Outre-mer - La réunion de Paris - Les États arabes, Israël et l'Afrique noire
Le 13 novembre 1973, des chefs d’État ou ministres de plusieurs pays africains se sont rencontrés à l’Élysée en présence du président de la République française Georges Pompidou. Ni son objet, ni la nature de ses participants ne permettent de donner à cette réunion un nom plus explicite que celui d’« impromptu de Paris ». Elle ne comptait la totalité ni des membres africains de la zone franc, ni des anciennes colonies françaises, encore moins, bien entendu, celle des pays francophones d’Afrique ; de plus, les débats devaient se dérouler sans ordre du jour détaillé et formel. Mais, comme tout impromptu entend exprimer, sans la contrainte d’une forme exigeante, la pensée de son auteur, la réunion de Paris a été marquée par les intentions profondes de ses initiateurs.
Quels étaient-ils ? Le Sénégal, des gouvernements du Conseil de l’Entente, comme la Côte d’Ivoire et le Niger, et, parmi les pays de l’ancienne Afrique équatoriale française (AEF), le Gabon. Ils s’inquiétaient depuis un certain temps de l’évolution de leurs partenaires africains au sein de la francophonie, notamment de ceux qui abandonnaient l’Organisation commune africaine et malgache (Ocam) ou quittaient la zone franc et de ceux qui remettaient publiquement en cause, parfois de manière un peu démagogique, la coopération avec la France. Ces défections les isolaient et les plaçaient en position fausse au sein de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), en face de leurs rivaux anglophones d’Afrique de l’Ouest et même devant une partie de leur opinion publique. Ils avaient cru remarquer, par ailleurs, que les conflits de l’Ocam provenaient autant de rivalités de personnes que d’oppositions doctrinales et que même, dans ce dernier cas, ils avaient pour origine des problèmes africains et non des divergences idéologiques. Il leur vint alors l’idée d’élargir les confrontations à l’ensemble de la francophonie pour mettre les pays noirs devant des responsabilités mondiales, atténuer ainsi les différends locaux et maintenir en Afrique, peut-être en la transformant, une association destinée surtout à protéger leurs particularismes culturels communs. De surcroît, leurs adversaires ne pourraient plus reprocher à cette association de faire double emploi avec l’OUA puisque d’autres États africains, pour des raisons analogues, étaient eux-mêmes rassemblés autour du secrétariat permanent du Commonwealth à Londres et qu’ils se réunissaient périodiquement sans s’attirer pour autant les remontrances de l’Afrique.
M. Hamani Diori, chef de l’État du Niger et président en exercice du Conseil de l’Entente, fut chargé de solliciter les adhésions. Le gouvernement français fut d’abord réticent : n’intervenant pas dans la politique des États africains, il ne voulait pas donner l’impression qu’il se mêlait des relations interafricaines et qu’il avait des préférences. Pour qu’il pût accepter le principe de la réunion, le président nigérien dut alléguer l’état d’avancement de négociations déjà engagées, comme celles sur la révision des statuts de la banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest. Comme ces travaux impliquaient une étude de l’évolution de la zone franc vers la constitution d’un secteur de solidarité économique, il fut décidé que M. Hamani Diori adresserait en son nom une invitation aux États qu’il estimait susceptibles d’approuver son initiative. Les participants pourraient aborder de manière informelle les problèmes économiques et monétaires, l’association des États africains à la Communauté économique européenne (CEE) et l’évolution de leurs rapports avec la France ; ils traiteraient aussi, à l’occasion, de la francophonie.
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