Comment récrira-t-on l'histoire de la Seconde Guerre mondiale en URSS ?
Depuis le XXe Congrès du parti communiste russe, la décision en a été prise à Moscou : il faut « destaliniser » l’histoire de la dernière guerre. Tout le monde est d’accord là-dessus dans les hautes sphères du Kremlin. Mais comment et dans quelle mesure ? La chose n’est pas facile et les historiens soviétiques ne paraissent pas avoir encore de plan précis, car les militaires eux-mêmes n’ont pas une opinion unanime quant au rôle joué par Staline.
On sait que dans son fameux rapport secret de février 1956, Nikita Khrouchtchev a totalement anéanti la légende du génie militaire de Staline. Celui qu’on avait comparé à César ou à Alexandre, que l’on avait exalté comme « le plus grand capitaine de tous les temps », Khrouchtchev, qui avait contribué comme les autres à accréditer cette légende, le représentait soudain comme le principal responsable de la non préparation du pays à la guerre et de la plupart des défaites subies par l’armée. Avec une incroyable désinvolture, il passait de l’excès de la louange à l’excès du blâme, il portait contre lui les accusations les plus graves. C’est tout juste s’il ne le décrétait pas coupable de haute trahison. Il importe de rappeler brièvement son impitoyable réquisitoire contre l’ex « stratège génial ».
Khrouchtchev commençait par apprendre à ses auditeurs communistes — ce qu’on savait depuis longtemps en Occident — que Staline, refusant de croire à l’attaque hitlérienne de juin 1941, avait négligé les avertissements répétés de Churchill. Il n’avait pas tenu compte davantage des informations envoyées de Berlin par les attachés militaires soviétiques, et de Londres par l’ambassadeur de l’U.R.S.S. C’est à cause de lui que l’industrie n’avait pas été mobilisée en temps voulu pour fournir le matériel nécessaire à l’armée.
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