Les expérimentations nucléaires dans le Pacifique : insularité et sécurité radiologique
Face aux problèmes majeurs que pose la sécurité radiologique autour d’un champ d’expérimentations nucléaires, le spécialiste aussi bien que le non-initié ont toujours pensé — un peu trop a priori — que le contexte insulaire devait à lui seul résoudre, ou tout au moins simplifier, les difficultés provoquées par les tirs de forte puissance. L’eau n’est-elle pas le meilleur agent décontaminant ? N’est-il pas séduisant de constater que finalement presque toute la contamination produite retombe directement sur elle ? Le présent article a pour premier objet de ramener cette apparente « simplification » à sa juste valeur. Tout n’est pas résolu aisément parce que la mégatonne ou la demi-mégatonne explose en milieu océanique au lieu d’exploser sur un territoire continental peu ou prou désertique. Les Américains, lors de l’expérience « Castle Bravo » (Bikini, mars 1954) en ont fait l’amère expérience. La garantie d’une grande sécurité radiologique dans la gamme de forte puissance (1) est plus difficile à assurer en Polynésie qu’aux confins du Tanezrouft lors de nos premières explosions aériennes, de faible puissance il est vrai.
Le deuxième objet de cet article est de traiter des différents prix de revient afférents à cette sécurité radiologique selon le niveau auquel on entend la situer. Or les décisions prises à ce sujet par le Gouvernement indiquent très clairement que nos expérimentations nucléaires doivent offrir des garanties de sécurité exceptionnelles. Le coût qui en résultera ne pourra être réellement évalué qu’a posteriori. Mais, nous savons déjà qu’il est sans commune mesure avec les dépenses engagées à ce sujet à Reggane. Comme il appartient aux Armées d’assurer pratiquement toute la sécurité radiologique au Pacifique (hormis celle du très proche environnement de l’engin), les dépenses de fonctionnement qu’il faudra y consacrer risquent de croître corrélativement avec les puissances expérimentées. Aussi, nous a-t-il semblé opportun de faire le point sur les raisons qui motivent de telles dépenses, puis d’examiner s’il n’est pas possible de les stabiliser, voire de les réduire.
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