Institutions internationales - Menaces protectionnistes sur la CEE - L'autonomie régionale et l'Europe - Efforts vers le Tiers-Monde
Plusieurs événements récents laissent craindre une grave détérioration des relations soviéto-américaines. En effet, le communiqué publié le 25 février par le Département d’État a établi un lien direct entre l’intervention soviétique dans la corne de l’Afrique et l’ensemble des relations entre les États-Unis et l’URSS. L’ampleur de l’intervention soviéto-cubaine autorise à penser qu’après l’Ogaden, l’Éthiopie a l’intention de « reconquérir » l’Érythrée par les mêmes moyens. Or l’enjeu est plus important, et la liquidation, par Soviétiques et Cubains interposés, de la rébellion érythréenne pourrait avoir de graves conséquences.
Sur le plan juridique, l’Érythrée, qui n’est pas terre éthiopienne, a été annexée illégalement par Haïlé Selassié en 1962. Sur le plan géopolitique, les voisins arabes, l’Arabie saoudite en particulier, sont inquiets de voir un pouvoir se réclamant du marxisme s’installer à Asmara et dans la zone stratégique du détroit de Bab-el-Mandeb. La crainte d’une telle évolution a rendu les avertissements de Washington de plus en plus insistants. Les intérêts du régime du lieutenant-colonel Menguistu et ceux de Moscou coïncideront encore longtemps et sont de nature à « déstabiliser » toute la corne de l’Afrique, et peut-être même le Proche-Orient, en mettant en péril les régimes pro-occidentaux de la région : Soudan, Kenya et Arabie saoudite. Une telle évolution de la situation ne pourrait pas ne pas avoir de conséquences sur les relations américano-soviétiques. Déjà, les États-Unis ont suspendu sine die les conversations qu’ils avaient à Genève avec les Soviétiques pour tenter de limiter leur présence militaire respective dans l’océan Indien. Moscou a durci ses positions à la Conférence de Belgrade. Les négociations de Vienne sur une éventuelle réduction des forces en Europe sont toujours dans l’impasse. Celles sur la limitation des armements stratégiques (SALT) traînent en longueur, et il ne semble pas qu’un compromis puisse être conclu, s’il l’est, avant l’automne prochain.
Menaces protectionnistes sur la CEE
Ces tensions diplomatiques s’aggravent tandis que la crise économique développe des effets monétaires qui affectent à peu près tous les pays et qui ébranlent les solidarités communautaires, notamment parce qu’elles renforcent les tentations protectionnistes. Le 18 février Lord Kaldor, professeur à l’Université de Cambridge, et conseiller quasi permanent des chanceliers de l’Échiquier, affirmait sans équivoque : « Seul le protectionnisme peut sauver l’Angleterre ». Il souhaitait « une protection douanière efficace », en explicitant ainsi son vœu : « L’Angleterre est devenue libre-échangiste au début du XIXe siècle, à une époque où elle a commencé à transformer le coton du sud des États-Unis et à inonder le monde de ses tissus. La chute des barrières était la condition de l’expansion, et le libre-échange reflétait la position d’avantage technologique où se trouvait la Grande-Bretagne. Contrairement à ce qu’ont voulu faire croire ses partisans, le libre-échange n’assure pas le développement harmonieux de tous les pays qui y prennent part. L’Angleterre par exemple a entièrement ruiné des pays comme l’Inde ou comme l’Irlande. Elle n’a plus intérêt aujourd’hui au libre-échangisme, mais l’idéologie est demeurée, alors qu’elle n’est plus justifiée. C’est un pays comme l’Allemagne qui défend avec le plus de fermeté les théories libre-échangistes, car c’est elle qui y trouve son compte. La vérité est qu’il faut que chaque pays développe la liberté des échanges jusqu’à un point optimal – et pas au-delà ». Ceci est en contradiction non seulement avec les principes et les objectifs de la Communauté européenne, mais encore avec la tendance que celle-ci manifeste depuis plusieurs années à se dégrader en une simple zone de libre-échange, faute d’une progression sur le plan politique.
Il reste 71 % de l'article à lire
Plan de l'article