Entre kémalisme et néo-ottomanisme, la Turquie, membre pivot de l’Otan depuis 1952 semble hésiter, ce qui affecte son engagement dans l’Alliance et sa perspective d’adhésion dans l’UE. Si l’autonomie revendiquée de sa posture stratégique érigée en exemple pour les pays arabes peut inquiéter, sa récente acceptation de l’installation d’un radar DAMB rassure. L’Alliance saura-t-elle consolider grâce à la Turquie sa position au Moyen-Orient, en restant à l’écoute de ses différences ? Les ambitions régionales de la Turquie l’éloignerontelles de son alignement occidental ? Deux questions qu’étudient les auteurs.
La Turquie dans l’Alliance : jouer l’ambiguïté ?
Turkey in NATO: playing on ambiguity?
Turkey has been a NATO member since 1952 and yet continues to hesitate between policies reflecting the legacy of Kemal Ataturk and those that are neo-Ottoman. Such hesitation affects the country’s commitment to NATO and perspectives for its membership of the European Union. If, on one hand, the freedom of action that the country claims for its strategic posture, and flags up as an example for Arab countries, is worrying, on the other its recent acceptance of constructing an ABM radar site on Turkish territory is reassuring. Will the Alliance be able to use Turkey to consolidate its position in the Middle East whilst remaining open to Turkey’s differences? Will Turkey’s regional ambitions distance it from its current Western alignment? The authors take a close look at these two questions.
La Turquie, membre de l’Otan depuis 1952, a été, tout au long de la guerre froide, un allié important. Alors qu’elle a récemment accepté l’installation d’un radar de la défense antimissile balistique de l’Otan sur son territoire, il est intéressant de se pencher sur les relations entre la Turquie et l’Alliance atlantique afin d’en analyser la pertinence et d’évaluer les dynamiques qui façonneront cette relation à l’avenir. Créée pour la guerre froide, l’Alliance a revu sa stratégie à la chute de l’URSS et défini de nouveaux objectifs : la région méditerranéenne et le Moyen-Orient ont pris une nouvelle dimension géostratégique (1). La Turquie, pivot géostratégique de la guerre froide, pont entre l’Occident et l’Orient se pose en modèle pour les pays du Moyen-Orient et entretient une relation « polie » avec l’Iran. Elle apparaît comme un acteur de premier rang pour l’Alliance. Qu’en est-il vraiment ?
Les relations entre l’Alliance et la Turquie ont évolué depuis 1952. Hésitant entre post-kémalisme et néo-ottomanisme, la Turquie cherche aujourd’hui à préciser sa place au sein de l’Alliance, mais également parmi les pays de la région moyen-orientale et méditerranéenne, tout en poursuivant ses efforts pour devenir membre de l’Union européenne (UE). À la lumière du récent accord d’installation d’un radar DAMB (Défense antimissile balistique) sur son territoire, faut-il réévaluer la place de la Turquie dans l’Alliance ?
Nous décrirons dans un premier temps l’évolution des relations, souvent ambiguës, entre la Turquie et l’Alliance, puis nous en analyserons les enjeux majeurs. Enfin, à la lumière de l’actualité, nous verrons quel peut être l’avenir de la Turquie au sein de l’Alliance atlantique alors que de nombreux bouleversements, liés au « Printemps arabe » et aux révoltes en Syrie, agitent la région.
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