Aéronautique - L'US Air Force consent un gros effort financier dans le domaine des simulateurs de vol
C’est durant la Seconde Guerre mondiale, avec l’apparition du Link Traîner, que débute vraiment la simulation pour l’apprentissage du vol aux instruments. Jusqu’aux années 1960, l’USAF (United States Air Force) se dote de simulateurs analogiques figurant la plupart des avions dont elle s’équipe. Ces simulateurs qui représentent encore près de 90 % du parc actuel ont une capacité limitée en matière d’instruction en vol, et ne sont pas susceptibles d’être beaucoup améliorés. Le grand bond en avant date du milieu des années 1960 avec l’apparition des simulateurs digitaux dont les calculateurs offrent des possibilités considérables.
Une fiabilité très supérieure, un réalisme accru, la possibilité d’une visualisation de l’environnement extérieur, un meilleur rendu des impressions de vol, permettent aujourd’hui l’exécution de missions d’entraînement ou opérationnelles, inconcevables avec la technique antérieure.
Justification des simulateurs
Plusieurs facteurs poussent aujourd’hui l’USAF à se doter de simulateurs aussi réalistes que possible.
En premier lieu elle y voit la possibilité de réduire de façon importante les coûts de fonctionnement (carburant) et d’entretien (rechanges, révisions) tout en économisant le potentiel avion. La crise de l’énergie de 1973 n’a fait qu’accélérer cette orientation. L’effort porte donc en priorité sur les simulateurs des avions consommant beaucoup de carburant. Le tableau ci-dessous montre que les économies attendues sur ce seul chapitre se situent entre 10 et 15 %.
Type d’avion |
Consommation totale USAF prévue en 1980 Millions de gallons |
Économies prévues en 1977 dues aux simulateurs |
|
Nbre d’heures de vol |
Carburant Millions de gallons |
||
F-4 C-141 K-135 B-52 |
680 660 555 530 |
54.400 32.200 30.000 21.400 |
81 70 77 83 |
Cette réduction va de pair avec une amélioration de l’instruction du personnel navigant. Par exemple, pour la formation d’un pilote, l’USAF estime que l’utilisation de simulateurs modernes conduit à l’élévation du niveau professionnel atteint lors de l’attribution du brevet et ceci malgré une diminution de 15 % environ des heures de vol consenties.
Au niveau de l’équipage en unité, la simulation, en autorisant l’exécution complète de la mission opérationnelle, doit conduire le personnel navigant à une meilleure connaissance des missions. Elle permet également un contrôle serré du travail effectué par l’équipage, chose de plus en plus difficile au cours d’une mission aérienne.
Les possibilités actuelles en matière de simulateurs
Les simulateurs digitaux offrent des possibilités considérables parmi lesquelles il faut signaler le « rendu » des impressions de vol (6 degree motion), la visualisation et la possibilité de simuler différents types d’appareils par reprogrammation.
Les dispositifs de mouvement de cabine
Afin de restituer avec plus de réalisme les impressions ressenties en vol, l’USAF a adopté pour sa troisième génération de simulateurs digitaux le système dit 6 degree motion. Cette technique consiste à rendre la cabine non seulement mobile autour des trois axes classiques (lacet, tangage et roulis) mais également capable de déplacements linéaires parallèlement à ces axes. Cela est réalisé par l’action conjuguée de 6 vérins hydrauliques supportant la cabine, l’extension maximum de chaque vérin étant de 5 pieds. Les ordres de mouvement sont élaborés par le calculateur.
La visualisation
Les systèmes de visualisation font également partie des améliorations majeures destinées à augmenter le réalisme des « missions » effectuées au simulateur.
Pour la génération des images, l’USAF utilise deux techniques.
La première consiste à restituer au pilote une image réelle sur écran TV ou dôme. Une maquette du terrain fournit les données figuratives. L’ordinateur positionne la caméra sur le terrain en fonction des éléments de pilotage et des autres éléments de vol (vent, turbulence…). Cette technique, bien adaptée dans certains cas (approches de terrains par exemple) a des limites du fait en particulier du champ de vision limité à 60° environ, ce qui est insuffisant pour nombre d’exercices.
Une deuxième méthode consiste à faire créer (« générer ») les images par l’ordinateur. Les images sont stylisées mais conservent suffisamment de réalisme. Les possibilités de ce procédé sont très étendues (circuits de piste, vol en patrouille, navigation basse altitude, vrilles, simulation de combat…).
Pour la présentation des images au pilote, le système CRT (Cathode Ray Tubes) est sans doute appelé à un brillant avenir : le pilote est placé face à des écrans cathodiques disposés sur 7 des 10 faces d’un dodécaèdre dont il occupe le centre. Un système optique devant chaque tube reporte l’image à l’infini.
Cette seconde méthode de visualisation constitue sans doute l’avenir.
La programmation
Un autre avantage des simulateurs digitaux est de permettre l’utilisation de la même installation pour simuler différents types d’avions. L’appareillage, le Hardware, restant sensiblement le même, à l’exception de la cabine, il suffit de reprogrammer l’ordinateur pour introduire caractéristiques et performances d’un nouvel appareil.
Ces techniques, en particulier le mouvement de cabine et la visualisation que certains estiment inséparables pour une simulation aussi réaliste que possible, ouvrent un large champ d’application aux simulateurs.
Sans dire que tous les problèmes sont résolus, on peut aujourd’hui simuler la mission de base de n’importe quel appareil, y compris le combat aérien et la pénétration basse altitude.
L’effort financier de l’USAF
Partant de ces données, économies possibles, amélioration du niveau d’instruction, possibilités techniques acquises, l’USAF prévoit un accroissement très important des crédits consacrés à la simulation à partir de 1977-1978.
Le tableau ci-dessous donne une idée de l’effort consenti (en millions de dollars).
Millions de dollars |
1975 |
1977 |
1978 |
Recherche et développement |
11,7 |
19,2 |
32,7 |
Acquisitions |
78,6 |
211,1 |
37,3 |
Modifications (C-5 ; F-4 ; F-11 ; |
44,3 |
9,6 |
8,4 |
Rechanges |
2 |
10,9 |
16,7 |
Réalisation au sein de l’USAF |
16,9 |
13,8 |
46,7 |
TOTAUX |
153,5 |
264,6 |
477,5 |
En France, l’armée de l’air est consciente des possibilités qu’offre la simulation dans le domaine de l’instruction. Elle dispose d’un parc constitué pour les deux tiers « d’entraîneurs » datant des années 1950. Le tiers restant est constitué de simulateurs d’avions de conception plus moderne, reproduisant de façon stricte la cabine de l’avion simulé (Mirage III-C ; III-R ; III-E ; F1 ; Jaguar ; Transall ; bientôt Alphajet). Ils font en général appel à un calculateur numérique et permettent de simuler le pilotage, et pour les plus évolués d’entre eux le fonctionnement du système d’arme (Mirage F1). Déjà très utiles dans leur définition actuelle, ils sont très en-deçà des possibilités offertes par la technique moderne dans laquelle l’USAF s’engage à fond. Sans disposer de moyens financiers comparables à ceux de l’USAF, l’Armée de l’air a toujours consenti des dépenses qui représentent sensiblement le prix d’un avion pour chaque simulateur acheté. C’est un effort raisonnable qui doit être largement poursuivi. Il conduit en effet à une amélioration de l’instruction opérationnelle des pilotes de combat, limités sans doute pour longtemps à 180 heures de vol par an sur leur avion d’arme.
Dans des domaines aussi variés que l’utilisation d’un système d’arme à basse altitude, l’emploi de contre-mesures électroniques, le combat aérien, la simulation, sous réserve de bénéficier des techniques les plus modernes, constituera dans les années à venir un outil irremplaçable pour l’Armée de l’air. ♦