Aéronautique - Développement des productions aéronautiques Airbus : A300B, Mystère 10, Mystère 20, Mystère 30 et Corvette - États-Unis : le budget d'équipements militaires ; les essais en vol du F-15 - Importance du rayonnement cosmique au cours des vols à haute altitude
Développement des productions aéronautiques Airbus A300B, Mystère 10, 20 et 30, Corvette
Airbus
Airbus Industrie, société formée en coopération pour mener à bien la production de l’Airbus A300B a tout lieu de se féliciter du développement régulier de son moyen-courrier à grande capacité.
Lancé en mai 1969, basé sur une organisation précise, dans un cadre juridique bien défini, ce programme de coopération a été mené avec promptitude et efficacité. Le 28 octobre 1972, le premier appareil décollait de Toulouse complètement équipé de tous ses systèmes en état de fonctionnement (pilote automatique compris). Sept semaines plus tard, le 18 décembre, 22 sorties avaient été enregistrées correspondant à 73 heures de vol.
Le domaine de vol a été exploré à plus de 90 % et a pu être étudié au-delà de Mach 0,84 et de 35 000 pieds. L’étude du système des décrochages dans différentes configurations a été très poussée et a révélé un très bon comportement de l’appareil aux basses vitesses. Il en a été de même lors des décollages et atterrissages au poids maximum.
Grâce à six pilotes français et allemands qui se relaient, les essais se poursuivent à un rythme accéléré. Le second appareil volera en janvier, le n° 3 en juin et le n° 4 fin septembre 1973.
Parallèlement, les essais statiques et de fatigue se poursuivent en France et en Allemagne avec deux cellules complètes, sur un banc d’essais mécanique-hydraulique d’endurance des systèmes et sur simulateur.
En ce qui concerne la production, les avions 5 à 12 sont lancés en fabrication, la seconde tranche de 13 à 20 est lancée en approvisionnements et jusqu’au n° 36 les approvisionnements à long terme sont lancés. Les dispositions sont prises pour adopter la cadence de production aux besoins, avec un rythme de quatre appareils par mois si nécessaire, pouvant être poussé à six par mois.
Dans une conférence de presse qu’il avait donnée le 5 décembre 1972, le président Ziegler, répondant à une question concernant l’annonce de concurrents américains de l’Airbus A300B a déclaré : « J’ai toujours pensé que pour ce type d’appareil nouveau (moyen-courrier biréacteur à grande capacité) nous aurions à coup sûr des concurrents. J’ai par contre été surpris qu’on nous ait laissés prendre trois ans d’avance. Cette nouvelle situation apporte un supplément de crédibilité de la valeur du programme. Sur le plan de la prospection commerciale, elle nous permet de souligner les avantages que nous proposons à une clientèle qui désire avoir des éléments de comparaison ». Enfin, M. Henri Ziegler s’est félicité de la prise de conscience du milieu bancaire français en faveur de l’industrie aéronautique qui s’est manifestée par la création d’organismes de financement. Le Président estime que dans un proche avenir, de semblables organismes multinationaux s’avéreront indispensables.
Mystère 10 - 20 et 30
Tandis qu’on annonce pour le prochain 30e Salon international de l’aéronautique et de l’Espace du Bourget la participation du Mystère 30, qui aura alors effectué son premier vol en avril 1973, les Mystère 20 et 10, rebaptisés Falcon aux États-Unis, connaissent une belle carrière.
Une station de Falcon Jet Corporation a commencé officiellement à fonctionner sur l’aéroport de Teterboro (à 19 km de New York). Cette société, à laquelle participent à parts égales les sociétés Dassault-Breguet et Panam, est présidée par M. B.C. Vallières, Président-directeur général (PDG) de Dassault-Breguet. Elle servira de sous-traitant à Falcon Jet Corporation pour la vente et l’équipement des Falcon Mystère 20. Falcon Jet Corporation a vendu son premier Falcon 20F à un client américain au début de décembre. Cette société a repris à Panam Business Jet la responsabilité des ventes des Falcon 20 et 10, dont le carnet de commandes s’établit ainsi à ce jour : Falcon 20, 180 commandes plus 14 Mystère 20F et 80 options. La plupart de ces avions ont été livrés, deux restent à vendre aux États-Unis – Falcon 10, 40 commandes fermes plus 120 options. Selon Falcon Jet Corporation, les Falcon 20 et 10 pourraient prendre, dans la prochaine décennie, 20 ou 25 % des ventes du marché potentiel de 3 000 jets d’affaires qui sont prévus. Les ventes de ces deux avions français entrent pour 30 et 36 % du marché total actuel des avions d’affaires.
Quant au Mystère 30 notons ici quelques-unes de ses caractéristiques. Ce nouveau biréacteur civil construit par Dassault-Breguet est destiné au réseau aérien du 3e niveau. Il se contente d’une piste de 1 200 mètres. Sa capacité d’emport varie selon la version de 8 à 38 passagers (affaires ou transport sur courtes distances). La vitesse maximale de croisière est de 830 km/heure et son autonomie, avec 29 passagers et les réserves correspondantes, est calculée pour 1 730 km. Avec 8 à 16 passagers, la distance franchissable atteint 4 000 km.
Corvette
Le Corvette a été présenté officiellement le 20 octobre 1972 par l’Aérospatiale à Saint-Nazaire et il a effectué son premier vol prévu le 20 décembre.
Conçu essentiellement dans un souci de simplicité et de rusticité, cet appareil présente un certain nombre de caractéristiques intéressantes qui devraient assurer avec succès son lancement sur le marché.
D’un poids au décollage d’environ 6 tonnes, il peut transporter 12 passagers sur 1 500 à 2 600 km suivant sa configuration. Sur ces distances, il devrait atteindre une vitesse de croisière maxima de 800 km/heure, soit 0,75 Mach, grâce à ses deux réacteurs Pratt & Whitney fournissant chacun 1 050 kg de poussée. L’installation, déjà envisagée, de propulseurs plus performants, devrait d’ailleurs permettre d’augmenter cette vitesse de manière sensible. Prévu pour opérer à partir de pistes de 1 200 m, Corvette s’accommode également de terrains en herbe. Enfin, son prix de vente de base est actuellement fixé à 6 millions de francs et ses frais d’exploitation sont considérés comme très modestes, ce qui constitue un atout non négligeable pour sa commercialisation.
En définitive, avec un rapport nombre de sièges/poids total très favorable et la possibilité d’utiliser une grande variété de terrains pour un budget des plus étudiés, Corvette se présente comme un concurrent des plus sérieux sur un marché mondial pourtant déjà très largement marqué par des appareils similaires.
États-Unis
Le budget d’équipements militaires
Une commission mixte du Sénat et de la Chambre des représentants a adopté un total de 20 900 M de dollars (environ 100 milliards de nos francs) pour les crédits d’équipements militaires relatifs à l’exercice 1973. Cette décision est l’aboutissement d’un compromis entre les 21 300 M$ votés par la Chambre basse et les 20 500 M$ approuvés par le Sénat. Les crédits initialement demandés par le Pentagone s’élevaient à 23 500 M$.
Dans les programmes d’armement stratégique, on relève deux masses importantes, celle de 445 M$ pour la poursuite du développement du bombardier supersonique Rockwell B-1 et celui de 906 M$ pour l’accélération du programme Trident, nouvelle formule du système d’arme sous-marin–missile qui, compte tenu des charges multiples MIRV, pourra emporter 300 charges nucléaires.
299 M$ sont consacrés au quatrième porte-avions à propulsion nucléaire CVN70 [NDLR 2023 : l’USS Carl Vinson], 69 M$ vont à l’achat et à l’aménagement de deux Boeing 747 en poste de commandement aéroporté dont la mise en service interviendra dans trois ou quatre ans. 94 M$ sont destinés au renforcement des silos des Minuteman III et 394 M$ à la reconversion de six sous-marins en configuration Poseidon. Enfin, en raison des limitations intervenues dans le cadre des accords SALT, le réseau antimissiles Safeguard ne reçoit que 561 M$ au lieu des 800 M, votés par la Chambre.
Dans les programmes d’armement classique, on relève 732,7 M$ de crédits pour l’achat du chasseur Grumman F-14 à géométrie variable commandé par la Navy et dont 48 exemplaires pourraient être construits dès cette année, malgré le fort dépassement des coûts initiaux. 133 M$ permettront au Corps des Marines de porter à 114 leur parc de Hawker Siddeley Harrier.
On note aussi 85 M$ pour 24 chasseurs bombardiers LTV A-7D Corsair, 12 M$ pour 7 chasseurs Northrop F-5B et 50 M$ pour 12 Lockheed C-130 destinés à l’USAF.
Parmi les crédits dégagés au profit d’autres programmes, on peut citer encore 958 M$ pour le développement du F-15 Eagle de McDonnell Douglas, dont 421 M$ pour l’achat des 30 premiers appareils de série : 578 M$ pour l’acquisition de 35 S-3A Viking, avions de recherche et de chasse anti-sous-marine à électronique hautement intégrée et 117 M$ pour l’achat de 12 patrouilleurs marine P-3C Orion.
Au total, le budget global de la défense des États-Unis s’élève à 75 000 M$ pour l’année fiscale 1973 qui se termine le 30 juin. Dès le début de cette année, les demandes de crédits militaires pour 1974 seront rendues publiques et l’on s’attend à ce que des sommes importantes soient encore consacrées en priorité, malgré les SALT, aux programmes stratégiques.
Les essais en vol du chasseur américain F-15
Le chasseur de supériorité aérienne F-15, construit par McDonnell Douglas, est actuellement dans la phase active des essais en vol.
Le premier vol du F-15 Eagle remonte au 27 juillet 1972. Depuis cette date, les qualités aérodynamiques ont été testées et tous les systèmes liés à la motorisation ont été essayés. Les vols supersoniques ont débuté une semaine après le premier vol.
Le feu vert pour la production de la cellule devrait être donné au début de l’année 1973. Avant cette date, le constructeur devra avoir terminé les essais statiques d’une cellule complète et avoir soumis une deuxième cellule à des essais de fatigue correspondant à la durée de vie prévue de l’appareil.
L’US Air Force, qui a obtenu 349 M$ pour les travaux de recherche et de développement de cet appareil en 1971 et 419 M$ en 1972, vient d’obtenir 958 M$ pour 1973 dont 421 M$ pour la production des 30 premiers avions de série.
Importance du rayonnement cosmique au cours des vols à haute altitude
Les avions sont soumis en vol aux effets du rayonnement cosmique qui sont négligeables en dessous de 15 000 m, l’atmosphère formant alors un écran suffisant. Il n’en est plus de même aux altitudes supérieures et en particulier à celles où évoluent déjà de nombreux appareils militaires et où doivent régulièrement croiser, dans un avenir proche, les transports supersoniques en cours de développement.
Il se trouve en effet que la tranche d’altitude de 16 000 à 20 000 m, dans laquelle Concorde et le Tu-144 réaliseront leurs vols de croisière supersonique, est le siège de phénomènes d’ionisation qui pourraient éventuellement constituer un certain danger pour le corps humain et le matériel aérien, notamment les équipements à composants électroniques.
Le rayonnement cosmique qui « bombarde » l’atmosphère se trouve modifié au contact de celle-ci par suite des interactions nucléaires avec l’oxygène et l’azote de l’air. Il y a alors création de particules secondaires qui viennent augmenter le flux initial et dont l’intensité passe par un maximum au niveau considéré (18 000 à 20 000 m).
La connaissance précise de ce phénomène, et en particulier des intensités susceptibles d’être enregistrées, constitue donc une nécessité primordiale pour les responsables de l’exploitation des transports supersoniques.
Les différentes études menées dans ce domaine ont montré que ce rayonnement était en fait la somme d’un Rayonnement cosmique d’origine galactique (RCG) et d’un Rayonnement cosmique d’origine solaire (RCS).
La source du premier est encore actuellement discutée. Par contre, ses manifestations sont bien connues car elles font, depuis de nombreuses années, l’objet de mesures précises. On sait ainsi que son intensité varie dans des limites déterminées en fonction de l’époque, de la latitude et de l’altitude.
Au contraire, les lois de développement du second sont beaucoup plus difficiles à cerner car il s’agit d’un phénomène aléatoire ; ce rayonnement trouve en effet sa source dans les éruptions solaires qui se produisent périodiquement. À l’heure actuelle, et bien que cette manifestation échappe à la prévision, on sait néanmoins que l’activité du soleil est organisée en cycles de périodes sensiblement égales à onze ans et que l’intensité maximale du rayonnement, correspondant aux éruptions les plus énergétiques, peut atteindre des valeurs dangereuses.
Finalement, et les mesures prises à bord du prototype Concorde 001 l’ont montré, en période d’activité solaire moyenne et à des latitudes de vol comprises entre 43° et 53° nord, la somme des doses d’irradiation enregistrées est extrêmement faible et ne constitue pas un danger pour les équipages et les passagers qui y sont soumis. En outre, on estime que le matériel électronique placé dans les mêmes conditions atteindra ses limites de péremption avant de subir des dégradations irréversibles.
Il en ira, par contre, tout autrement en cas d’arrivée inopinée d’une dose dangereuse due à une activité solaire de forte amplitude. Dans cette hypothèse, la parade retenue consistera à placer à bord des aéronefs des détecteurs destinés à alerter l’équipage. En cas d’urgence, ce dernier devra rejoindre le plus rapidement possible les couches plus denses de l’atmosphère, manœuvre qui constitue, dans l’état actuel de la technique, le seul moyen d’éviter une irradiation dépassant largement les normes admissibles pour l’être humain. ♦