Défense dans le monde - République sud-africaine : l'armée sud-africaine facteur d'intégration dans la nouvelle politique de M. P.W. Botha ? - Autriche : rapports Armée-Nation - Cambodge : le Cambodge et le Vietnam
Les observateurs notent depuis quelques mois des changements dans la conduite de la politique raciale en République sud-africaine (Afrique du Sud). Leur manifestation dans les armées suscite en particulier un intérêt qui amène à s’interroger sur leur portée. Après une assez longue période d’immobilisme, certaines modifications peuvent en effet apparaître révolutionnaires, dans le contexte du pays, mais il est cependant prématuré de parler d’intégration au sens large du terme. Il s’agit plutôt d’une plus grande participation des gens de couleur à la défense du pays par une incorporation progressive et prudente et de réformes pragmatiques et limitées n’altérant pas le fondement de l’apartheid. Après avoir rappelé les innovations de la politique raciale du gouvernement, nous en étudierons les incidences dans les armées en en recherchant la portée et les limites.
L’évolution récente de la politique raciale
Entré dans le langage courant vers 1950, le mot d’apartheid veut exprimer la doctrine du parti national, au pouvoir depuis 1948, en matière de politique raciale. Selon ses instigateurs, chaque groupe ethnique doit se développer séparément, parallèlement, selon son génie propre dans des zones géographiques délimitées (homelands). Les fondements de l’apartheid étaient traditionnels et historiques : le boer, avec sa bible et sa carabine, se sentait investi d’une mission civilisatrice. Il comparait volontiers l’histoire de son peuple à l’exode des Hébreux et, pour lui, la diffusion de la civilisation chrétienne traduisait une volonté divine dont il était le bras armé. Doctrine d’expansion mais aussi de protection culturelle, l’apartheid était officiellement admis par l’église réformée de Hollande. Son application a paru toutefois choquante et paradoxale au monde occidental à peine sorti de la Deuxième guerre mondiale et aux prises avec les problèmes de la décolonisation.
Comparées par leurs détracteurs aux idéologies totalitaires, les théories du docteur Verwoerd furent étayées par un appareil juridique complexe tendant notamment à préserver la pureté biologique de la race (hantise du métissage), à éviter la cohabitation des ethnies (ségrégation résidentielle et universitaire) mais mettaient en œuvre un système de développement séparé ne négligeant pas les réalisations sociales. Leur application rigoureuse, voire tatillonne, était dénigrée par leurs adversaires. La classification des groupes raciaux dans un pays où indiens (3,8 %), métis (9,6 %), noirs de multiples ethnies (69,6 %) côtoyaient les Blancs (17 %) (1) s’avérait compliquée dans une société dont l’urbanisation impliquait des contacts. L’apartheid universitaire, voulant civiliser sans occidentaliser, empêchait les élites noires d’accéder aux postes de responsabilité. L’exclusive raciale frappant certains emplois (Job Reservation Act) semblait interdire tout espoir de promotion sociale aux gens de couleur.
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