Défense en France - Les manœuvres nationales 1971 - Voyage d'information du Centre des hautes études militaires (Chem) en Pologne et en Roumanie - La politique immobilière des Armées - Départ du général Fourquet, Chef d'état-major des armées (Céma)
Les manœuvres nationales 1971
Les manœuvres nationales des forces armées, Manat 71, qui se sont déroulées du 10 au 18 juin, avaient pour thème le développement d’une crise internationale en Méditerranée impliquant pour la France une menace sur ses communications maritimes et ses installations les plus vitales du littoral sud et de Haute-Provence, menace concrétisée par des actes d’hostilité.
Le choix de ce thème permettait de mettre sur pied tout d’abord un exercice national (Exnat) pour l’ensemble du territoire puis, conjointement, trois exercices réels interarmées localisés dans le secteur sud-est de la France et en Méditerranée occidentale (Sudex, Méditex, Datex).
Exnat, qui s’est déroulé du 10 au 15 juin 1971, était un exercice de commandement et de transmissions destiné à étudier la meilleure organisation possible pour le traitement des renseignements, la mise en œuvre des plans de sûreté, des plans de défense et des plans d’action en mer et outre-mer. À ce titre, tous les hauts niveaux de Commandement et quelques autorités civiles participaient à cet exercice. Sudex était un exercice de défense opérationnelle du territoire, organisé par l’Armée de terre en liaison avec la Marine et l’Armée de l’air. Les 14 et 15 juin les unités des 5e (Lyon) et 7e Régions militaires (Marseille) se sont opposées aux tentatives d’infiltration et de sabotage menées par des éléments parachutistes de la 11e Division et du groupement de fusiliers marins commandos contre le littoral et les bases de la Force nucléaire stratégique (FNS). Dans le même temps, tout en participant à la défense des côtes, la Marine conduisait, en liaison avec l’Armée de l’air, un exercice de défense des approches aéromaritimes du 13 au 18 juin. Méditex a mis en œuvre les forces de la 3e Région maritime, l’Escadre de la Méditerranée renforcée d’éléments de celle de l’Atlantique, l’aéronautique navale embarquée et basée à terre et des appareils des Forces aériennes tactiques (Fatac) basées dans le nord-est de la France. Parallèlement, l’Armée de l’air dirigeait l’exercice Datex de défense aérienne, du 14 au 18 juin, avec les moyens du Commandement aérien des forces de défense aérienne (Cafda) renforcés d’appareils des Fatac, de bâtiments piquets-radar et d’aéronefs de la Marine et de plusieurs régiments des Forces terrestres anti-aériennes (FTA).
En plus de l’entraînement des unités engagées, but de toute manœuvre, Manat 71 a permis l’étude et la mise au point de la difficile coordination de l’emploi des moyens au niveau interarmées, coordination de plus en plus imposée par les possibilités d’évolution rapide d’un état de crise à une situation de conflit.
En présence du président de la République, le 19 juin à Toulon, un imposant défilé terrestre et aérien et une revue navale ont clôturé les manœuvres nationales 1971.
Le voyage d’information du Centre des hautes études militaires (CHEM) en Pologne et en Roumanie
Les auditeurs de la 20e session du CHEM viennent d’effectuer, sous la direction de l’amiral Frédéric-Moreau, un voyage d’information de deux semaines en Pologne et en Roumanie.
Un programme très complet et très varié avait été établi par les autorités nationales. En Pologne, les officiers ont visité notamment l’Académie générale militaire, la 6e Division aéroportée de Poméranie, l’École supérieure des officiers des troupes mécanisées, ainsi que le grand complexe sidérurgique de Nowa-Huta, l’université de Cracovie et divers hauts lieux de l’histoire polonaise. Un pèlerinage eut lieu au camp d’Oswiecim (Auschwitz en allemand) tandis qu’à Gdansk, le directeur du CHEM eut le privilège d’être reçu à l’évêché.
Les officiers français ont parcouru une bonne partie de la Roumanie par voie routière, de Bucarest à Brasov, où il leur fut donné de visiter une importante usine de fabrication automobile ; dans le delta du Danube, ils purent voir l’aménagement industriel et agricole qui est en cours de développement ; le séjour s’acheva par une très intéressante séance de travail placée sous la direction effective du ministre des Forces armées.
En Roumanie comme en Pologne, de nombreuses et fructueuses rencontres curent lieu avec de hautes personnalités civiles et militaires.
L’amiral eut notamment des occasions de s’entretenir avec le général Ionitza, ministre des Forces armées roumaines, et le général Chocha, vice-ministre de la Défense et Chef d’état-major général des Forces armées polonaises.
La chaleur de l’accueil reçu, tant sur le plan officiel qu’au cours des visites faites dans les formations militaires, les usines et les agglomérations a prouvé la vigueur des sentiments d’amitié que la France suscite encore dans la patrie de Kosciuszko [NDLR 2021 : officier polonais ayant participé à la guerre d’Indépendance américaine avec les Continentaux et ayant tenté des soulèvements en Pologne contre la domination prusso-russe] comme chez les héritiers des Daces.
La politique immobilière des armées
Détenteur d’un patrimoine foncier considérable, le ministère d’État chargé de la Défense nationale se doit d’en assurer la gestion d’abord, bien entendu, en fonction des impératifs de la défense, mais aussi, autant que faire se peut, avec le souci des intérêts de la collectivité nationale. C’est à ce titre qu’il participe activement aux travaux du Comité interministériel d’aménagement du territoire auquel il vient de soumettre les premiers résultats de ses études et de faire connaître les grandes lignes de sa politique immobilière.
On se souvient que la Commission d’étude des structures (1) a préconisé, dans un souci de rentabilité, une politique de regroupement des implantations militaires. Ce problème, qui doit d’abord être étudié en fonction des nécessités militaires, se pose ensuite différemment sur le plan de l’aménagement du territoire, selon qu’il se présente en zone fortement urbanisée ou non.
En ce qui concerne la région parisienne, il est évident que certaines implantations, dictées par des nécessités opérationnelles, ne sauraient être aliénées.
Pour les installations non opérationnelles, le projet de regroupement hors de Paris, de l’Administration centrale en un point unique, genre Pentagone, a été abandonné. Cependant, conscient des problèmes d’urbanisme qui se posent, le ministère d’État chargé de la Défense nationale a établi un schéma directeur, révisable en 1980, sur lequel sont notamment couchées les implantations militaires qui pourraient faire l’objet soit de cessions définitives soit d’échanges compensés. Par ailleurs, depuis deux ans, une politique active de décentralisation des services et des établissements a déjà permis de libérer un certain nombre d’immeubles de leur emprise militaire au profit de la région parisienne. Il est certain que les incidences financières de ces transferts et échanges sont de nature à en limiter le rythme.
Pour l’ensemble du territoire, le ministère prépare un schéma directeur analogue qui intéressera en premier lieu le domaine militaire situé sur le littoral. Tout en respectant les impératifs de la Défense, un certain nombre d’implantations pourront être provisoirement aliénées pour des usages non militaires. Le principe retenu est celui de la location car il permet d’insérer dans un contrat des clauses destinées à contrôler la destination donnée aux installations et à s’assurer que l’usage qui en est fait est conforme à la politique du gouvernement. Dans le cas où des cessions pourraient être consenties, elles seraient assorties de conditions très précises sur l’utilisation future du domaine ainsi démilitarisé.
Au sein de la politique générale d’équipement et d’aménagement du territoire, les Armées ont conscience du rôle qu’elles peuvent jouer dans le développement touristique, social et économique des régions, la protection de la nature dans les emprises sous son contrôle, la restauration des monuments historiques qu’elles occupent. Tâche difficile, onéreuse mais nécessaire, cette politique immobilière est menée par les Armées avec le souci du bien public, de la préservation du patrimoine et de l’intérêt de la collectivité nationale qu’elles ont la charge de défendre.
Départ du général Fourquet, Chef d’état-major des armées
Le 4 juin 1971, au cours d’une prise d’armes dans la cour de l’Hôtel des Invalides, le ministre d’État chargé de la Défense nationale a apporté le témoignage de la gratitude de l’État au général d’armée aérienne Michel Fourquet quittant les fonctions de Chef d’état-major des armées (Céma). Polytechnicien, aviateur comptant plus de 4 500 heures de vol, brillant pilote de la France libre, le général Fourquet, après avoir servi dans différents états-majors nationaux et interalliés a occupé des postes de confiance auprès du ministre puis auprès de la Commission de la défense à l’Assemblée nationale. Il a exercé les plus grands commandements de l’Armée de l’air en Algérie avant d’y devenir commandant supérieur. En qualité de général d’armée aérienne, le général Fourquet a assumé successivement les importantes fonctions de Secrétaire général de la Défense nationale (de sa création en 1962 jusqu’à 1966), de Délégué ministériel pour l’Armement (DMA) et, depuis 1968, de Céma. Grand-Croix de la Légion d’honneur, compagnon de la Libération, titulaire de sept citations, le général Fourquet a été désigné par M. Michel Debré comme « l’un des artisans les plus actifs et les plus perspicaces de la modernisation de nos forces armées ».
C’est le général d’armée aérienne François Maurin, précédemment major général de l’Armée de l’air, qui devient Céma. Né en 1918, entré au service en 1938, il a commandé notamment la 3e Région aérienne à Bordeaux et la Défense aérienne à Taverny. Le général Maurin est commandeur de la Légion d’honneur et titulaire de cinq citations.