Aéronautique - Le XXIXe Salon du Bourget : inauguration et panorama - Premiers vols du Mirage G8 - La Suisse à l'heure du choix
Le XXIXe Salon du Bourget : inauguration et panorama
Au moment où paraîtront ces lignes, le Salon du Bourget aura fermé ses portes et aura sans doute connu le succès que laisse présager l’énorme participation de l’industrie aérospatiale nationale et internationale qui rassemble les exposants de seize nations.
Placée sous le signe du transport aérien et de l’aviation générale, cette exposition réunit côte à côte un nombre imposant de gros appareils autour des deux vedettes supersoniques et, le long des chalets, une multitude de petits appareils multicolores fort difficiles à différencier. Le clou du Salon n’en demeure pas moins le Concorde et le Tupolev Tu-144 dont la finesse et la sveltesse sont encore rehaussées par la présence toute proche du mastodonte américain Lockheed C-5A Galaxy à la soute monstrueusement béante sous le nez relevé de l’appareil.
Ce gigantisme prend une allure de fantastique en raison de la présence de l’énorme hélicoptère soviétique Mil Mi-12 dont les deux rotors surplombent d’une part le Tu-144, d’autre part le nez du Galaxy. Ce spectacle est certainement le plus déroutant de tout le Salon car il renverse toutes les notions de dimensions couramment établies. Le président de la République, Georges Pompidou, lors de sa visite inaugurale le 27 mai, s’y est montré particulièrement intéressé. La présentation en vol a été, ce jour-là, limitée au matériel français, dont les prestations ont amplement démontré la qualité et le dynamisme de l’aéronautique nationale.
Dernière née de la famille des Sud-Aviation SE 210 Caravelle, la Caravelle 12 pouvant emmener de 130 à 140 passagers, a été suivie par le Dassault Falcon 10, version réduite du Mystère-Falcon 20, dont le premier vol remonte au 1er décembre 1970 et qui peut transporter 4 passagers sur 4 000 km à une vitesse supérieure à celle de son aîné.
Les derniers avions de combat de la firme Dassault se sont livrés à une exhibition spectaculaire mettant en valeur leurs qualités spécifiques : vitesse ascensionnelle et court rayon de virage du Mirage F1, gamme des vitesses du Mirage G8 à géométrie variable, maniabilité du Sepecat (société appartenant à Dassault et à British Aircraft Corporation) Jaguar. Les hélicoptères SA330 Puma et SA341 Gazelle, lequel vient de battre plusieurs records de vitesse mondiaux de sa catégorie, ont fait la preuve de l’excellente qualité de ce type de matériel qui vaut à la Société Aérospatiale sa réputation mondiale. Bien évidemment, la présentation aérienne a été ouverte par le Concorde qui, après un voyage à Dakar, venait affronter la comparaison avec son rival soviétique.
D’une allure générale extrêmement proche, le Concorde et le Tu-144 ne peuvent encore donner lieu à aucune confrontation précise en l’absence de critères concrets d’appréciation. Sur le Tu-144, les réacteurs logés plus près du fuselage, paraissent d’une taille supérieure à ceux du Concorde. Autant qu’on puisse en juger – la protection du secret, même en matière commerciale, n’étant pas un vain mot en URSS – la finition et l’état général (celui des pneus en particulier) paraissent d’un niveau inférieur à celui rencontré dans les réalisations de pointe du monde occidental.
Tant dans le thème choisi pour cette réunion qu’en matière d’appareils militaires, la France propose une série de réalisations qui en font une des vedettes du Salon, sinon la principale avec les brillantes réussites techniques que sont le Concorde, le G8 et le Falcon 10.
Le Transport lourd
Principalement consacré à l’aviation de transport, le Salon a donc réuni les deux seuls supersoniques existant : le Tu-144 et le Concorde. L’absent de marque est le SST (Supersonic Transport) américain dont le projet proposé par Boeing a été repoussé par le Sénat.
Il est difficile d’admettre que les États-Unis puissent renoncer brutalement à leur suprématie en matière de transport aérien. Les plus grandes compagnies sont américaines et la flotte mondiale long-courrier est essentiellement composée de Boeing 707 ou 747 et de Douglas DC-8. La poursuite du projet SST avec des capitaux privés est actuellement à l’étude car les grands constructeurs américains ne peuvent délibérément se retirer d’une compétition dans laquelle entre en jeu le prestige national.
La percée du Tu-144 sur le plan commercial, en dehors de la zone d’influence soviétique, demeurera difficile car le doute continuera à planer sur la sécurité du ravitaillement technique en cas de tension internationale entre les deux blocs. La défiance vis-à-vis de l’étranger n’est pas non plus un élément favorable à une commercialisation dans le monde occidental qui paraît pourtant être un objectif de l’URSS. À cet égard, par exemple, la documentation largement distribuée dans le pavillon de l’URSS, très prolixe sur les réussites et bienfaits du régime socialiste, demeure quasi muette sur les caractéristiques et performances des matériels présentés.
En matière de transport lourd, le C-5A Galaxy l’emporte de loin sur ses rivaux. Sa taille gigantesque avec sa soute de navire fait paraître dérisoire le Lockheed C-130 Hercules, quadri-turbopropulseur voisin, qui a pourtant connu son heure de gloire.
Un concurrent inattendu, l’Ilyushin Il-76, qui n’est pas sans rappeler le Lockheed C-141 Starlifter, a fait son apparition dans le parc soviétique. Bien adapté au transport de fret, il dispose d’un nez vitré qui favoriserait son emploi à des fins plus directement militaires. Quadriréacteur de 150 t, il aurait un rayon d’action de 5 000 à 6 000 km. Dans la gamme des long-courriers, l’URSS présente également l’Il-62 (4 réacteurs - 200 passagers) et un triréacteur, le Tu-154.
Également utilisable sur les étapes moyennes, le Tu-154 n’a pas encore pu être comparé aux nouveaux venus de la production américaine en matière de triréacteurs à forte capacité : le Douglas DC-10 et le Lockheed 1011 Tristar dont les déboires avec le Rolls Royce RB211 défraient la chronique aéronautique depuis quelque six mois.
DC-10 et Tristar devraient être présents lors de l’exhibition finale des 5 et 6 juin, ainsi que le tout récent Mercure dont le premier vol remonte au 28 mai 1971. Cette dernière réalisation des Avions Marcel Dassault correspond à un programme tout spécialement étudié pour satisfaire aux transports sur étapes courtes d’environ 500 km qui, d’après les statistiques, correspondent à la majorité des déplacements aériens que ce soit en Europe ou dans le trafic intérieur des États-Unis. Propulsé par deux réacteurs Pratt & Whitney JT8D-15 de 7 t de poussée unitaire, le Mercure pourrait transporter jusqu’à 150 passagers sur étapes allant de 500 à 1 500 km. La principale caractéristique recherchée a été l’économie d’exploitation afin de conquérir un marché potentiel de 1 500 appareils en l’absence d’un autre appareil réellement adapté aux étapes courtes. Autre représentant français, l’Airbus A300B qui accueille les visiteurs dans sa maquette de fuselage en vraie grandeur. Fruit d’une coopération internationale, principalement avec l’Allemagne, l’A300B sera un biréacteur à haute densité (250 à 300 passagers) sur étapes moyennes ou courtes dont le premier vol est prévu en septembre 1972.
Rejoignant les biréacteurs classiques, la nouvelle Caravelle 12 (120 à 140 passagers) pourra, une fois certifiée à 58 t, assurer des traversées de l’Atlantique Nord, ce qui paraît être un des objectifs de Sterling Airways qui vient d’en acheter 4 exemplaires. Dans la même gamme, l’URSS expose le Tu-134, déjà présenté au Bourget en 1969.
Le transport d’appoint
En dehors des appareils depuis longtemps en exploitation comme le Avro (racheté par Hawker-Siddeley en 1963) HS.748 ou le Fokker F27 Friendship, les principales nouveautés sont le biréacteur Fokker F28 Fellowship présenté à Farnborough l’an dernier, deux appareils soviétiques : l’Antonov An-26 biturbine et surtout le triréacteur Yakovlev Yak-40 dont plusieurs exemplaires ont déjà été vendus en Allemagne fédérale.
AMD présente sa version transport du Falcon 20, le 20T qui peut emporter 26 passagers sur 1 000 km à 820 km/h.
Le transport léger et STOL (ou Adac : Avion à décollage et atterrissage courts)
Plusieurs appareils bien connus sont exposés : le Skyservant allemand (Dornier), le De Havilland canadien Twin Otter, l’Islander britannique (Britten-Norman) ainsi que sa version trimoteur, le Trislander, qui a fait son apparition à Farnborough l’an dernier, le Short SC.7 Skyvan britannique et le Let L-410 Turbolet tchécoslovaque.
L’Italie, elle, présente le Fiat G.222, cargo STOL de 44 places assez voisin du Breguet 941, qui continue à figurer dignement sur le parking, mais sans qu’une production en série ait été lancée.
Deux nouveaux venus figurent à ce niveau : Israël avec l’Arava, petit cargo trapu ayant une vague ressemblance avec le N.2501 et pouvant emporter 2 t ou 20 passagers relativement serrés si l’on en juge par la taille des sièges, l’Espagne avec le C-212 Aviocar biturbine STOL, se situant entre l’Arava et le Fiat G.222.
L’aviation d’affaires
Le développement de l’aviation d’affaires est caractérisé par une extension des performances et une généralisation de la capacité tout temps. Il est impossible de citer tous les nombreux modèles présentés par les différents exposants. Dans la catégorie des réacteurs, figurent en excellente place le Falcon 20 et le Falcon 10, dernier venu et appelé sans doute au même brillant avenir.
En Allemagne, on trouve le HFB (Hamburger Flugzeugbau) Hansa, en Grande-Bretagne le Hawker Siddeley HS.125 et sa version école Dominie, aux États-Unis le quadriréacteur léger Lockheed C-140 Jetstar également utilisé dans l’US Air Force, le Gates Learjet-23 un nouveau Cessna, le Citation, au Japon le Mitsubishi MU-2.
Israël est également présent avec le IAI Commodore Jet, construit à partir de plans américains.
En plus de la production Dassault, la France expose une maquette d’un nouveau biréacteur réalisé par la Société Aérospatiale : le Corvette, dont le premier prototype s’est écrasé au sol il y a quelques mois et qui doit reprendre prochainement ses essais.
Turboméca a monté sur un Aero Commander son nouveau réacteur à double flux Astafan II de 710 kg de poussée à consommation spécifique particulièrement faible.
Les turbopropulseurs sont également en pleine expansion car ils permettent d’obtenir, en matière de plafond et de vitesse, des performances supérieures à celles fournies par les moteurs à piston.
Beechcraft avec le King Air, Swearingen avec les Merlin III et Merlin IV présentent les nouveautés de ce mode de propulsion.
L’aviation de tourisme
Les modèles de tous genres, monomoteurs ou bimoteurs se multiplient. Utilisés pour le tourisme ou pour l’école en aéroclub, certains d’entre eux peuvent convenir à un emploi militaire pour la liaison, l’observation ou même l’appui feu dans le cadre de la lutte antiguérilla. C’est le cas de certains Cessna, Piper, Marchetti italiens, SAAB MFI15 suédois.
La réalisation la plus originale en la matière est le Cessna Super Skymaster fabriqué par Reims-Aviation sous la dénomination FTMA Milirole. Équipé de 2 moteurs push-pull (les moteurs sont sur le même axe, l’un en avant, l’autre en arrière de la cabine), le Milirole dont le premier vol remonte à mai 1970 est propulsé par 2 Continental de 210 CV avec turbo compresseurs et bénéficie d’une voilure Adac. En version militaire, il peut emporter des roquettes et des mitrailleuses pour lesquelles existent 2 points d’attache sous chaque plan. Objet d’évaluations militaires, il peut constituer un moyen d’appui aérien valable dans le cadre d’opérations, restreintes.
Dans ce genre d’actions, un monomoteur suédois le SAAB MFI-17 Supporter s’est fait particulièrement remarquer lors du conflit Nigeria-Biafra.
Les hélicoptères
Quelles que soient la qualité ou les performances des matériels exposés, le clou du Salon pour les hélicoptères est sans conteste le Mi-12 soviétique avec, à l’extrémité de ses embryons d’ailes, des rotors de 35 m de diamètre propulsés chacun par 2 turbines de 6 500 CV.
Long de 60 m, haut de 12 m, d’une envergure de 73 m avec les voilures en rotation, le Mil est le plus gros hélicoptère du monde capable de porter à une altitude supérieure à 2 000 m une charge de 40 t. Le Mi-12 se présente comme le complément de l’An-22 (quadri-turbopropulseur géant capable de transporter simultanément 300 passagers et 30 t de fret) pour le support logistique dans la zone des combats.
L’URSS expose également un hélicoptère moyen, le Mi-8 Hip, et un Kamov Ka-26 à rotors coaxiaux.
La Grande-Bretagne et les États-Unis sont présents avec plusieurs modèles déjà connus, à l’exception du WG.13 Lynx, fruit d’une coopération Westland-Aérospatiale. Le Lynx est un biturbine à rotor semi-rigide de 12 places pouvant être utilisé pour des missions de la Marine.
L’Allemagne fédérale figure avec un petit hélicoptère à rotor rigide propulsé par deux moteurs le Bolkow Bo 105 qui intéresse les États-Unis à la suite d’un accord passé avec Boeing.
L’Italie est le principal exposant d’hélicoptères avec toute sa série d’Agusta-Bell mono- ou bimoteurs.
La France figure aussi en excellente place avec la production de l’Aérospatiale qui couvre toute la gamme de poids depuis l’hélicoptère lourd SA321 Super-Frelon jusqu’au SA315 Lama à 5 places.
Parmi les modèles présentés, il faut citer l’hélicoptère moyen SA330 Puma biturbine commandé en série par l’Armée de terre, le SA341 Gazelle qui vient de s’adjuger plusieurs records mondiaux de sa catégorie et le SA315 conçu à partir des éléments de l’Alouette II et de l’Alouette III particulièrement apte aux missions en haute montagne (atterrissage possible avec 2 personnes à 7 500 m d’altitude).
La reconnaissance maritime
Face au quadriturbine Lockheed P-3C Orion américain et au Breguet Atlantic français, la Grande-Bretagne propose le Hawker Siddeley Nimrod, quadriréacteur dérivé du Comet 4, caractérisé par sa rapidité d’intervention mais disposant d’une autonomie de recherche plus faible.
L’aviation de combat
La présentation est essentiellement française, les participants étrangers n’exposant que quelques modèles particuliers, à l’exception des États de moyenne importance qui ont tenu à mettre en valeur leur production nationale.
Les États-Unis exposent le Lockheed A-7D Corsair II qui jouit actuellement d’un certain succès à l’étranger.
La Grande-Bretagne continue de soulever l’intérêt avec son chasseur à décollage vertical Hawker Siddeley Harrier dont les démonstrations sont particulièrement spectaculaires. Le Blackburn Buccaneer, biplace embarqué, et surtout l’impressionnant et bruyant English Electric Lightning demeurent les chefs de file britanniques.
La Suède expose sa panoplie : le SAAB 35 Drakken, monoplace Mach 2 bien connu, le SAAB 37 Viggen, nouvel appareil de pointe suédois avec une aile canard et le SAAB 105 biplace d’école et d’appui-feu.
La Yougoslavie présente ses deux réacteurs légers qui figuraient à Farnborough l’an dernier : le SOKO Galeb 3 pour l’entraînement au combat et le Jastreb 2, monoplace d’appui-feu.
Dans cette même catégorie, l’Italie avec le G.91Y, biréacteur dérivé du Fiat G.91 et l’Espagne avec le biréacteur biplace d’intervention Hispano HA-220 Super Saeta démontrent les efforts accomplis par ces États pour développer leur industrie aéronautique.
Face à ces matériels, la France propose une maquette de l’Alphajet, futur avion d’école et d’appui qui devrait déboucher vers 1975 sur un programme franco-allemand réunissant Dornier et Breguet-Dassault.
La gamme complète des avions de combat Dassault : Mirage IIIE, Mirage IIIR de reconnaissance, Mirage V, Mirage Milan à « moustaches » – révélation du Salon 1969 –, ainsi que les nouveaux venus Mirage F1 et G8, est renforcée par le Jaguar franco-britannique.
Le Jaguar propulsé par 2 Turbomeca Adour poursuit activement ses essais et devrait équiper l’Armée de l’air française en 1974.
Le F1, monoréacteur d’interception capable de Mach 2,2, propulsé par un réacteur Atar 9K50, est capable de recevoir un M53 à double flux en cours de développement par la Snecma. Le G8, biréacteur à géométrie variable, vient de faire des débuts prometteurs. Bien adapté à la pénétration à basse altitude, un avion de cette formule pourrait recevoir ultérieurement 2 M53 qui amélioreront encore les performances que lui confère son aérodynamique très avancée.
Premiers vols du Mirage G8
Mettant à profit l’expérience acquise dans la construction du premier Mirage G, les avions Marcel Dassault viennent de sortir un nouvel appareil, le Mirage G8 qui correspond à un besoin militaire d’appareil à pénétration lointaine et, éventuellement, de supériorité aérienne. Au cours de ces dernières années, l’éventualité de doter l’Armée de l’air française d’un avion de pénétration lointaine a donné naissance à plusieurs études dont l’une s’est concrétisée par la définition du G4, appareil à très long rayon d’action qui a dû être abandonné pour des raisons financières. Le Mirage G8 est un programme comparable avec des performances un peu plus modestes. La géométrie variable est la seule solution permettant de répondre à la fois aux spécifications de vitesse et de rayon d’action dans des limites de poids, donc de prix, raisonnables.
Le premier vol du Mirage G8 s’est déroulé de façon satisfaisante à Istres le 8 mai 1971. Dans la configuration « ailes déployées », c’est-à-dire avec la flèche minimale (environ 20°), Jean-Marie Saget, pilote d’essais des AMD, a atteint Mach 0,73 soit environ 800 km/h. L’atterrissage a été effectué à 215 km/h, vitesse particulièrement basse pour un appareil de combat de ce type. Dès le second vol, le 11 mai, Mach 1,2 a été dépassé avec une flèche de 55°. Mach 2 a été, depuis, plusieurs fois atteint. Avec la flèche maximale de 70°, et grâce à ses deux réacteurs Atar 9K50, le G8 doit pouvoir atteindre Mach 2,5 soit plus de 2 500 km/h.
L’équipement très complet du G8, actuellement situé dans l’optique de la polyvalence, comporte un radar multifonction Cyrano IV de plus de 40 km de portée et un système de navigation à basse altitude et d’attaque dérivé de celui du Mirage Milan (Mirage avec « moustaches » présenté au Salon 1969) se composant d’un télémètre laser, un doppler et un calculateur de bombardement.
La Suisse à l’heure du choix
Après plusieurs mois d’évaluations et d’hésitations, la Suisse est sur le point de prendre une décision quant au choix de l’appareil destiné à remplacer le de Havilland Venom dans ses unités de combat. Le gouvernement fédéral doit se prononcer en juillet de façon à faire ratifier sa décision par le Parlement avant septembre 1972. Le gouvernement est auparavant revenu sur ses intentions d’un achat direct à l’étranger et a relancé le débat afin d’évaluer la part de travaux que pourrait assurer l’industrie nationale et les répercussions qu’il en résulterait sur les prix de revient. Dans tous les cas, le maître d’œuvre devra assumer l’entière responsabilité du programme. Ce revirement gouvernemental s’est fait jour alors que, pour la seconde fois, le ministre de la Défense présentait le LTV A-7 Corsair II comme le vainqueur incontestable de la compétition engagée entre six appareils. Au cours de cette dernière réunion, le Douglas A-4 Skyhawk figurait en seconde place devant le Milan et le Fiat G.91Y. En fait, depuis juillet 1970, le Corsair II a toujours figuré en tête des préférences mais le gouvernement a voulu conserver une alternative avant de présenter le projet au Parlement. Ce serait donc le McDonnell Douglas A-4 dans la version M, vendue à Israël qui serait opposé au A-7 Corsair II.
Il s’agit de remplacer les 200 Venom d’origine britannique largement périmés. Les crédits disponibles étant fixés, le nombre d’appareils pouvant être achetés varie avec le type retenu soit : 61 Corsair II, 85 Skyhawk, 70 Milan, 90 Fiat G.91Y, 130 SAAB 105X5 ou 80 Hawker Hunter.
Une fabrication en Suisse sous licence entraînerait un relèvement de 30 % des coûts, ce qui impliquerait soit un financement supplémentaire soit une réduction de la flotte dans les mêmes proportions. Si l’industrie aéronautique nationale est laissée en dehors du programme du nouvel avion de combat, son avenir paraît fortement compromis. Les propositions de la firme suédoise SAAB paraissent être sur le plan économique les plus intéressantes. Cependant, les négociations se poursuivent avec McDonnell Douglas, la pierre d’achoppement étant le niveau de rechanges exigé par la Suisse, qui veut détenir un stock lui donnant une autonomie de 10 ans.
Au cours de leurs évaluations, les experts suisses se sont particulièrement appesantis sur les questions financières : coût de l’avion nu, coût proportionnel des rechanges, coût du matériel de servitude, de l’entraînement incluant les simulateurs et les munitions. Paradoxalement, la charge emportée figurait en dernière position dans la liste des critères d’appréciation.
Les six industriels ayant participé à la compétition ne renonceront pas à conquérir le marché tant qu’une décision ferme n’aura pas été prise car certains d’entre eux ont consenti d’importants investissements à cette occasion.
C’est en particulier le cas de SAAB qui a profondément modifié et amélioré son appareil pour le rendre plus attrayant pour la Suisse et qui fait valoir l’avantage, dans un concept défensif, de disposer de la force de riposte la plus nombreuse possible. ♦