L’Albanie : problèmes actuels
Le conflit sino-soviétique a donné à la République Populaire d’Albanie, sur le plan international, une notoriété à laquelle ni ses possibilités économiques ni sa superficie et sa faible population ne la prédestinaient. Dernier bastion en Europe Orientale du stalinisme le plus rigide, cet État se refuse à la moindre modification d’ordre économique ou politique ; grâce à une forte discipline intérieure, l’équipe dirigeante détient, à l’heure actuelle, un pouvoir incontesté en dépit de rumeurs périodiques faisant état de rébellions ou de tentatives de renversement du pouvoir. Les nombreux procès et exécutions qui ont jalonné l’histoire du pays au cours des vingt dernières années ont d’ailleurs permis d’éliminer pratiquement toute forme d’opposition, qu’elle ait été « titiste » ou pro-soviétique.
Sur le plan extérieur, la politique albanaise se caractérise principalement par un anti-titisme militant et acharné. Tito n’est en fait que le symbole commode qui permet aux dirigeants de Tirana de s’attaquer à la Yougoslavie, en tant que régime et en tant qu’État. Cette attitude est fortement marquée de nationalisme, car au-delà des divergences idéologiques apparaissent des ressentiments à l’égard du voisin qui, de 1945 à 1948, tout en lui apportant une aide importante, avait transformé l’Albanie en véritable satellite. L’un des dirigeants albanais de l’époque M. Kotchi Xhoxhe, Ministre de l’Intérieur et membre du Politburo, pro-yougoslave notoire, n’avait-il pas, dès novembre 1944, proposé une « confédération balkanique » dont Tito aurait certainement été le principal dirigeant ? Une union douanière et une étroite coordination des plans ne liaient-elles pas Tirana et Belgrade de 1945 à 1948 ? C’est contre un tel assujettissement que, dès l’expulsion de la Yougoslavie du Kominform en 1948, M. Enver Hodja, Premier secrétaire du Parti (1), s’éleva en éliminant, puis en le faisant exécuter en juin 1949, son rival Kotchi Xhoxhe.
Débarrassée du protectorat yougoslave, l’Albanie tomba donc dans les bras de Staline, seul contrepoids à la puissance proche de Belgrade. Moscou ne pouvait d’ailleurs, pour des raisons politiques évidentes, que soutenir Hodja contre Tito. Il n’en reste pas moins que, selon M. Milovan Djilas (2), avant la rupture avec Belgrade, Staline avait « offert » l’Albanie à la Yougoslavie qui avait préféré refuser ce don soviétique… C’est toutefois sous la tutelle de l’U.R.S.S. que l’Albanie entama son industrialisation et l’exploitation de ses ressources naturelles (chrome, nickel et cuivre notamment). Cette collaboration répondait certes aux intérêts bien compris de l’Union Soviétique. En outre, la situation géographique du pays, sa côte adriatique dotée de ports naturels bien protégés (île de Saseno), offraient à Moscou des avantages stratégiques incontestables.
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