De l’URSS à la Russie
Il est incontestable que la Russie est en crise. Elle connaît des turbulences considérables, mais c’est un pays qui existe et joue un rôle international, non seulement en raison du crédit que lui accordent les autres États, mais aussi parce que les Russes estiment que leur pays doit être traité avec considération. Cependant, à Washington on pense que la puissance russe appartient au passé, donc qu’on peut la traiter avec légèreté. L’affaire du Kosovo en est une illustration remarquable.
C’est l’un des sujets sur lesquels il conviendrait de s’arrêter : la disparition de la puissance russe, mais en même temps les potentialités du retour à la puissance. Malgré des crises qui, pour des Occidentaux, paraissent impossibles à maîtriser (salaires impayés, notamment), on continue à vivre en Russie alors que dans un pays comme la France cela entraînerait un effondrement moral collectif, des manifestations de rue. Cela prouve que nos critères de jugement ne peuvent pas s’appliquer tels quels à ce pays.
Ce qui caractérise la situation russe aujourd’hui, ce n’est pas la différence entre une URSS qui aurait bien fonctionné et une Russie où tout va mal. Non : l’URSS s’est effondrée d’elle-même, il n’y a pas eu de guerre mondiale, nul État ou coalition ne lui a porté de coups décisifs et toute la communauté des États cherchait à l’aider, mais l’URSS s’est évanouie. C’est un cas sans précédent : un système politique puissant suranné, qui s’effondre tout d’un coup et meurt de sa belle mort. Cela s’est passé ainsi parce que l’URSS était en crise et on le savait parfaitement au moins depuis le début des années 80. On ne peut donc pas juger le désastre actuel par rapport à la puissance de l’URSS naguère, il faut considérer la continuité d’une crise commencée il y a fort longtemps. Et quand la Russie remplacera l’URSS, ce sera sur un fond de désastre économique, social et moral.
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