Défense en France - L'évolution de la Gendarmerie nationale - Réforme de la formation professionnelle et de la promotion sociale aux Armées - La Délégation ministérielle pour l'Armement à Sao Paulo
L’évolution de la Gendarmerie nationale
Le 30 septembre 1971 à Caylus (Tarn-et-Garonne), M. Fanton, secrétaire d’État, assistait au saut en groupe de l’Escadron de gendarmes parachutistes. Cette unité, nouvellement créée à Mont-de-Marsan, est l’exemple le plus récent du dynamisme de la Gendarmerie dans son adaptation à ses missions, toujours plus nombreuses et toujours plus diversifiées. Diversifiées du fait de l’extension de la civilisation des loisirs, et plus nombreuses en raison de l’augmentation de la population, du développement de l’habitat urbain et de la circulation routière.
À elle seule, la surveillance de la circulation routière exige la mobilisation quasi permanente de 6 000 gendarmes dotés de véhicules et d’équipements (radios, cinémomètres radars) de plus en plus perfectionnés.
Renforcement des effectifs
C’est pour faire face à cette augmentation des charges que la 3e loi de programme 1971-1975 a autorisé la Gendarmerie à renforcer ses effectifs de quelque 8 000 hommes. Cette augmentation sera réalisée par le recrutement annuel de 1 000 élèves gendarmes supplémentaires pendant chacune des cinq années du Plan, le complément de 3 000 gendarmes-auxiliaires étant fourni par le contingent.
Les gendarmes du contingent
Prévu par la loi du 9 juillet 1970, le Service national dans la Gendarmerie a commencé en 1971 sous forme expérimentale. Sur un total de 2 600 volontaires, 260 candidats ont été retenus qui, après avoir reçu la formation militaire de base pendant deux mois dans des unités de l’Armée de terre, ont rallié le 1er avril le Centre d’instruction de la Gendarmerie d’Auxerre. Pendant quatre mois, les candidats sont formés aux missions traditionnelles de police et de surveillance tandis que ceux possédant déjà certaines compétences (ski - montagne - plongée) reçoivent un entraînement particulier et intensif destiné à les orienter vers les missions de secours. Deux nouvelles compagnies de recrues sont arrivées au Centre d’Auxerre en juin.
La première « promotion » de gendarmes-auxiliaires a été ventilée le 1er août, soit en renfort des brigades départementales, soit à des tâches de surveillance et de secours, principalement en région Aquitaine et en montagne.
En montagne
C’est d’ailleurs dans les Hautes-Alpes, à Embrun, que vient d’être mis en place le premier Peloton de gendarmerie de montagne (PGM) composé de 21 gendarmes-auxiliaires du contingent, encadrés par 8 gradés du Peloton de haute montagne (PGHM). Il est prévu, au fur et à mesure de la réalisation des effectifs de gendarmes-auxiliaires, l’implantation de 10 PGM semblables venant renforcer l’action des unités déjà existantes :
– le Groupe de gendarmerie de haute montagne (GGHM effectif 15) de Grenoble,
– les deux PGHM (PGHM effectif 60 chacun) de Chamonix et Briançon ;
– le peloton Parachutiste de gendarmerie de montagne (PPGM effectif 34) d’Argelès-Gazost dans les Pyrénées.
Parmi les 200 chiens dont dispose la Gendarmerie un certain nombre de « chiens d’avalanche » sont affectés à la gendarmerie de montagne.
Parachutistes
En plus du peloton parachutiste dont les effectifs ne permettent que des interventions limitées et spécialisées dans le sauvetage en montagne, la Gendarmerie vient donc de créer à Mont-de-Marsan un escadron parachutiste de 135 hommes dont 5 officiers. Composé de gendarmes mobiles déjà brevetés dans l’Armée de terre, car la Gendarmerie ne peut prendre à sa charge la formation parachutiste, cet escadron conserve les missions propres à la Gendarmerie mobile, mais son « aéromobilité » accroît notablement ses possibilités, en particulier dans le cadre de la Défense opérationnelle du territoire (DOT), et lui ouvre deux missions nouvelles :
– l’une militaire : la mission de prévôté au sein de la Force d’intervention, les responsables de la Police judiciaire et de la Justice militaire étant susceptibles d’être sur place en même temps que les combattants parachutés ;
– l’autre à caractère civil ou militaire : intervention rapide d’un effectif important dans une région d’accès difficile, soit pour des premiers secours aux populations à l’aide de matériel parachuté lui aussi, soit pour recherches, secours et surveillance, comme le tragique exemple de l’avion Nord 262 accidenté en janvier 1971 dans l’Ardèche en a montré la nécessité [NDLR 2021 : le 21 janvier, la totalité des 21 passagers, militaires et chercheurs atomiques français, sont tués].
À cheval
Un autre exemple de ce souci d’ubiquité de la Gendarmerie, surtout en terrain peu accessible aux véhicules, est la création récente de brigades à cheval chargées de la surveillance des forêts. On sait trop bien que l’ombre propice des forêts encourage les tentatives des sadiques et des pyromanes. Désormais, les malfaiteurs verront s’accroître le risque d’être surpris en flagrant délit. En plus de la brigade permanente de 15 hommes, basée à Saint-Germain-en-Laye, des brigades de cinq gendarmes à cheval sont temporairement chargées de la surveillance des forêts de Fontainebleau, Senlis, Compiègne, Chambord et de la région d’Arcachon. Cette mission s’inscrit directement dans le cadre des mesures de protection de la nature.
En mer
Depuis janvier 1970, le rattachement de la Gendarmerie maritime a apporté le renfort de 23 officiers et 834 gendarmes, dont 65 plongeurs, et de plus de 50 vedettes ou embarcations.
La surveillance ou le sauvetage le long des côtes ou sur les rivières ou plans d’eau disposeront à la fin de l’année de plus de 130 vedettes et de 140 embarcations diverses appartenant soit à la Gendarmerie, soit à la Marine marchande, à la Société nationale de secours en mer (SNSM) ou aux collectivités locales.
Pour sa part, l’intervention sous-marine est assurée par près de 300 plongeurs.
Dans les airs
Enfin, l’efficacité de la surveillance et de l’intervention de la Gendarmerie a été accrue grâce à la mise sur pied d’un parc d’hélicoptères qui atteint 44 appareils, mis en œuvre par près de 200 gendarmes pilotes, mécaniciens ou radios. De ce fait, le général commandant la Gendarmerie dans chacune des sept régions militaires de métropole dispose d’une section de trois appareils.
Réforme de la formation professionnelle et de la promotion sociale aux Armées
Création d’organes directeurs
Par décision du 30 juillet 1971, le ministre d’État chargé de la Défense nationale, Michel Debré, a créé une commission de la formation professionnelle et de la promotion sociale qui dispose d’un comité permanent et d’une mission.
Placée sous la présidence du Secrétaire d’État, la commission comprend :
– le Secrétaire général pour l’Administration (SGA),
– le Chef d’état-major des Armées (Céma),
– les Chefs d’état-major de l’Armée de terre (Cémat), de la Marine (CEMM) et de l’Armée de l’air (CÉMAA),
– le Délégué ministériel pour l’armement (DMA),
– le Chef du Contrôle général des armées.
Le président et les membres de la commission peuvent s’y faire représenter.
Cette commission élabore et propose au ministre une politique de la formation professionnelle et de la promotion sociale ainsi que les moyens de sa mise en œuvre, coordonne l’ensemble des actions menées et contrôle les résultats.
Le comité permanent, présidé par le SGA, comprend les représentants des autorités siégeant à la commission. Il a pour rôle de préparer les réunions de celle-ci et de suivre l’application des orientations données et des décisions prises.
Enfin, la mission de la formation professionnelle et de la promotion sociale est dirigée par un administrateur civil hors classe, sous l’autorité du SGA. Elle a pour attribution de préparer les travaux de la commission et du comité, dont elle assure le secrétariat, et d’effectuer les liaisons nécessaires, d’une part avec les organes d’exécution pour promouvoir l’application des décisions prises, d’autre part avec les autres ministères. Le chef de la mission dispose du bureau de la promotion sociale dont les attributions ne sont pas modifiées.
Cette réorganisation traduit le souci du ministre de renforcer encore l’action des Armées dans ces deux domaines de la formation professionnelle et de la promotion sociale, action déjà fort importante ainsi qu’en témoigne le dernier bilan.
Résultats obtenus en 1970
En 1970, près de 50 000 militaires se sont inscrits aux activités de promotion sociale, ce qui représente environ 11 % des sous-officiers et hommes du rang des trois armées. Sur cet effectif, près de la moitié a suivi un enseignement primaire ou pré-professionnel, un quart l’enseignement technique et professionnel, le dernier quart se répartissant entre les enseignements secondaire (17 %) et supérieur (9 %).
Dans l’enseignement supérieur, dispensé pour les trois quarts en faculté et pour un quart par correspondance, les étudiants militaires ont obtenu leur diplôme dans la proportion de 55 %. Les candidats de l’enseignement secondaire, travaillant par correspondance pour plus des deux tiers, ont réussi soit le baccalauréat, soit le BEPC dans la proportion de 38 %.
L’enseignement technique et professionnel, également dispensé aux deux tiers par correspondance, a vu le succès de 59 % des élèves qui se sont présentés soit au Certificat d’aptitude professionnelle (CAP) soit au brevet supérieur ou aux brevets professionnels.
Enfin dans le primaire, y compris la préformation professionnelle, assurée à plus de 90 % par des cours dans les unités, on a enregistré 60 % de réussites au certificat d’études primaires. Cette formation primaire ou pré-professionnelle a permis à 13 000 militaires d’être admis à la Formation professionnelle pour adultes (FPA) au moment où ils quittaient l’Armée. On peut s’attendre, pour 1971, à un bilan sensiblement équivalent, encore que la réduction du service à douze mois ait quelque peu perturbé les actions de promotion sociale.
Objectifs pour 1971 et 1972
Les Armées ont l’intention d’améliorer encore ces résultats en prenant diverses mesures qui seront progressivement appliquées, en faveur aussi bien des engagés que des appelés.
En ce qui concerne les engagés qui ont souscrit un contrat minimum de quatre ans, l’objectif que s’est fixé l’Armée de terre est qu’ils soient titulaires d’un CAP au moment de leur retour à la vie civile. Ce but sera atteint de façon différente en fonction de la nature de la spécialité militaire détenue par l’intéressé.
Pour les jeunes soldats titulaires d’une spécialité directement transposable dans le secteur civil (par exemple : secrétaire, infirmier, mécanicien auto), les armées ont déjà établi des contacts avec les ministères intéressés pour obtenir la reconnaissance de l’équivalence de leurs brevets ou certificats militaires avec les diplômes civils correspondants.
Pour ceux dont la spécialité n’est pas directement transposable mais présente une certaine similitude avec une profession civile, il est prévu de leur donner un complément de formation à plein temps au cours des trois derniers mois de leur contrat. Ce serait le cas, par exemple, d’un pilote de char qui pourrait être converti en conducteur d’engins de travaux publics. Cette formation complémentaire sera donnée au sein d’organismes militaires techniques et sera sanctionnée, soit par un diplôme militaire particulièrement apprécié dans le secteur civil, soit par un diplôme civil, en particulier un CAP. Une expérience commencera au début de l’année 1972 qui portera sur une cinquantaine d’engagés par stage.
Enfin, pour ceux des engagés qui auront acquis une spécialité militaire n’offrant aucune possibilité de transposition dans le secteur civil, ils pourront recevoir une formation professionnelle complète, à plein temps, pendant les six derniers mois de leur contrat. Cette formation leur sera dispensée dans des centres de FPA ; environ mille engagés pourront bénéficier de cette possibilité.
En ce qui concerne les appelés du contingent, un effort particulier d’information sera entrepris tant au moment de la sélection, par l’implantation d’une antenne de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) auprès de chaque centre de sélection, qu’au cours et à la fin du service par appel à des spécialistes de cette agence.
Pour permettre à certains appelés de mettre en valeur d’éventuelles aptitudes non sanctionnées par un diplôme mais décelées lors de la sélection et confirmées au cours du service, il va être procédé à l’expérimentation de « bourses des Armées » dans la 6e Région militaire (Metz). Pour l’année scolaire 1971-1972, 70 bourses seront ainsi attribuées par l’Armée de terre, ce chiffre pouvant être doublé l’année suivante. Les boursiers désireux de s’orienter vers une carrière militaire recevront dans une école militaire l’instruction nécessaire à leur admission en classe préparatoire à l’École militaire interarmes (EMIA). Ils devront donc souscrire, pour la durée prévue des cours, un rengagement évidemment résiliable en cas d’échec en cours de stage. Les boursiers désireux de s’orienter vers une profession civile pourraient recevoir leur bourse à l’issue du service actif pour la durée d’une ou deux années scolaires.
En application de l’article 15 de la loi du 9 juillet 1971, qui prévoit la formation professionnelle de certains appelés au cours du Service militaire, chaque armée va lancer, au cours du premier semestre 1972, une expérimentation portant sur un effectif total de 450 recrues dont 300 environ pour l’Armée de terre. Les volontaires, une fois leur aptitude vérifiée à l’aide de tests particuliers, recevront d’abord une instruction militaire de base leur permettant de remplir un emploi simple de mobilisation. Ils seront ensuite affectés à une unité implantée dans la même garnison que le centre de FPA où le stage est prévu. En dehors des heures consacrées à la formation professionnelle, ils seront encadrés et hébergés à leur unité.
Fidèles à leur mission éducatrice, conscientes des nécessités de l’heure, les Armées ont voulu intensifier leur effort de participation à l’action nationale qui vise à une meilleure insertion sociale du citoyen de demain.
La Délégation ministérielle pour l’armement (DMA) à l’Exposition de Sao Paulo
Du 9 au 20 septembre 1971 s’est tenue au Brésil, à Sao Paulo, une exposition française des techniques avancées, organisée par le Centre national du commerce extérieur du ministère de l’Économie et des Finances. Si la vedette de cette manifestation a été l’avion supersonique Concorde, l’Union syndicale des industries aéronautiques et spatiales a en outre présenté les hélicoptères Puma et Alouette III. Pour sa part, la DMA avait confié à la Direction technique des constructions navales (DTCN) la tenue d’un stand destiné à montrer la compétence de cet organisme dans l’étude et la réalisation des Armements navals d’une part, des matériels et techniques d’emploi de l’informatique d’autre part.
Une section du stand présentait des matériels choisis en fonction des besoins du Brésil. C’est ainsi qu’étaient exposées des maquettes :
– du transport de chalands de débarquement Ouragan, dont les utilisations civiles sont multiples,
– du chasseur de mines Circé, prototype des cinq bâtiments dont est en train de se doter la Marine française,
– du Triton, bâtiment d’intervention et d’expérimentation sous-marine,
– de l’Aviso 70 dont la construction d’une douzaine d’exemplaires est autorisée par la 3e loi de programme. Figuraient de plus, en vraie grandeur, une torpille légère anti sous-marine R3, susceptible d’être lancée par bâtiment de surface ou par avion (1), ainsi que l’électronique de l’autodirecteur de cette torpille.
Une deuxième section du stand, tenue par le Centre de programmation de la Marine (CPM) exposait la compétence de cet organisme en matière de traitement de l’information. Le stand du CPM fournissait une documentation sur les Senit (Système d’exploitation navale des informations tactiques) type 1 et 2 qui équipent déjà nos frégates et nos escorteurs d’escadre en service, sur le Senit 3, exemple de système intégré en cours de recette sur la corvette Aconit et destiné aux frégates F-67, et sur le Senit 5, système réduit pour petits bâtiments et dernière réalisation du Plan calcul militaire. Une console de visualisation Sintra en fonctionnement avec un programme réduit, permettait d’en montrer l’utilisation opérationnelle. Parallèlement, sur son propre stand, la Compagnie internationale pour l’informatique (CII) présentait ses productions militaires, en particulier des modèles du calculateur Iris 35M en service dans nos Armées.
Bénéficiant de la curiosité suscitée par Concorde et d’un léger préjugé sentimental, cette exposition a pu montrer à un très nombreux public la place que tient la France dans le monde dans le domaine des techniques avancées d’application civile ou militaire.
(1) Le Brésil a manifesté de l’intérêt pour l’avion de patrouille maritime Breguet Atlantic.