Sciences et techniques - La France et la documentation scientifique et technique
Dans différents articles parus depuis trois ans dans la Revue Défense Nationale nous déplorions le manque de direction dans l’effort français d’adaptation au galop universel de l’Information Scientifique et Technique. Certes il existe depuis longtemps des organismes publics civils et militaires qui traitent et diffusent l’information. Nous n’en citerons aucun, faute de pouvoir les citer tous. Mais, en dépit de la bonne volonté et de la compétence de leurs directeurs et de leurs personnels, leurs efforts isolés sont moins efficaces qu’ils pourraient l’être si une coordination nationale, que seule une instance gouvernementale peut assumer, était mise au point.
Deux associations nationales œuvrent depuis longtemps par tous les moyens à leur disposition avec une ingéniosité et un dévouement de leurs adhérents, dans certains cas, admirables. Leur but commun est d’une part, d’attirer l’attention des pouvoirs publics par des manifestes qui décrivent la situation en insistant, peut-être même un peu trop, sur la carence gouvernementale, car on ne peut tout attendre du gouvernement. D’autre part, ces associations regroupent les documentalistes et leur proposent des journées d’étude soit sous forme de visites de centres de documentation choisis pour leur importance ou leur originalité, soit sous forme de colloques, tables rondes, etc.
C’est dans le cadre de ces journées d’étude que la commission « Information et Documentation » de l’ANRT (Association nationale de la recherche technique) a organisé le 18 février 1970 en l’Hôtel des Arts et Métiers, un colloque sur le thème : « Amélioration de l’Information Scientifique et Technique par une coopération active », colloque auquel M. Aigrain, Délégué général à la Recherche scientifique et technique a bien voulu consacrer quelques heures.
Il s’agissait de faire connaître la nature et le mécanisme de quelques coopérations réellement efficaces et de préciser leurs conditions de survie.
L’assistance avait reçu un dossier de base plusieurs semaines avant le colloque et eu par conséquent le loisir de l’étudier, si bien que la journée fût entièrement consacrée à des débats menés de main de maître par des présidents de séance et, où chacun a pu obtenir des précisions sur les points qui l’intéressaient le plus.
C’est ainsi que l’assistance apprit qu’une « Banque de données » est réalisée en France sous l’égide du Professeur Bonnier à Grenoble, par coopération internationale de nombreux spécialistes dans le domaine de la thermochimie.
C’est ainsi que les auditeurs ont pu constater que la « Documentation internationale de recherche routière » qui associe quinze pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) évite à ses adhérents une perte de temps et d’argent en collectant les sujets de « recherches en cours ». L’information est recueillie grâce à des enquêtes périodiques dont chaque membre de la DIRR est responsable à l’échelon national. Dans ces enquêtes, on tient compte non seulement des nouveaux projets, et des projets terminés mais aussi des recherches abandonnées ou mises en attente. Les résultats sont mis à la disposition de tous les adhérents.
Enfin, les débats ont bien mis en lumière certains points que l’on peut résumer ainsi :
— Nécessité non plus d’échanges spontanés et bénévoles, mais systématiques, rationalisés et si besoin est, évalués : d’où organisation et fonctionnement régulier des échanges.
— Les accords devront donc être rédigés sous forme de contrats engageant les parties, sinon des défaillances sont à craindre.
— La coopération doit signifier l’amélioration des services de l’ensemble, mais aussi de chacun des membres.
— Les échanges internationaux compliqués par la barrière des langues, rendent difficile le respect des singularités de chacun, ainsi que le respect de détails tout aussi importants que les plans d’ensemble.
Comment amorcer une coopération, qu’elle soit par discipline ou interdisciplinaire, par centre d’intérêt ou par domaines complémentaires, nationale ou internationale ?
Quelques recommandations ont été lancées :
— Partage des abonnements.
— Assistance par échange de reproductions dans une limite donnée.
— Introduction d’un ticket modérateur si nécessaire.
— Partage du dépouillement des périodiques, soit par sujet, soit par langue.
— Choix de la ou des langues des résumés.
— Centralisation possible de l’archivage.
— Classification ou Thésaurus multilingue à développer toujours en commun.
On peut espérer que, grâce aux moyens modernes de traitement de l’information, ces efforts de coordination seront facilités dans les années qui viennent.
Mais une fois de plus, il faut insister sur le fait que les efforts resteront dispersés et disproportionnés avec les résultats tant que le gouvernement ne prendra pas en main d’une façon ou d’une autre, les rênes du char de la documentation.
C’est ce que l’on est en droit d’attendre du « Comité national de documentation scientifique et technique » créé par décret 68-1270 du 9 décembre 1968 auprès de la Délégation générale à la Recherche scientifique et technique, et c’est le vœu qu’a émis l’assemblée par la voix de personnalités éminentes de l’ANRT. ♦