Militaire - Grande-Bretagne : Livre blanc sur la Défense - Belgique : organisation du service militaire de 12 mois - République fédérale d'Allemagne : Livre blanc sur la Défense et discussions sur la durée du service militaire - Canada : activités militaires dans le Tiers monde - Australie : soutien militaire à la Malaisie et à Singapour - République populaire de Mongolie : emprise soviétique - Chine : création d'un corps de production et de construction
Grande-Bretagne : Livre blanc sur la défense
Le Livre blanc britannique sur la défense pour l’exercice budgétaire qui s’étend du 1er avril 1969 au 31 mars 1970 a été publié fin février. Le budget de la défense s’élève à 2 266 millions de livres pour 2 271 en 1968-1969. Il reste donc supérieur d’environ 900 M de francs au budget militaire français. Sa réduction en valeur absolue est due à des économies réalisées sur les commandes de matériels, la déflation des stocks et celle des effectifs outre-mer. Tandis que les crédits des forces nucléaires stratégiques de la Royal Navy et de la recherche diminuent en valeur absolue, ceux de la Royal Air Force augmentent en raison du coût de la mise en service de nouveaux appareils McDonnell Douglas F-4 Phantom II et Hawker Siddeley Harrier (à décollage vertical). Après avoir représenté 6,5 % du produit national brut en 1967 et 6 % en 1968, le budget de défense britannique est, pour cette année, inférieur à 6 %. Le Livre blanc souligne que la Grande-Bretagne est la seule puissance européenne à fournir des forces nucléaires à l’Otan et à disposer de moyens d’intervention modernes et instruits capables d’agir sur les trois fronts principaux de l’Alliance, de l’Arctique au Caucase, et que le repli des garnisons situées à l’Est de Suez lui permettra d’accentuer le rôle prépondérant qu’elle entend jouer dans l’Alliance. Il est également annoncé que l’administration centrale londonienne se réorganise sous le signe de l’utilisation accrue de l’informatique et de la mise en œuvre de méthodes américaines de « management ».
Pour l’Armée de terre (armée de métier), le problème capital demeure celui du recrutement. Les engagements ont en effet diminué de 26 % par rapport à 1967. La cause principale réside vraisemblablement dans le manque d’attrait de la carrière militaire depuis l’annonce de l’évacuation des garnisons d’outre-mer. Le recrutement des officiers et des sous-officiers reste cependant satisfaisant. Les programmes d’équipement se déroulent régulièrement : 6 régiments de cavalerie devaient être dotés de chars Chieftain en avril 1969, tous les régiments d’infanterie sont équipés de VTT (Véhicules de transport de troupe) à chenille FV432. La mise en place de camions amphibies Stalwart et du système de transmission Bruin se poursuit, celle du calculateur d’artillerie Face débute. Un « Drone » de surveillance du champ de bataille entrera en service en 1970. Les forces les mieux instruites demeurent celles de l’Armée du Rhin et des réserves stratégiques stationnées en Angleterre qui sont soumises à un entraînement rigoureux et qui, grâce à une aviation de transport moderne, peuvent exécuter des manœuvres dans de nombreux pays.
Belgique : organisation du service militaire de 12 mois
La force terrestre belge comprend :
– la force d’intervention stationnée pour la plus grande partie en République fédérale d’Allemagne (RFA) dans la région de Cologne, forte de deux divisions mécanisées à une brigade mécanisée et une brigade blindée, et d’un groupement particulier appelé « force de couverture » ;
– les forces de défense de l’intérieur réparties dans les trois « circonscriptions militaires » ;
– les « troupes para-commandos », réserve générale, composées pour moitié d’appelés volontaires ;
– les écoles et les centres d’instruction ;
– la « base de la force terrestre » qui comprend les groupements logistiques, les arsenaux, les parcs, les ateliers et les hôpitaux.
La durée pendant laquelle les citoyens belges sont soumis aux obligations militaires est de quinze ans à compter du 1er janvier de l’année au cours de laquelle l’appelé atteint l’âge de 19 ans. L’autorité civile effectue le recensement des jeunes gens de 17 ans qui sont convoqués un an après pour passer trois jours au centre de recrutement et de sélection à Bruxelles.
Le service actif dure normalement douze mois (quinze mois pour les officiers de réserve). Les recrues ont cependant la possibilité de rengager de trois ou six mois à l’issue de leur année de service normal pour accomplir leur service militaire sur le territoire belge et non en Allemagne. L’incorporation se fait autant de fois par année qu’il existe d’unités élémentaires (compagnies, escadrons, batteries) qui sont toutes constituées par des classes homogènes. Ainsi, pour les corps de troupe à trois unités élémentaires (cas général), l’incorporation est effectuée de façon à ce qu’il y ait un recouvrement de trois mois entre le moment où les recrues sont incorporées et celui où les miliciens qu’elles doivent remplacer sont démobilisés. Cette période de trois mois correspond à la phase de l’instruction individuelle comprenant l’Instruction commune de base (ICB) d’une durée d’environ deux mois, et l’Instruction particulière individuelle (IPI). Les corps de troupes se renouvellent donc par tiers par unités élémentaires complètes dont les appelés ont tous un minimum de trois mois de service. La formation individuelle des recrues destinées à remplir une spécialité commune à toutes les armes (conducteurs, secrétaires, magasiniers…) se fait dans des centres d’instruction spécialisés où sa durée oscille entre deux et quatre mois selon sa nature. Mais la proportion des spécialistes appelés n’est que de 25 %, la plupart des spécialités étant tenue par des engagés.
Les candidats volontaires pour devenir officiers de réserve sont sélectionnés au centre de recrutement et de sélection et sont dirigés sur une école d’arme d’où, après sept à dix mois d’instruction selon l’arme, ils sortent avec le grade d’adjudant. Affectés dans un centre d’instruction, ils sont mis à l’essai pendant deux ou trois mois et nommés sous-lieutenants entre le 10e et le 12e mois de service selon les cas. Ils sont ensuite affectés dans une unité jusqu’à la fin de leur service militaire qui se termine au 15e mois.
Les candidats sous-officiers de réserve, choisis également au centre de recrutement et de sélection, sont envoyés dans une école d’arme où ils sont formés en six mois, à la suite de quoi ils sont affectés dans une unité.
– Les réservistes récemment libérés du service actif effectuent trois périodes dans la force d’intervention, puis sont ensuite affectés aux forces de défense de l’intérieur où ils doivent en principe accomplir deux périodes. Une exception est faite pour les réservistes de certaines unités des services dont la profession civile est très voisine de leur fonction militaire et pour lesquels chaque période est limitée à sept ou huit jours.
La Belgique, dont l’effort militaire est un des plus faibles parmi les Nations de l’Otan, a réduit progressivement la durée de son service militaire sans souci des exigences de l’Otan. C’est, avec la Norvège, la seule Nation de l’Otan où le service militaire est de douze mois.
Le temps de service est en effet passé de 24 mois en 1945 à 21 mois en 1952, puis à 18 mois en 1957 et enfin à 12 mois depuis 1959. Le déficit en effectifs qui en est résulté n’a pu être comblé par une augmentation suffisante des engagements à la fois pour des raisons financières et pour le peu d’intérêt que les Belges en général portent à la carrière militaire.
Pour maintenir à un niveau acceptable leurs troupes mises à la disposition de l’Otan, les Belges ont dû réduire ce qui existait sur leur territoire.
Le commandement belge est en train d’appliquer un « plan de restructuration » dont les principales dispositions portent sur : l’augmentation des moyens des « forces de défense de l’intérieur » et la révision des moyens de la « base de la force terrestre ». Mais, pour mener à bien ces réformes, l’objectif à atteindre, sur le plan des effectifs, est d’arriver à la proportion de 80 % de volontaires de carrière (cadres compris) et 20 % de miliciens.
République fédérale d’Allemagne :
Livre blanc sur la défense…
Le gouvernement fédéral a publié son premier Livre blanc sur la défense en février dernier. En matière de « stratégie », l’adoption du concept de l’Otan de « riposte à la mesure » est confirmée ainsi que la volonté de réaliser une défense le plus en avant possible, de coopérer à la planification de la mise en œuvre des forces, et de participer à la consultation pour l’emploi des armes nucléaires.
La fusion annoncée de la défense territoriale et de l’Armée de terre a commencé et s’étalera sur trois ans. En 1971, les commandants de corps d’armée auront des responsabilités territoriales. Les préoccupations financières qui ont fait limiter les effectifs à 460 000 hommes, font également tendre à remplacer les achats à l’étranger par des fabrications en commun par coopération bi ou multilatérale.
…et discussions sur la durée du service militaire
La commission de défense du Bundestag a repoussé les propositions de modification de la durée du service que les libéraux voulaient faire réduire à 12 mois et que les socialistes souhaitaient voir varier de 12 à 18 mois suivant les catégories de personnels. M. Schrœder, comme le préconisait l’Otan, a défendu le service de 18 mois pour maintenir le volume des forces en condition opérationnelle à un niveau suffisant. La proposition de créer un impôt frappant les non-appelés a également été rejetée. On estime actuellement que 47 % des jeunes gens sont appelés, 30 % déclarés inaptes, 20 % exemptés, 2 % volontaires pour servir dans la police des frontières ou dans celle des Länder ; 1 % fait défaut pour des raisons diverses et notamment d’objection de conscience (il y a eu, en 1968, 11 798 demandes d’exemption à ce titre pour 5 963 en 1967). La possibilité de se soustraire aux obligations militaires en s’expatriant durant la période d’appel a toutefois été rendue impossible grâce au vote d’un amendement particulier.
Canada : activités militaires dans le Tiers-Monde
Le Canada occupe une position très favorable vis-à-vis des pays du Tiers-Monde. Cela est dû à son haut degré de développement, à son niveau de vie élevé, à ses ressources considérables mais aussi, bien qu’elle soit modeste (0,36 % du revenu national), à sa participation à divers programmes d’assistance sans recherche d’influence politique ou idéologique. En 1968, 65 pays ont bénéficié d’une assistance : 18 pays asiatiques, 7 de l’ancienne fédération des Antilles britanniques, 11 africains anglophones, 16 africains francophones et 13 latino-américains. Le gouvernement canadien voudrait cependant accroître jusqu’à 1 % de son revenu national le budget de l’assistance et substituer à l’aide philanthropique du passé une coopération plus réaliste s’exprimant par une politique d’investissements et d’échanges commerciaux. Sur le plan militaire, il faut distinguer deux aspects :
– l’assistance militaire proprement dite qui comprend l’instruction au Canada de stagiaires étrangers (Tanzaniens, Malaisiens, Jamaïcains, Nigérians, Ghanéens), l’aide technique à la mise sur pied de forces armées (Malaisie, Ghana, Tanzanie), la livraison de matériels militaires, surtout aéronautiques et de transmissions (Malaisie) ;
– la participation aux organismes de contrôle de la paix a toujours retenu l’attention des dirigeants canadiens qui ont, depuis vingt ans, envoyé des contingents, des délégués ou des observateurs dans treize pays : Palestine, Cachemire, Corée, Gaza, Liban, Congo Kinshasa, Nouvelle Guinée occidentale, Yémen, frontière indo-pakistanaise, Laos, Cambodge, Vietnam et Chypre où le Canada entretient actuellement un détachement de plus de 800 hommes.
Australie : soutien militaire à la Malaisie et à Singapour
Le Premier ministre d’Australie a défini au début de l’année le déploiement futur des troupes australiennes en Malaisie et à Singapour : 1 400 hommes de l’Armée de terre seront transférés de Malaisie à Singapour, tandis que deux escadrons de Mirage III resteraient en Malaisie avec un détachement permanent à Singapour où deux destroyers seraient basés. Ces dispositions, valables en principe jusqu’en 1971, seront ensuite modifiées.
Ces forces seront utilisées avec le seul accord des gouvernements australien et néozélandais et uniquement pour repousser des infiltrations extérieures à l’exclusion de tout emploi en maintien de l’ordre.
Le Premier ministre australien a, en outre, préconisé la signature de pactes de non-agression dans cette région du monde avec participation de puissances extérieures à cette zone afin de renforcer l’action menée par l’Australie et la Nouvelle-Zélande pour la sauvegarde de la stabilité politique et économique du Sud-Est asiatique. Il apparaît en effet que, compte tenu de la réduction du potentiel britannique à l’Est de Suez, la sécurité de ces deux pays sera de plus en plus assurée par les États-Unis dans le cadre de l’ANZUS.
République populaire de Mongolie : emprise soviétique
Les déboires économiques de la République populaire de Mongolie, dus à la fois à des conditions climatiques exceptionnellement rudes au début de 1968, à l’augmentation du prix de revient de la construction et à la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, ont affecté la situation intérieure et les relations extérieures. L’aide soviétique est ainsi devenue encore plus indispensable et la Mongolie n’a pu que s’aligner sur la Russie et la soutenir aussi bien dans son différend avec la Chine que dans l’affaire tchécoslovaque, et dans son projet de réunion d’une conférence mondiale des partis communistes. Sous le couvert de cette aide et par le biais d’accords de coopération, les Soviétiques se sont solidement implantés en Mongolie, et ce pays est devenu pour eux un glacis qu’ils contrôlent de près. Les Mongols ne sont plus en mesure de remettre en cause cette emprise. Alors que la République populaire de Mongolie bénéficiait jusqu’en 1966 de l’aide économique et technique chinoise, les relations entre les deux pays se sont beaucoup détériorées et le volume des échanges commerciaux est maintenant presque nul.
Le traité d’amitié, de coopération et d’aide mutuelle, signé en janvier 1966 par l’URSS et valable pour vingt ans, a prévu que les mesures indispensables pour assurer la sécurité, l’indépendance et l’intégrité territoriale des deux États seraient prises en commun. C’est à ce titre que l’URSS apporte à la Mongolie une aide militaire importante : fourniture de chars T-54, avions MiG-19, fusées, radars, etc. et détachement d’instructeurs en grand nombre. Des unités soviétiques stationnent en Mongolie notamment dans la région d’Oulan-Bator, et une tendance à l’intégration des deux armées se précise.
L’intérêt des Soviétiques pour la Mongolie s’explique par la proximité du transsibérien, les importants gisements de cuivre, manganèse, charbon et pétrole de la région frontalière et les complexes industriels du Kousbass et du lac Baïkal qui représentent un pourcentage croissant du potentiel économique de l’URSS.
Chine : création d’un corps de production et de construction
Le gouvernement a trouvé un moyen commode de se débarrasser des Gardes rouges et des rebelles révolutionnaires en les enrôlant dans l’armée à l’occasion de la campagne de recrutement en cours. Un corps « de production et de construction » de plus de 100 000 hommes a été créé dans le Heilung Kiang, où, en plus de sa mission économique, il doit participer à la surveillance et à la défense de la frontière. ♦