Union française - L'affaire de l'Athos - L'arrestation des chefs rebelles - Les réactions tunisiennes et marocaines - Les évènements d'Égypte et l'Afrique du Nord - Le Togo se prononce en faveur de l'autonomie
Afrique du Nord
Les événements survenus au cours du mois d’octobre en Afrique du Nord font de plus en plus apparaître la liaison étroite qui existe entre les problèmes intéressant les trois pays.
L’affaire de l’Athos
L’arraisonnement, le 18 octobre 1956, au large des côtes oranaises, d’un yacht, l’Athos, chargé de matériel de guerre destiné aux rebelles, a permis, grâce aux documents saisis et aux déclarations des Algériens arrêtés à bord, de démontrer que de nombreux transports d’armes avaient déjà eu lieu et que le débarquement et l’acheminement de ces armes s’étaient effectués dans l’ancienne zone espagnole du Maroc. Le fait que ce matériel de guerre avait été fourni par l’Égypte a été confirmé par les passagers de l’Athos, qui ont également reconnu avoir subi un entraînement en Égypte en vue d’encadrer les rebelles algériens. La France a décidé de porter l’affaire de l’Athos devant le Conseil de sécurité des Nations unies.
La Conférence de Tunis et l’arrestation des chefs de la rébellion
Au même moment, le sultan du Maroc recevait à Rabat les dirigeants du Front de libération nationale (FLN) avec une publicité et un apparat dont le gouvernement français devait aussitôt s’inquiéter. Le sultan, à cette occasion, évoquait longuement « l’entité maghrébine », dans le même temps que M. Bourguiba suggérait publiquement à Paris la création d’un ensemble nord-africain. Ces prises de position et ces déclarations publiques préludaient à la rencontre entre le sultan et M. Bourguiba qui eut lieu à Tunis le 22 octobre et à laquelle devaient assister les dirigeants du FLN. Il est probable qu’au cours de cette réunion la constitution d’une république algérienne aurait été annoncée.
Tous ces projets, qui auraient aggravé très sérieusement les difficultés de la France en Algérie, furent déjoués par une audacieuse initiative française : le 22 octobre l’avion qui transportait les cinq dirigeants du FLN de Rabat à Tunis fut intercepté par les forces aériennes françaises et contraint de se poser à Alger. L’arrestation des chefs de la rébellion rendait inutile la conférence de Tunis, permettait la saisie d’importants documents, et semait l’inquiétude et le trouble dans l’organisation de la rébellion aussi bien au Caire qu’en Algérie.
Les réactions tunisiennes et marocaines
Les réactions marocaines furent extrêmement violentes : dans la seule journée du 23 octobre, 55 Européens furent sauvagement massacrés à Meknès et, les jours suivants, les attentats se poursuivirent dans le bled contre les fermiers français et leurs biens. Le général Cogny dut prendre des mesures très énergiques pour faire comprendre au gouvernement marocain qu’il assurerait coûte que coûte la protection des ressortissants français. Les discussions franco-marocaines en cours se trouvèrent stoppées et le sultan s’enferma dans un silence offensé, exigeant que « l’atteinte portée à son honneur » soit réparée par la libération des chefs du FLN. Un remaniement gouvernemental élimina les ministres du parti démocratique de l’indépendance (PDI) et M. Si Bekkaï constitua un nouveau cabinet composé presque uniquement de membres de l’Istiqlal.
En Tunisie, les manifestations anti-françaises ne causèrent aucune victime dans la population civile européenne ; les Tunisiens se contentèrent de barrer les routes pour empêcher les mouvements des troupes françaises chargées d’assurer éventuellement la protection des ressortissants français.
Le conflit israélo-égyptien et l’intervention franco-britannique
Notre position aurait pu cependant se désagréger très rapidement en Tunisie et au Maroc si l’entrée des troupes israéliennes en Égypte et l’intervention franco-britannique n’avaient pas retourné en notre faveur une situation internationale qui jouait jusqu’à maintenant au profit de Nasser et de ses visées panarabes. Prévoyant que la rébellion algérienne allait, à brève échéance, se trouver privée de son principal soutien, les responsables marocains et tunisiens ont adopté une position d’expectative sur le plan international, et se préoccupent sur le plan interne d’enrayer des mouvements désordonnés qui pourraient fort bien aboutir à l’installation de l’anarchie dans leurs pays respectifs.
Le gouvernement français a immédiatement envoyé au Maroc et en Tunisie des ambassadeurs extraordinaires, MM. Basdevant et Seydoux, chargés d’expliquer ses intentions et de renouer le dialogue avec les gouvernements marocain et tunisien.
Afrique noire
Le référendum togolais a eu lieu le 28 octobre 1956. La population togolaise, à une très forte majorité, a approuvé le statut d’autonomie dans le cadre de l’Union française et le chef du gouvernement togolais, M. Grunitzky, a demandé immédiatement au gouvernement français d’aviser l’organisation des Nations unies de ce résultat afin qu’il soit mis fin à la tutelle. ♦