Scénarios pour la France de l’An 2000
L’auteur de ce petit ouvrage au titre quelque peu frivole, mais qui ne l’est en aucune façon quant à son contenu, est professeur à l’École normale supérieure (ENS) et normalien lui-même. Il s’est consacré à la prospective, une discipline relativement récente, qui procède à la fois de la cybernétique et de la contemplation d une boule de cristal. Elle fait appel, en tout cas, autant à la réflexion scientifique qu’à l’intuition et c’est l’équilibre entre ces deux démarches qui fait l’attrait des scénarios de Philippe Barret.
Ces scénarios sont au nombre de trois. L’auteur ne nous dit pas s’il les estime plus vraisemblables qu’une quantité d’autres qui pourraient être aussi logiquement déduits de la situation actuelle de la France. Mais nous le soupçonnons de les avoir choisis parce que ce sont ceux qui reviennent le plus souvent dans les spéculations des Français sur leur avenir et répondent par conséquent à un certain nombre d’interrogations et de préoccupations très précises et actuelles.
Le choix qui nous est offert pour l’an 2000 est celui entre une France résignée à un « laisser-faire libéral qui se dégrade en laisser-aller », les Français attendant dans l’indifférence un nouveau Munich sans trop se préoccuper du risque d’être plongés dans une décadence cette fois irrémédiable : une France gaullo-communiste, moderniste à outrance, virant au nationalisme, et finalement condamnée à chercher son salut dans un « compromis historique » : une France réformiste enfin, celle d’une social-démocratie agissante certes ! mais « venant buter dans les impasses où son insuffisante dynamique l’enferme ».
Aucun de ces scénarios ne paraîtra bien exaltant, sauf peut-être à ceux qui s’imagineront pouvoir être les bénéficiaires du nouvel ordre des choses. Mais on leur trouvera un intérêt incontestable, car chacun d’entre eux contient certainement plus que de simples parcelles de la réalité qui nous attend. Ils offrent donc ample matière à réflexion.
Leur défaut cependant nous paraît être celui d’une absence assez surprenante de références précises à un environnement international, en particulier dans le domaine économique. Car, tout de même ! Quid du pétrole ? Quid des pays sous-développés et de leur main-d’œuvre bon marché ? Quid des conflits d’idéologie à l’échelle mondiale ? … Au fond, ce sont presque exclusivement les situations politiques et sociales de la France qui sont examinées, in vitro en quelque sorte. On peut se demander si cela ne conduit pas à une simplification excessive des problèmes. ♦