Aéronautique - L'atterrissage automatique catégorie III certifié pour l'Airbus A300 et le Mercure - Espace : la fusée Ariane - Le Dassault Falcon 50 - Le Megalifter - Araks une expérience en coopération franco-soviétique pour l'Espace
L’atterrissage automatique catégorie III certifié pour l’Airbus A300 et le Mercure
Le lundi 30 septembre 1974, l’Airbus A300 a reçu la certification du Secrétariat général à l’aviation civile (SGAC) pour l’atterrissage automatique catégorie III.
Cette certification faite aux normes OACI (Organisation de l’aviation civile internationale), avec une hauteur de décision nulle et une visibilité de 200 mètres, permettra de plus une utilisation opérationnelle aux conditions limites autorisées en France, avec une visibilité de 150 m et une hauteur décision de 15 pieds.
L’A300 dispose donc actuellement d’un système permettant :
– de couvrir toutes les pannes, y compris celle d’un moteur en approche, sans perdre la capacité de terminer l’atterrissage automatiquement dans de bonnes conditions,
– de remettre automatiquement les gaz jusqu’à 10 pieds sans toucher le sol même en cas d’une panne moteur,
– de surveiller en vol le système de guidage (ILS).
Après avoir été utilisé d’une manière systématique depuis le tout début des essais en vol, en particulier à l’occasion de 859 atterrissages automatiques couvrant un large éventail de caractéristiques de piste, d’ILS, de conditions de vent et de turbulence, le système a satisfait aux essais officiels. Ceux-ci ont comporté 101 atterrissages automatiques pour la détermination des performances, 42 pour la démonstration de survivance aux pannes choisies parmi les plus critiques après analyse détaillée des circuits, 37 remises de gaz automatiques, dont 18 incluent une simulation de panne moteur.
Les méthodes de simulation ont été utilisées d’une manière systématique et intensive tant pour l’étude des pannes possibles que pour celle des performances. Dans le cadre du programme qui a conduit à la certification, 48 500 atterrissages ont été simulés et analysés en détail par ces méthodes.
Avec l’extension du certificat de navigabilité obtenu le 15 mars 1974, le programme de développement du A300 est achevé.
Le dernier avion utilisé pour le programme, l’avion A300 B2 n° 4, a été retourné en usine pour montage de l’équipement commercial et mise en état d’exploitation.
Le prochain Airbus en essais sera donc l’avion n° 9, le premier B4 de série volant depuis début novembre.
Les heures de vol effectuées au cours de la durée totale du programme de développement s’établissent à 2 242 h 35, dont 596 h 55 pour les vols de présentation de l’A300 à travers le monde et 108 h 35 de vol d’entraînement pour aéroformation.
Ces heures ont été réparties comme suit entre les 4 avions : Airbus n° 1 : 853 h 20 ; Airbus n° 2 : 409 h 20 ; Airbus n° 3 : 332 h 15 et Airbus n° 4 : 647 h 20.
Depuis la certification de l’A300 B2, le 15 mars dernier, 331 h 05 de vol (vols de mise au point et vols de certification) ont été effectuées, dont la grande majorité a été consacrée à l’extension à la catégorie III de la certification du système d’atterrissage automatique, le reste l’étant à une mise au point préliminaire de l’aérodynamique de la version B4 et à l’analyse de certaines améliorations de détails utiles pour l’avenir.
Parallèlement, le 30 septembre 1974, le biréacteur Mercure a reçu du SGAC son certificat de navigabilité de type étendu à l’utilisation de son système d’atterrissage aux minima météorologiques catégorie III. Une première étape avait été franchie avec la catégorie II obtenue le 12 février 1974 après un peu plus de 1 000 heures de vol d’essais. L’extension en catégorie III représente environ 450 heures supplémentaires d’essais en vol. complétant les études et essais faits dans le cadre de la simulation sur ordinateur. La compagnie Air Inter vient de prendre livraison du Mercure n° 5, premier avion équipé pour la catégorie III.
Espace : la fusée Ariane
Le gouvernement français a décidé de poursuivre sa participation au programme européen d’application en matériel spatial, et notamment au lanceur Ariane. Le conseil a insisté sur le caractère de respect de la politique d’indépendance européenne dont cette décision est le symbole. Les considérations de défense nationale paraissent avoir eu leur poids dans cette décision qui a tenu compte des aspects politiques, diplomatiques, économiques et sociaux : les Armées s’intéressent en effet à un lanceur capable de mettre sur orbite des satellites militaires.
La Snias (Aérospatiale) est l’architecte industriel du projet, qui intéresse également en France la Société européenne de propulsion (SEP), l’Air Liquide et Matra, lesquels se partagent les tâches tout en sous-traitant auprès des firmes étrangères des pays finançant le programme. L’ensemble du programme est sous la responsabilité du Centre national d’études spatiales (Cnes).
Ariane sera un lanceur tri-étages de 47,38 m de hauteur et d’un poids au décollage de 207 tonnes. Il est destiné à donner à l’Europe les moyens de mettre en orbite géostationnaire des satellites d’application, télécommunications, télévision, météorologie, etc., d’un poids de 750 kg environ.
Une importante étape vient d’être franchie dans la mise au point du moteur cryogénique (hydrogène et oxygène liquides) destiné au troisième étage du lanceur développé par la SEP. Les deux premiers étages seront propulsés par deux versions du moteur Viking, également fabriqué par la SEP et dont la licence vient d’être achetée par l’Inde pour son futur lanceur « SLV3 » identique à Ariane.
La poursuite du développement des sous-systèmes permettra d’effectuer les premiers essais du moteur complet en mars 1975 conformément au programme Ariane.
Le Dassault Falcon 50
LeFalcon 50, dérivé du Falcon 20 mais avec 3 réacteurs, sera capable de franchir plus de 5 000 km comme le souhaite la clientèle américaine. Cette clientèle a réagi à l’annonce du lancement du Falcon 50 puisque les options payantes s’élèvent actuellement à 31 avions, dont 28 aux États-Unis où Falcon Jet Distribution livrera l’avion, et 3 en Europe. Il convient de remarquer que sur les 28 options américaines, 19 proviennent de clients qui utilisent déjà le Falcon 20. Deux prototypes seront d’abord construits puis un troisième qui rejoindra les deux premiers à la fin du programme de développement. Enfin, une cellule partielle d’essais statiques et une pour essais de fatigue seront également construites. La certification sera obtenue en 1977. AMD précise que sera confiée à l’Aérospatiale une partie de la fabrication du Falcon 50 (60 % environ), comme cela se fait pour le Falcon 20.
Le Megalifter
Le transport des charges lourdes ou hors gabarit a nécessité le développement d’appareils spécialisés, comme l’Aero Spacelines Super-Guppy utilisé par la Snias dans le cadre du programme Airbus. C’est pour répondre à un besoin analogue qu’un groupe d’ingénieurs américains a proposé à l’Administration nationale de l’aéronautique et de l’Espace (NASA) de réaliser un appareil géant capable de transporter notamment « la navette spatiale et le réservoir externe qui lui est associé ». Il s’agit là d’un chargement type choisi en fonction des activités d’un client potentiel.
Le Megalifter – ainsi nommé en raison de ses dimensions énormes – pourrait naturellement assurer d’autres missions (transports de carburants spéciaux par exemple) et même « servir de banc d’expérimentation dans le cadre d’une étude portant sur l’utilisation de l’hydrogène comme carburant avion ».
Le Megalifter est un « semi plus léger que l’air » en ce sens qu’il combine les capacités du ballon dirigeable et de l’appareil classique.
Le fuselage, long de 190 m, est constitué par un réservoir d’hélium à l’intérieur duquel la soute a été aménagée. L’enveloppe à volume constant peut recevoir près de 200 000 m3 de gaz. La force ascensionnelle ainsi créée donne à l’appareil un poids à vide apparent de 120 t seulement.
L’envergure atteint 150 m. Les ailes classiques sont dotées d’ailerons, de spoilers et de dispositifs d’hypersustentation très développés. Elles supportent 4 réacteurs GE TF39 de 20 t de poussée chacun, situés près du fuselage. À chaque bout d’aile a été implanté un réacteur dont le rôle est de corriger les écarts en cas de panne de moteur au décollage ou à l’atterrissage et de fortes turbulences en vol de croisière. Le pilotage de ces réacteurs de compensation est réalisé par un calculateur placé à bord de l’appareil.
La motorisation du Megalifter, son aérodynamique particulière lui confèrent des capacités STOL, une vitesse de 200 mph en croisière et un plafond de 15 000 pieds. L’autonomie serait de plus de 10 000 milles et la charge utile maximum de 200 t, à répartir dans une soute aux dimensions étonnantes (100 m de longueur, 12 m de largeur et 12 m de hauteur). La faible charge alaire de l’appareil autoriserait des vitesses de décollage de 70 mph environ.
Le Megalifter a été conçu pour utiliser certains éléments du Lockheed C-5A Galaxy dans le but d’abaisser sensiblement le prix total de l’appareil et de réduire dans de notables proportions les phases d’étude et d’expérimentation.
C’est ainsi qu’ont été retenus notamment : le poste de pilotage ; le nez pivotant : le plancher de chargement ; le train d’atterrissage.
Ce dernier est capable d’un débattement important par rapport à l’axe longitudinal de l’avion. Cette capacité permet en particulier de garer l’appareil par fort vent transverse sans avoir à utiliser un amarrage conventionnel. Un épieu commandé hydrauliquement et monté dans la « rampe de campement » est engagé dans la partie arrière du fuselage. Les roues sont tournées à 90°. Dès lors toute action du vent sur l’immense surface constituée par le fuselage aura tendance à faire tourner l’avion autour de l’axe ainsi réalisé sans soumettre le train à de trop gros efforts. Il faut noter en effet que la surface latérale de l’appareil atteint 4 500 m2 et qu’un vent de 20 m/s se traduirait par des contraintes de près de 80 t.
Le Megalifter est pour l’instant à l’état de projet. Il s’agit d’un programme nouveau, mal connu et proposé à une période peu favorable. Ses réalisateurs pensent d’ailleurs que trois années d’efforts au moins seraient nécessaires avant qu’il puisse déboucher.
Araks, une expérience en coopération franco-soviétique pour l’Espace
L’établissement de Cannes de l’Aérospatiale a livré récemment au Cnes, maître d’œuvre, les pointes scientifiques destinées à l’expérience scientifique Araks menée en coopération avec l’Union soviétique.
Deux fusées-sondes Éridan, fabriquées par l’Aérospatiale, sont prévues pour lancer ces pointes depuis les îles Kerguelen.
Participent à cette expérience les organismes suivants : le Cnes, Intercosmos – organisme soviétique pour la coopération spatiale, dépendant de l’Académie des Sciences de l’Union soviétique –, le Groupe de recherches ionosphériques (GRI) du CNRS, le Centre d’études spatiales des rayonnements (CESR) de l’Université Paul Sabatier de Toulouse, les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).
L’expérience Araks consiste à injecter à 230 km d’altitude au-dessus des îles Kerguelen des particules énergétiques dans l’ionosphère et la magnétosphère par l’intermédiaire d’un canon embarqué à bord de la fusée-sonde Éridan.
Ces électrons produiront par réflexion des aurores artificielles observables aux deux points magnétiquement conjugués (îles Kerguelen et Arkhangelsk en Union soviétique). Première expérience active dans la magnétosphère, l’expérience Araks doit permettre d’étudier un domaine encore peu connu : le champ magnétique terrestre, milieu qui protège la terre des rayonnements et particules qui proviennent de l’Espace.
Deux thèmes d’observation composent le programme scientifique :
• Le thème « Particules » s’intéresse d’une part aux instabilités des faisceaux d’électrons, aux mouvements de ceux-ci, à leur diffusion dans l’atmosphère. En effet, selon la direction de leur injection dans l’atmosphère par rapport au champ magnétique terrestre, ces électrons auront des destinations différentes : ou bien ils seront renvoyés par l’atmosphère proche qu’ils n’auront pas réussi à traverser, ou bien ils feront des allers-retours continuels entre les deux points conjugués, Kerguelen et Arkhangelsk, comme réfléchis par des miroirs, mais sans jamais ré-entrer dans l’atmosphère. Enfin, ceux qui auront été injectés parallèlement aux lignes de champ seront emportés vers le nord, et en retrouvant l’atmosphère dans la région d’Arkhangelsk, peuvent provoquer des aurores boréales artificielles. L’observation d’une telle aurore boréale devrait permettre la localisation exacte du point géomagnétiquement conjugué des îles Kerguelen.
Les matériels de ces observations seront des caméras et des spectromètres français et soviétiques.
• Le thème « Ondes » se propose de détecter et d’analyser les bruits engendrés par les faisceaux d’électrons énergétiques, à l’aide de capteurs magnétiques et électriques fournis par le Groupement de recherche inosphérique français. Le canon à électrons de 15 kW de puissance est développé par l’Institut Paton de Kiev.
Les pointes scientifiques ont la composition suivante :
Chaque pointe, de 4,2 m de longueur et de 420 kg de masse totale, comprend deux parties :
– une partie basse restant liée au vecteur et dénommée « charge utile Éridan », contenant le canon à électrons, la source de plasma, les spectromètres et les détecteurs de l’expérience « Particules » et les équipements de servitude ;
– une partie haute ou cône largable, protégée par une coiffe éjectable, et contenant des capteurs scientifiques, dont la plupart de ceux destinés à l’expérience « ondes » ; le cône largable est séparé de la charge utile Éridan, à la vitesse relative de 40 m/s, au moyen d’un petit propulseur à poudre.
L’établissement de Cannes a été plus particulièrement chargé de la conception et de la réalisation des deux pointes scientifiques. Cannes a assuré la réalisation des structures, des mécanismes d’éjection, de séparation et de déploiement de bras d’antennes télescopiques, certains boîtiers électriques et l’une des deux horloges de synchronisation équipant chaque pointe, les alimentations, les câblages électriques et les circuits de télémesure. Une équipe de l’établissement collabore à l’intégration des matériels du programme Araks dans les laboratoires du Cnes, et participera à la mise en œuvre des pointes lors de la campagne de tir, qui est prévue aux îles Kerguelen en janvier 1975. ♦