Outer Space. Battlefield of the future?
À vrai dire ce n’est pas un point d’interrogation qui devrait ponctuer ce titre, car c’est dès maintenant que la bataille, celle du renseignement et de l’observation, se joue dans l’espace. Depuis vingt ans maintenant qu’ont retenti dans l’espace les « bip-bip » du premier Spoutnik, 1 484 satellites à usage militaire ont été lancés. On ne s’en était guère ému jusqu’à présent mais la récente retombée du satellite soviétique Cosmos 954, porteur d’un réacteur nucléaire, et les développements inquiétants que laisse entrevoir la navette spatiale américaine ont attiré le regard des hommes vers les deux et leur ont fait prendre conscience que l’épée de Damoclès n’était plus une allégorie de la mythologie grecque.
En présentant cet ouvrage, les chercheurs du Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI) nous laissent apercevoir quelques-uns de ces développements inquiétants. C’est ainsi que la fameuse navette spatiale dont les premiers essais de lancement et d’atterrissage ont eu lieu il y a quelques mois, est équipée de portes massives dont la manœuvre permet l’inspection, la récupération ou la capture d’un satellite adverse, de même qu’elle peut constituer le support d’armes laser ou à rayonnement ionique dès que celles-ci auront vu le jour.
En ce qui concerne le laser, il aurait déjà fait l’objet d’un essai par les Américains pour abattre un avion-cible sans pilote volant à la vitesse de 480 km à l’heure. Il n’y a certes, actuellement, aucune preuve que l’URSS ou les États-Unis aient armé des satellites soit avec des lasers, soit avec des armes à particules chargées, mais les chercheurs du SIPRI pensent que le développement de telles armes interviendra dans l’espace d’une décennie. En fait, il n’y a nul besoin d’armes sophistiquées pour détruire les satellites adverses, un engin spatial chargé d’explosif classique y suffirait. Bien entendu ce serait là une violation du Traité sur l’Espace extra-atmosphérique signé en 1967 entre les États-Unis et l’Union soviétique et qui a été ratifié de 1967 à 1976 par 72 nations.
Reste que, dès maintenant, les satellites militaires des deux Grands leur fournissent leurs moyens de reconnaissance, de renseignement, d’alerte, de géodésie, de navigation, de guidage, de communication et de météo. Ils constituent les yeux et le système nerveux de leurs forces nucléaires. Celui des deux Grands qui en serait dépourvu deviendrait un géant aveugle livré à la merci de l’autre.
Équipements indispensables à la réalisation de frappes nucléaires très précises et sélectives, ces satellites ont permis le développement des actuelles théories américaines de la guerre nucléaire, tendances que les auteurs de l’ouvrage jugent des plus inquiétantes. En dehors de ces développements qui intéresseront tous les lecteurs, ce livre, dont on ne doit pas cacher l’aspect technique parfois assez ardu – et dont on regrettera une fois de plus qu’il n’existe pas une traduction française – s’adresse surtout aux professionnels (officiers, diplomates, ingénieurs) ayant à traiter des questions de l’espace : il leur fournira les concepts de base concernant les orbites des satellites, il leur expliquera comment celles-ci sont choisies en fonction des différentes missions et il leur donnera un tableau très complet des satellites militaires avec leurs caractéristiques et leurs fonctions. ♦