Après avoir lu cet ouvrage on ne pourra pas dire que l’auteur ne prend pas parti. Il ne cache pas son empathie pour la Chine, fondée sur une connaissance profonde et intime de ce pays. Connaissance faite de liens familiaux, de voyages et séjours nombreux et aussi d’une culture impressionnante des bases intellectuelles, économiques et politiques de l’empire chinois.

Que le lecteur soit rassuré, il ne s’agit pas d’un exercice de prédiction de l’avenir et en particulier il ne trouvera pas de réponse définitive et péremptoire à la question de savoir si le XXI^e siècle sera le siècle de l’affrontement militaire américano-chinois. En revanche, le lecteur y trouvera une analyse très documentée des ambitions stratégiques chinoises et de ses ressorts historiques, stratégiques, économiques et politiques. Il montre tout au long de son propos combien la montée en puissance de la Chine est inexorable et que si l’hégémonie mondiale n’est pas son ambition, celle-ci n’en reste pas moins décidée à être la puissance dominante en Asie. Ce qui, compte tenu du contexte géostratégique et malgré la connivence économico-financière actuelle avec les États-Unis, la conduit à s’opposer directement à l’Amérique. Dans cette ascension aux extrêmes, la période 2025-2030 devrait être cruciale car elle marquera le début d’une parité militaire avec les États-Unis.

Mais ce livre n’est pas seulement une analyse de ce grand jeu sino-américain, il est aussi un essai sur le devenir du monde et une réflexion sur le devenir de nos démocraties et aussi sur le fait que les zones d’affrontements sont et seront, de façon plus brutale, l’Afrique et l’Asie.

Cette réflexion qui par moments d’ailleurs, prend des allures de digressions hors sujet, apporte peut-être en filigrane la réponse à la question du conflit potentiel sino-américain. En effet cette question serait-elle la bonne ? Les grands mouvements de ce siècle, en particulier la crise économico-financière, le péril environnemental, ne conduisent-ils pas inexorablement à la mise en place de régulations mondiales ; en d’autres termes d’une gouvernance mondiale ? Auquel cas le scénario catastrophe d’une guerre sino-américaine serait la projection d’un scénario inspiré par une vision stratégique passéiste ? Ne faudrait-il pas plutôt imaginer des scénarios où la Chine serait, de par sa puissance, un acteur global dans un monde global ? Un seul regret cependant, que l’empathie n’occulte le raisonnement. En effet, il semble très réducteur de faire de l’aspiration tibétaine au respect de son identité, un élément de la conspiration américaine à l’encontre de la Chine.