France, Allemagne, Europe
Toutes les manœuvres diplomatiques de l’U.R.S.S. et de ses alliés et vassaux du monde communiste ne peuvent se comprendre, et par conséquent se parer, que si l’on ne perd à aucun instant de vue leurs caractères communs et fondamentaux. Elles ne sont en elles-mêmes ni de guerre ni de paix, elles ne tendent en elles-mêmes ni à la préparation d’une action proprement militaire, ni à une détente, mais à des succès de stratégie politique aux dépens du camp occidental. Il est raisonnable de penser, et il est donc probable, qu’elles sont conçues de manière à emporter par elles-mêmes les avantages qu’elles visent, c’est-à-dire à rendre, s’il est possible, l’action de force inutile, en tout cas à la limiter au maximum dans sa portée et dans ses risques éventuels : on ne cueillera le fruit convoité que s’il est jugé mûr, c’est-à-dire susceptible d’être détaché de l’arbre presque sans secousse.
Je dis : stratégie politique. J’entends par là qu’il s’agit d’une guerre — guerre définie par les maîtres de la pensée marxiste comme la plus dure et la plus impitoyable de toutes les guerres, guerre qui a pour but l’anéantissement total de l’adversaire en tant que force susceptible de faire obstacle à la victoire totale de la société collectiviste, à son règne sur la terre entière, à son avènement en tant qu’Empire universel. Toute offensive soviétique sur quelque point du monde qu’elle ait lieu tend en fin de compte, et à travers des objectifs intermédiaires, à ce but final, aussi bien si elle prend la forme de l’intimidation militaire, de l’agitation révolutionnaire, de l’appui à des mouvements nationalistes locaux, que si elle prend celle de l’assistance à des régions sous-développées, de l’offre d’une conférence pour régler les problèmes en suspens ou de la « compétition pacifique » et de l’intensification des échanges commerciaux.
Enfin, ces offensives sont « liées », à la manière dont sont liés les mouvements des pièces dans le jeu d’un bon joueur d’échecs. Chaque mouvement particulier tient son sens d’une idée de manœuvre générale, et comporte, en vertu de cette liaison même, selon les obstacles et les opportunités créées par la défense adverse, plusieurs développements possibles. Il s’agit de pousser des pions, d’occuper des « cases fortes », de dégager des lignes, de procéder à des échanges qui se révéleront avantageux à terme, d’amener l’adversaire à se découvrir ou à s’affaiblir sur un point de l’échiquier en rassemblant ses forces et son attention sur un autre point en apparence plus menacé.
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