Aéronautique - Le budget Air 1974 - Premiers vols de l'Alpha Jet
Le budget Air 1974
La section Air du budget des Armées pour l’année 1974 traduit pour l’Air les trois orientations majeures communes aux trois Armées : l’arrêt de la déflation des effectifs, l’amélioration de la condition des personnels, le respect de la 3e loi de programme militaire qui entre dans sa 4e année d’application.
Elle se présente comme suit :
– crédits de paiements (CP) du titre III : 3 703,8 millions de francs soit 46,1 %
– crédits de paiements du titre V : 4 335 MF soit 53,9 %
– Total de la ressource : 8 038,8 MF
– autorisations de programme titre III : 762 MF
– autorisations de programme (AP) titre V : 5 494,7 MF
Le tableau ci-dessous permet de comparer les CP et AP de la section Air aux CP et AP du budget des Armées
|
Air |
Armées |
||
CP |
8 038,80 MF |
+ 11,9% |
38 311 MF |
+ 11 % |
CP TITRE III |
3 703,80 MF |
+ 11,4% |
20 419 MF |
+ 11,7% |
CP TITRE V |
4 335 MF |
+ 12,4 % |
17 894 MF |
+ 10 % |
AP TITRE V |
5 494,70 MF |
+ 9,2% |
22 000 MF |
+ 11 % |
On retiendra essentiellement que la part de la section Air représente le même pourcentage du total des crédits que l’année dernière, soit 20,8 %, que l’augmentation des ressources du titre III de la section Air est légèrement inférieure à l’augmentation des ressources de l’ensemble du titre III, et que l’accroissement un peu plus sensible des CP du titre V résulte de ce que l’Armée de l’air devra faire face en 1974 à plus d’échéances de paiement qu’en 1973.
Au sujet des autorisations de programme, la 3e loi de programme de novembre 1970 avait fixé le volume des AP à ouvrir en 1974 à 19 873,50 MF. Les hausses de prix constatées depuis lors ont conduit le Gouvernement, en 1972, à accorder une « rallonge » à cette loi de programme ; c’est ainsi que, pour 1974, l’annuité retenue est de 22 000 MF, soit 10.7 % de plus que les prévisions de 1970. En réalité, compte tenu de la baisse du taux annuel de la TVA, la progression est en fait de 11 % et la part de la section Air est en augmentation de 9,2 %.
L’analyse du titre III fait apparaître une augmentation de + 14,9 % en pourcentage du chapitre Soldes et Indemnités : 36,50 MF sont consacrés aux mesures concernant la fonction publique (réforme des catégories B, C et D), 14 MF correspondent à une nouvelle indemnité pour charges militaires majorée de 14,8 %, et 12 MF sont liés à l’aménagement à compter du 1er septembre 1973 du régime des primes d’attachement versées aux sous-officiers.
S’agissant des mesures spécifiques de l’Armée de l’air, on note la poursuite de l’amélioration de la pyramide des grades des sous-officiers (+ 100 postes d’adjudant-chef et + 300 postes d’adjudant), une répartition nouvelle du pourcentage des titulaires d’échelle 4 fixée à 44 %, l’attribution à certains sous-officiers particulièrement qualifiés de l’Armée de l’air et de la Marine d’une prime au taux de 10 % de la solde de base, l’amélioration de la pyramide des grades des gendarmes de l’Air et la création de 30 postes d’aspirant du personnel navigant permettant le recrutement annuel de 60 officiers de réserve servant en situation d’activité.
D’une manière générale, on note pour le titre III, d’une part, un catalogue diversifié de mesures catégorielles visant à revaloriser les traitements et à améliorer les perspectives de carrière des personnels militaires ; d’autre part, des dispositions permettant un entretien des installations et des matériels, ainsi qu’une activité et un fonctionnement des unités aériennes qui ne soient pas affectés par les hausses économiques.
Sur le plan budgétaire, le titre V se présente comme suit :
Chapitres |
Autorisations de programme (en MF) |
- |
||
Numéros |
Intitulé |
1973 (1) |
1974 |
% |
51-71 |
Études et prototypes |
972 |
1 062 |
+ 93 |
52-71/72 |
Investissements techniques et industriels |
933) |
995 |
+ 5,9 |
53-41 |
Matériels commissariat |
103,5 |
118 |
+ 14 |
53-51 |
Armement munitions |
177 |
249 |
+ 40,6 |
53-52 |
Matériels sol |
114,9 |
135 |
+ 17,4 |
53-71 |
Fabrication télécommunications |
501,5 |
604 |
+ 20,4 |
53-72 |
Matériels aériens (série) |
2 741,7 |
2 900 |
+ 5,7 |
56-61/62 |
Infrastructure |
325,3 |
3 273 |
+ 0,5 |
|
Totaux |
5 029,8 |
5 494,7 |
+ 93 |
Pour ce qui concerne l’analyse du titre V, le chapitre études et prototypes s’élève à 1 062 MF dont 169 MF pour les études générales.
Cette rubrique regroupe tous les travaux d’études, de fabrications pour essais et d’essais communs à plusieurs programmes, ainsi que les fournitures et les prestations diverses que les établissements de la DTCA (Direction technique des constructions aéronautiques) doivent commander pour pouvoir exécuter les essais en vol et au sol dont ils sont chargés.
Par ailleurs, les principaux programmes spécifiques reçoivent les dotations suivantes :
– Avion de combat futur (ACF) [NDLR 2023 : futur Dassault Rafale] : 246 MF, destinés aux études et à la fabrication du premier prototype (premier vol prévu en 1976).
– Sepecat Jaguar : 93 MF, destinés à la poursuite du développement de la cellule, du moteur et des divers équipements du système de navigation et d’armement.
– Mirage F1 : 62 MF pour la poursuite des essais en vol sur les trois prototypes et la mise au point de l’avion et de son système d’armes.
– Alphajet : 64 MF, destinés à permettre le financement de la phase prototype.
– Moteur M53 : 138 MF pour la réalisation et les essais au sol et en vol, sur Caravelle, des moteurs de développement.
– Moteur Larzac : 40 MF destinés au développement au banc et aux essais en vol sur Falcon 10.
– Enfin, 137 MF et 99 MF sont prévus respectivement pour les études télécommunications et les études engins (Magic, Matra Super 530, Crotale).
Les ressources du chapitre investissements techniques et industriels sont destinées à financer les moyens d’essais dans les établissements d’État. Il convient de noter la disparition quasi complète des crédits destinés aux établissements privés de l’industrie aéronautique. La politique suivie depuis plusieurs années vise, en effet, à transférer aux industriels la responsabilité du financement des moyens d’essais nécessaires à la réalisation de leurs matériels.
La dotation du chapitre matériels du Commissariat a subi une augmentation de 14 %, d’une part en raison des fortes hausses constatées dans ce domaine, d’autre part, pour remettre progressivement à niveau les stocks dans lesquels il avait été nécessaire de puiser les années précédentes.
Les AP prévues au chapitre armement-munitions augmentent de 40 % par rapport à 1973. Cette hausse intéresse essentiellement les fabrications de missiles. En effet, une des grandes missions de l’Armée de l’air étant la défense aérienne, il est essentiel de disposer d’un stock de missiles en rapport avec les besoins des unités. En outre, la nécessité d’acquérir un missile plus évolué que le Sidewinder, en service depuis plus de vingt ans, a amené l’Armée de l’air à développer le Magic dont une première tranche de 300 devrait être commandée en 1974. Par ailleurs, dans le cadre des missions d’appui tactique, la fabrication du missile air-sol AS37 Martel se poursuit.
Les ressources du chapitre fabrications de matériel sol sont destinées à financer la construction ou l’achat des véhicules de toute nature nécessaires au fonctionnement de l’Armée de l’air ainsi que des matériels spécialisés de mise en œuvre des avions.
L’augmentation des AP dans le domaine de la fabrication de matériel de télécommunications doit permettre de satisfaire les besoins nouveaux et de poursuivre les opérations anciennes. Au titre des besoins nouveaux, il convient de mentionner le début d’un programme de modernisation des moyens de guerre électronique. Au titre des opérations anciennes, il est prévu la mise en place d’autocommutateurs pour équiper le réseau Air 70. Sont poursuivis également le programme Strida, la rénovation des contrôles d’approche des bases aériennes, ainsi que des opérations multiples touchant aux installations fil, radio, mesures, chiffrements.
Les opérations principales imputables au chapitre des fabrications de matériel aérien en 1974 concernent les matériels suivants :
– Jaguar : 1 494 MF, qui seront consacrés à la commande de 40 appareils. Ainsi sera atteint l’objectif de la loi de programme réexaminée qui avait prévu que 160 appareils seraient commandés avant 1975.
– Alpha Jet : 339 MF destinés à la poursuite de l’industrialisation après le premier vol du prototype qui a eu lieu le 26 octobre 1973 (voir ci-dessous), ainsi qu’à la commande de 17 de ces appareils.
– Rechanges-avion pour le programme d’activité aérienne (930 MF).
Le complément des autorisations de programme financera la poursuite d’opérations diverses (hélicoptères Puma SA300, francisation et VRD (Volant et rechanges divers) pour Mirage V F, BEL (Bimoteur École et Liaison), missile sol-air courte portée). À noter que ces opérations diverses ont supporté quelques réductions pour pouvoir satisfaire des besoins prioritaires tels que les études ACF et les fabrications et travaux imputables aux chapitres 53-41 et 54-61 qui, bien qu’affectés par les hausses économiques, n’ont pas bénéficié pour autant de l’allégement de la TVA.
Enfin, les ressources du chapitre infrastructure sont sensiblement du même ordre que pour l’année 1973. Les principales opérations sont les suivantes :
– dépenses permanentes (fonctionnement, matériel, conservation du domaine) 56,5 MF ;
– regroupement et rénovation des bases aériennes, 89,3 M portant essentiellement sur l’École de Rochefort, dont la reconstruction s’étalera sur plusieurs années jusqu’en 1978, la Base d’Aix-les-Milles et l’École de Nîmes ;
– opérations liées à l’environnement opérationnel : 108,2 MF. Il s’agit là de travaux concernant les PC de Taverny et Mont-Verdun, le Plan « Vauban » de défense aérienne, ainsi que la mise ou la remise en état des installations en raison de l’arrivée de matériels nouveaux et de l’accroissement des effectifs du personnel féminin (casernements, pistes, transmissions, centrales et réseaux de distribution électriques, abris et aires d’évolution et de desserrement pour avions…).
Premiers vols de l’Alpha Jet
Le biréacteur Alpha Jet a effectué son premier vol le vendredi 26 octobre 1973, piloté par M. Saget sur la Base aérienne d’Istres. Il est à remarquer que les essais en vol du prototype ont commencé dans les meilleures conditions puisqu’au cours de la première semaine de vol. l’appareil totalisait 4 vols en 6 heures d’essais au cours desquelles il atteignait une altitude de 13 500 m avec ses pleins complets et toute son installation d’essais. Des vitesses de Mach 0,85 et plus étaient franchies en haute altitude, alors qu’à basse altitude une vitesse de 950 km/h était enregistrée. Des évolutions sous facteur de charge de 5 G, des tonneaux, des extinctions et réallumages en vol, des approches sur un moteur étaient pratiqués durant cette première semaine.
Le vendredi 9 novembre, l’avion était présenté aux chefs d’état-major de l’Armée de l’air et de la Luftwaffe. D’ici la fin de l’année, l’Alpha Jet continuera à faire l’objet d’essais destinés à terminer les mesures de performances et de qualités de vol. Il sera présenté aux représentants des services officiels. Des vols d’information en biplace seront exécutés. Nous nous proposons de revenir ultérieurement sur le programme franco-allemand concernant cet appareil destiné au remplacement des avions d’entraînement militaire de la France, de l’Allemagne et de la Belgique et commandé à ce jour à 433 exemplaires. ♦