Du rôle historique de l'Armée
Les nations, comme les civilisations, naissent, croissent, déclinent et meurent. On le savait, bien avant Valéry. Il suffisait de contempler les Pyramides ou l’Obélisque. On savait aussi qu’à chacun des stades de la vie d’une communauté, l’armée, cette institution indestructible, avait à jouer un rôle — et capital. Peut-être l’a-t-on trop oublié, en l’époque de doute et de discussions byzantines que nous vivons. Quel est donc le rôle historique de l’armée ?
Et d’abord, peut-on caractériser, d’une manière suffisamment précise, les diverses étapes de la vie d’une civilisation ? Est-il possible de trouver des lois générales qui s’appliquent à des races, à des climats et à des époques différents ? Rien n’est jamais exactement semblable sous le ciel et l’histoire ne peut présenter de modèle valable à 100 %. Mais n’en est-il pas de même dans la nature ? L’eau ne bout à 100° que lorsqu’elle est « chimiquement pure ». La loi de Mariotte ne s’applique qu’aux « gaz parfaits ». Cela ne nous empêche pas de considérer les lois de la physique ou de la chimie comme exactes à l’échelle humaine et d’en tirer des formules et des conclusions qui s’appliquent avec assez de justesse pour pouvoir être employées à coup sûr. Il en est de même pour l’histoire. Et un rapide coup d’œil sur la naissance, la vie et la mort de quelques civilisations va nous montrer que les « modèles » du passé se ressemblent étrangement entre eux.
Une civilisation peut naître de deux façons différentes. Elle peut être « autochtone », c’est-à-dire s’établir toute seule sur un territoire que personne n’habitait avant l’arrivée de ses tenants. C’est le cas des Esquimaux, des Australoïdes, des Polynésiens, des Celtes d’Irlande, des Scandinaves, des Pygmées, des Indiens d’Amérique du Nord, des Arabes et aussi des Égyptiens, des Andéens d’Amérique du Sud, des anciens Chinois, des Mayas du Yucatan, des Sumériens, des pré-hindous de Mohenjo-Daro, et enfin, c’est le plus caractéristique, des Japonais. Ces civilisations, pour assurer leur croissance, ont à lutter, non contre d’autres hommes, mais contre le « défi du milieu », contre la mer, contre le froid, contre le désert, contre la forêt tropicale. Elles y réussissent plus ou moins. Certaines sont vaincues dans cette lutte inégale et leur développement s’arrête. Elles restent des civilisations avortées, comme celles des Esquimaux ou des Polynésiens. Certaines, par contre, se développent et les diverses communautés humaines — les tribus primitives — commencent à s’organiser. La lutte apparaît, donc la guerre.
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