel de la France, puissance nucléaire et membre de l’UE, et aujourd’hui plus que jamais premier partenaire de l’Allemagne.
Conclusion
L’Otan a fait ses preuves depuis bientôt 75 ans et remplit jusqu’à ce jour ses fonctions politiques (forum de discussion et de décision) et militaires (organisation de la défense collective, dissuasion nucléaire et mise en œuvre de missions). Il est dans l’intérêt de l’Allemagne de maintenir cette situation et d’éviter tout affaiblissement de l’Alliance, qui a fortement contribué à façonner l’État et ses forces armées.
Aucun État-membre de l’Otan n’a la capacité de se substituer aux États-Unis en tant que première puissance politique et militaire. Les Américains jouent un rôle clé dans la capacité d’action de l’Alliance : sans leurs contributions politiques, conventionnelles et nucléaires, ni une dissuasion crédible ni la défense militaire de l’Europe ne sont pour l’instant possibles. La majorité des pays européens de l’Otan considèrent la garantie de sécurité nucléaire des États-Unis comme un élément essentiel de leur propre sécurité. En raison de la situation qualitativement nouvelle en Europe de l’Est, le concept global de dissuasion nucléaire doit être repensé par l’Otan ; la question du stationnement des armes nucléaires (déplacement vers l’Est) ne doit pas être ignorée.
L’extension de l’Otan vers l’Est a, d’une part, permis aux États d’Europe de l’Est de rejoindre la communauté de valeurs et de sécurité de l’Alliance, mais elle a également conduit à une réduction significative des installations militaires et des infrastructures civilo-militaires. Il est désormais nécessaire d’y remédier et de planifier la mise en œuvre de mesures efficaces, notamment par des options rapides de relocalisation et de réduction des obstacles bureaucratiques. Outre les mesures infrastructurelles, un stationnement permanent non seulement de troupes allemandes, mais aussi françaises et britanniques (effectif de brigade) sur le flanc oriental de l’Alliance serait souhaitable (40).
En raison de la réorientation de la politique américaine vers la région du Pacifique, les Européens doivent envoyer un signal clair à leur allié, indiquant qu’ils souhaitent augmenter leur contribution conventionnelle au renforcement du flanc oriental et compenser les éventuelles réductions américaines par un vrai « partage du fardeau ». Outre l’augmentation des dépenses financières, l’Allemagne et la France devraient proposer une offre coordonnée entre les partenaires européens de l’Otan pour décharger les États-Unis des « tâches euro-centriques ». Alors que la Russie ne se classe même pas parmi les dix plus grandes économies du monde, l’Allemagne, cinquième par son Produit intérieur brut (PIB), devrait apporter une contribution à la dissuasion conventionnelle en Europe à la hauteur de sa puissance économique, soit au moins 3 % de son PIB.
Le maintien à long terme du bouclier de protection nucléaire en Europe ne sera possible qu’au prix d’une réduction des forces militaires conventionnelles américaines en Europe. Ici encore, l’Europe doit démontrer aux États-Unis qu’elle est un partenaire de confiance, sans pour autant laisser entendre qu’elle pourra se passer de leur soutien. Les alliés européens de l’Otan doivent devenir un partenaire indispensable capable d’apporter la preuve de sa valeur ajoutée (41). Les incertitudes pesant sur l’évolution politique aux États-Unis contraignent les Européens à réfléchir à leur propre contribution à la dissuasion nucléaire, que personne ne souhaite vraiment, mais qui pourrait un jour s’avérer nécessaire. Les premières idées à ce sujet doivent être examinées par l’Allemagne et la France. Le projet d’armement Scaf (Système de combat aérien du futur) pourrait être un premier pas dans ce sens, comme le suggère le général Naumann, ancien Chef d’état-major des armées (Céma) allemand (42).
À l’avenir, les Européens auront besoin de compétences et de structures autonomes, c’est-à-dire indépendantes des États-Unis, pour la prise de décision, la planification et la gestion des crises, notamment dans le Sud. Parallèlement, ils doivent aussi fournir des éléments conventionnels sur le flanc oriental de l’Alliance. C’est un véritable défi. Voilà pourquoi l’UE devrait être impliquée dans les processus de planification des forces de l’Otan. Ces forces armées modulaires doivent être planifiées au niveau de l’état-major de l’Otan mais en coordination avec l’UE, et elles doivent être déployables aussi bien dans le cadre de l’Otan (art. 5 du Traité de l’Atlantique Nord) que pour le compte de l’UE (réaction aux crises).
Idéalement, il conviendrait donc de définir un « niveau d’ambition » pour le « pilier européen de l’Otan », dont les indicateurs seraient sa contribution à la défense du continent, la mise à disposition des forces nécessaires à la réponse aux crises ainsi que l’exécution des tâches nationales (par ex. la défense des territoires d’outre-mer) (43). Si les Européens parviennent vraiment à cette fin, soulageant concrètement les États-Unis et leur libérant ainsi une plus grande marge de manœuvre dans le Pacifique, alors la probabilité de « garantir la présence américaine et maintenir la Russie à l’écart » selon les mots de Lord Ismay augmentera.
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Schmidt Jürgen, Europa, Dokumente zur Einigung, vol. 2, Munich, 1962.
Ständige Vertrerung der Bundesrepublik Deutschland bei der NATO, « Strategisches Konzept der NATO 2022 », 29 juin 2022 (https://nato.diplo.de/nato-de/01-NATOStatements/-/2539668).
The White House, National Security Strategy, octobre 2022 (www.whitehouse.gov/).
Trevithick Joseph, « Poland Wants to Host NATO Nukes to Counter Russia », The War Zone, 30 juin 2023 (https://www.twz.com/poland-wants-to-host-nato-nukes-to-counter-russia).
Védrine Hubert, Rapport pour le président de la République française sur les conséquences du retour de la France dans le commandement intégré de l’Otan, sur l’avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l’Europe de la défense, Paris, 2012 (https://www.vie-publique.fr/).
Wachs Lydia et Horovitz Liviu, Frankreichs Atomwaffen und Europa, SWP-aktuell, Berlin, 30 janvier 2023, 8 pages (https://www.swp-berlin.org/10.18449/2023A07/).
Zentrum für Militärgeschichte der Bundeswehr (dir.) : Militärgeschichte, Brunswick, 2021.
(1) NATO, « Origins—NATO Leaders » (https://www.nato.int/cps/en/natohq/declassified_137930.htm).
(2) Voir le mémorandum du chancelier Adenauer du 29 août 1950 (https://www.cvce.eu/), le plan Pleven du 24 octobre 1950 (https://www.cvce.eu/), le discours de Winston Churchill devant l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe du 11 août 1950 (https://www.cvce.eu/) et enfin le Traité sur la CED du 10 mars 1953 (https://www.cvce.eu/).
(3) Le plan Schuman, transformé par la suite en traité sur la « Communauté européenne du charbon et de l’acier » (CECA), est considéré comme exemplaire de la politique d’intégration à l’égard de l’Allemagne. Voir Schmidt Jürgen, Europa, Dokumente zur Einigung, vol. 2, Munich, 1962, p. 702 et suiv.
(4) Le 25 juin 1950, les troupes communistes de Corée du Nord franchissent le 38e parallèle. Le président américain Truman ordonne une contre-offensive qui débute le 15 septembre 1950 et conduit au rétablissement de la ligne de démarcation le 1er octobre 1950.
(5) Védrine Hubert, Rapport pour le président de la République française sur les conséquences du retour de la France dans le commandement intégré de l’Otan, sur l’avenir de la relation transatlantique et les perspectives de l’Europe de la défense, Paris, 2012, p. 2 (https://www.vie-publique.fr/).
(6) Le plan prévoyait la création d’une armée européenne composée de contingents de tous les États participants, l’intégration de la totalité des forces armées allemandes, mais pas de la totalité des forces armées des autres États-membres, ainsi que la nomination d’un ministre européen de la Défense. La Grande-Bretagne avait finalement décidé de ne pas y participer.
(7) Les États signataires étaient les douze membres fondateurs de l’Otan : les États-Unis, le Canada, l’Islande, la Norvège, le Danemark, le Royaume-Uni, la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, la France, le Portugal et l’Italie. La Grèce et la Turquie ont rejoint l’Alliance en 1952, la RFA en 1955 et l’Espagne en 1982. Tous les autres États signataires à ce jour ont adhéré après la fin de la guerre froide.
(8) L’Allemagne a intégralement renoncé à la fabrication, à l’acquisition et à la possession d’armes NBC (Nucléaire, biologique et chimique) en 1969 avec la signature du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP). Voir Zentrum für Militärgeschichte der Bundeswehr (dir.), Militärgeschichte, Brunswick, 2021, p. 441.
(9) Otan, « Les concepts stratégiques », 15 juillet 2022 (https://www.nato.int/).
(10) Pour « nuclear sharing », voir Roberts Brad, Germany and NATO’s Nuclear Deterrent, Federal Academy for Security Policy (BAKS), 7/2021 (https://www.baks.bund.de/de/node/2295).
(11) Otan, « Les concepts stratégiques », op. cit.
(12) Otan, « Le Concept stratégique de l’Alliance », 24 avril 1999, §20 (https://www.nato.int/).
(13) La frontière entre la Finlande et la Russie est longue d’environ 1 340 km.
(14) « Nous avons entériné un nouveau concept stratégique qui décrit l’environnement de sécurité auquel l’Alliance fait face, réaffirme nos valeurs et énonce la raison d’être et la principale responsabilité de l’Otan, qui est d’assurer notre défense collective suivant une approche à 360 degrés. Ce texte définit en outre les trois tâches fondamentales de l’Otan : la dissuasion et la défense, la prévention et la gestion des crises, et la sécurité coopérative. Il orientera notre action pour les années à venir, dans l’esprit de solidarité transatlantique qui nous anime. » Chefs d’État et de gouvernement des pays membres de l’Otan, « Déclaration du sommet de Madrid », 29 juin 2022 (https://www.nato.int/).
(15) Otan, « Défense collective – Article 5 » (https://www.nato.int/).
(16) Heilbrunn Jacob, « Trumps NATO-Versprechen », Internationale Politik und Gesellschaft (IPG) Journal, 16 février 2024, Friedrich Ebert Stiftung (https://www.ipg-journal.de/).
(17) « [W]e will count on our Allies to continue assuming greater responsibility by increasing their spending, capabili-ties, and contributions », The White House, National Security Strategy, 12 octobre 2022, p. 39 (www.whitehouse.gov/).
(18) Ibidem, p. 17 : « U.S. interests are best served when our European allies and partners play an active role in the Indo-Pacific, including in supporting freedom of navigation and maintaining peace and stability across the Taiwan Street ».
(19) Scholz Olaf, « Regierungserklärung von Bundeskanzler », 27 février 2022 (https://www.bundesregierung.de/).
(20) C’est la principale raison de la décision allemande d’acheter des avions F-35 aux États-Unis.
(21) Du point de vue allemand, l’Alliance intègre par ailleurs des États importants tels que la Turquie, la Grande-Bretagne et la Norvège qui, indépendamment de leurs relations avec l’UE, apportent des contributions substantielles à la défense de l’Europe.
(22) En 2023, pour la première fois depuis 30 ans, l’Allemagne a dépensé 2 % de son PIB pour la défense. « Deutsche Verteidigungsausgaben über Zwei-Prozent-Marke », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 14 février 2024.
(23) Deutscher Bundestag–Wissenschaftliche Dienste, Der Zwei-plus-Vier-Vertrag, 12 septembre 1990, Moscou (https://www.bundestag.de/resource/blob/579362/47b6ac2d55fcb4c12dfcce3cedc0e7d0/WD-2-149-07-pdf-data.pdf).
(24) Wachs Lydia et Horovitz Liviu, Frankreichs Atomwaffen und Europa, SWP-aktuell, Berlin, 30 janvier 2023, p. 3 (https://www.swp-berlin.org/10.18449/2023A07/).
(25) Barotte Nicolas, « Emmanuel Macron veut-il mettre la dissuasion nucléaire française à disposition des Européens ? », Le Figaro, 5 février 2024 (https://www.lefigaro.fr/).
(26) « Nous participons au partage nucléaire au sein de l’Otan. C’est pourquoi nous avons décidé d’acheter le F-35 pour remplacer le Tornado. Rien ne change dans notre position. » « Pistorius Boris: “Man muss klarmachen: Wir sind willens und in der Lage, uns zu verteidigen” », Die Welt, 18 décembre 2023 (https://www.welt.de/).
(27) Si nécessaire, ces armes provenant d’Allemagne, de Belgique et des Pays-Bas doivent être déplacées plus à l’est vers la Pologne ou les pays baltes, comme le gouvernement polonais le demande depuis longtemps.
(28) Trevithick Joseph, « Poland Wants to Host NATO Nukes to Counter Russia », The War Zone, 30 juin 2023 (https://www.twz.com/poland-wants-to-host-nato-nukes-to-counter-russia).
(29) La Force multilatérale (MLF) était une proposition visant à produire une flotte de sous-marins et de navires de guerre lance-missiles balistiques, chacun doté d’un équipage composé de personnel international de l’Otan et armé de plusieurs missiles balistiques Polaris à armement nucléaire. Sa mission aurait été de défendre l’Europe occidentale contre les menaces soviétiques pendant la guerre froide, tout en permettant aux membres de l’Otan, outre les États-Unis, de jouer un rôle dans la guerre nucléaire. La proposition a été lancée par les administrations Eisenhower, Kennedy et Johnson. La Grande-Bretagne s’y est opposée, et le projet a disparu au milieu des années 1960, sans avoir été adopté. Voir : Osgood Robert E., The Case of the MLF: A Critical Evaluation, Washington Center of Foreign Policy Research, Washington, 1964, 57 pages.
(30) Maitre Emmanuelle, La dissuasion française au troisième âge nucléaire, Recherches & Documents n° 14/2023, Fondation pour la recherche stratégique (FRS), 2023, p. 45 (https://www.frstrategie.org/).
(31) Barotte N., op. cit.
(32) Naumann Klaus, « Teilhabe an der französischen Nuklearmacht », Frankfurter Allgemeine Zeitung, 16 février 2024, p. 4.
(33) Conseil de l’Union européenne, Une boussole stratégique pour renforcer la sécurité et la défense de l’UE au cours de la prochaine décennie, Bruxelles, 21 mars 2022 (https://www.consilium.europa.eu/).
(34) Ständige Vertrerung der Bundesrepublik Deutschland bei der NATO, « Strategisches Konzept der NATO 2022 », 29 juin 2022 (https://nato.diplo.de/nato-de/01-NATOStatements/-/2539668).
(35) Marrone Alexander, « NATO’s New Strategic Concept: Novelties and Priorities », IAI Commentaries n° 22/30, juillet 2022, p. 4 (https://www.iai.it/sites/default/files/iaicom2230.pdf).
(36) Mattelaer Alexander, « Cooperation on Capability Development », in Lindstrom Gustav et Tardy Thierry (dir.), The EU and NATO—The Essential Partners, European Union Institute for Strategic Studies, Bruxelles, 2022, p. 37-43 (https://publications.europa.eu/resource/cellar/08e9e07b-cd30-11e9-992f-01aa75ed71a1.0001.01/DOC_1). Des pays comme l’Allemagne et la France en particulier doivent veiller à ce que les processus de l’UE et de l’Otan soient coordonnés : par ex. EU Capability Development Plan (CDP) et le NATO Defense Planning Process (NDPP).
(37) Gebauer Matthias, Hammerstein (von) Konstantin, Müller Peter et Schult Christoph, « Substantial Risk. NATO Grapples with Serious Organizational Shortcomings », Der Spiegel, 20 octobre 2017 (https://www.spiegel.de/).
(38) Lübkemeier Eckhard, Die Vermessung europäischer Souveränität, Stiftung Wissenschaft und Politik (SWP)-Studie, Berlin, 9 février 2024 (https://www.swp-berlin.org/10.18449/2024S05/).
(39) L’Allemagne n’est pas une puissance nucléaire et est définie par les traités internationaux de manière telle qu’un changement de ce statut est considéré comme irréaliste et non souhaité au niveau international. Voir Zentrum für Militärgeschichte der Bundeswehr, op. cit.
(40) En Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne et Finlande.
(41) Lors du Sommet de l’Otan à Washington, à l’été 2024, les partenaires européens pourraient par exemple déclarer qu’ils partageront la charge en fournissant d’ici 5 ans 50 % des drones, de l’artillerie et des moyens de défense aérienne nécessaires à la défense dans l’Est.
(42) Voir Naumann K., op. cit., et Lübkemeier E., op. cit.
(43) Voir Mattelaer A., op. cit., p. 93.