Outre-mer - La Convention de Lomé et l'Afrique - Évolution du problème rhodésien
Le 28 février 1975 a été signé dans la capitale du Togo un accord de coopération entre les membres de la Communauté économique européenne (CEE) et l’Association des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP). Cet événement, dont il ne faut pas mésestimer l’importance et qui intéresse principalement les pays africains, met un terme, au moins provisoire, à une division de l’Afrique noire entre les bénéficiaires de la Convention de Yaoundé, les signataires de la Convention d’Arusha et les autres. Mais il ne faut pas croire qu’il puisse faire tomber pour autant la méfiance éprouvée par certains à l’égard des pays les mieux pourvus ou les préventions qu’ils nourrissent envers les interventions supposées des anciennes puissances coloniales dans les affaires du continent. Le texte signé à Lomé codifie simplement le régime des échanges et la coopération commerciale entre les membres de la CEE et les ACP, ainsi que la coopération financière, industrielle et technique de l’entité CEE avec chaque État ACP. En Afrique même, les relations interétatiques n’en seront pas changées ; les regroupements économiques survivront ou végéteront ; la liberté des échanges n’en découlera pas forcément. Les thèses eurafricaines, si elles ont subi un échec au profit de la théorie d’une ouverture économique plus large, continueront à s’exprimer sur le plan politique car elles correspondent à un besoin de protection des États les plus pauvres et les plus anxieux de se développer face aux puissances industrielles qui naissent en Afrique et qui cherchent à les diviser pour pouvoir parler en leur nom.
On se souvient que le Traité de Rome (1957) avait réglé les relations de la CEE avec les territoires dépendant encore, à l’époque, de la Belgique, de la France (à l’exception de la Guinée) et de l’Italie. Après l’indépendance de ces territoires, survenue de 1960 à 1962, les chefs des 18 nouveaux États désirèrent étudier par eux-mêmes les textes qui avaient été négociés par leurs puissances administrantes. Ainsi naquit la première Convention de Yaoundé appliquée à partir du 1er juin 1964 et valable pour cinq ans. Un second accord devait lui faire suite : signé à Yaoundé le 29 juillet 1969, il entra en vigueur le 1er janvier 1971 et arrivait à échéance le 31 janvier 1975. Ces deux traités, par leurs dispositions concernant le soutien des cours de certains produits africains et l’instauration d’un régime de préférences réciproques sans restriction quantitative, réussirent à accroître les échanges entre la CEE et les États associés, qui bénéficièrent en outre du Fonds européen de développement (FED) : 730 millions de dollars durant la période de 1963-1968 et un milliard de $ de 1969 à 1974. Dès l’ouverture des négociations entre la Grande-Bretagne et les pays du Marché commun (1970), la République mauricienne posa sa candidature à la Convention de Yaoundé et y accéda le 30 juin 1973.
L’Île Maurice fut donc le premier État du Commonwealth à rejoindre la CEE. Pourtant, dès 1963, les « Six » avaient adopté une déclaration par laquelle ils affirmaient que la Communauté était ouverte à tout pays aux structures économiques comparables à celles des États africains déjà associés. Ils proposaient soit une accession à la Convention de Yaoundé, soit toute autre forme d’association ou d’accord commercial. C’est ainsi qu’en 1966 fut négociée avec le Nigeria une formule qui ne fut jamais appliquée faute de ratification, la grande fédération de l’Afrique de l’Ouest traversant alors la période la plus sombre de son histoire avec l’assassinat du général Ironsi et les affrontements qui devaient aboutir à la guerre du Biafra. En revanche, après de nombreuses vicissitudes, un accord d’association fut signé à Arusha, le 24 septembre 1969, avec les trois États de la Communauté est-africaine (Kenya, Ouganda et Tanzanie). Cet accord entra en vigueur en même temps que Yaoundé II ; il arrivait donc à échéance, comme ce dernier, le 31 janvier 1975. Il instituait le principe d’une zone de libre-échange entre les deux communautés avec de nombreuses dérogations pour éviter de nuire aux États bénéficiaires de la Convention de Yaoundé ; il ne prévoyait ni disposition ni aide en matière de coopération financière et technique.
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