À quoi bon des stocks stratégiques ? Le propre d'une stratégie de dissuasion n'est-il pas précisément de se prémunir contre la guerre ? Son échec même ne signifierait-il pas l'inévitable et rapide montée aux extrêmes ? Raisonner ainsi, c'est ignorer qu'une stratégie de dissuasion ne garantit pas contre l'éventualité d'une crise, d'une agression économique restant en deçà du seuil de la violence ouverte. Faute de défense économique, un pays, même doté d'une force nucléaire, peut être mis à genoux. Une politique de stocks stratégiques est un élément indispensable de cette défense économique. Le prix dont un pays est prêt à la payer est en fait celui de son indépendance : une société d'abondance n'en a malheureusement pas suffisamment conscience dans une période de détente.
Ancien élève de l’École nationale d'administration (ENA), inspecteur des Finances, l'auteur est directeur de la Division des Affaires économiques du Secrétariat général de la défense nationale (SGDN). À ce titre, il est chargé des études concernant les aspects économiques de la défense. On se reportera également avec profit à son article sur « La dimension économique de la défense », paru en novembre 1969.
Plusieurs pays mènent depuis un certain temps un effort de réflexion sur le thème des pénuries éventuelles de matières premières industrielles. Ce n’est pas un problème nouveau, mais la croissance régulière des économies industrielles et leur appétit de matières premières et d’énergie conduisent à le poser dans des termes parfois peu optimistes. Les usines comme les populations ont besoin d’« aliments » et leur consommation suppose une ressource et des transports. Or toute crise risque d’affecter plus ou moins soit la disponibilité de la ressource, soit la régularité des transports, donc d’interrompre l’alimentation normale de l’économie, de provoquer une famine de matières premières aux conséquences innombrables du fait de l’étroite interdépendance des activités dans une société moderne et de la sensibilité conjuguée de l’économique, du social et du politique.
Intérêt théorique d’une politique de stockages stratégiques
Le niveau déjà atteint par les consommations de matières premières (énergétiques ou non) et leur rythme d’accroissement en font une des charges essentielles d’une économie industrielle moderne : pour la France, le déficit des achats et des ventes de matières premières hors énergie atteint en 1971 : 3 819 millions, soit un tiers des deux soldes déficitaires qui pèsent sur la balance commerciale française : matières premières et énergie.
Étant donné que les consommations s’accroissent dans un nombre de pays de plus en plus grand, force est bien de s’alimenter à des sources elles-mêmes rapidement croissantes. Pour des ressources fossiles, qui ne se reproduisent plus, comme le pétrole, le charbon ou les minerais, il y a nécessairement une limite, mal connue certes, mais inéluctable. Le point de savoir où se trouve cette limite n’est pas un faux problème, du point de vue de celui qui s’interroge sur les causes des tensions et sur les seuils de rupture générateurs de crises ou de conflits.
Intérêt théorique d’une politique de stockages stratégiques
Les hypothèses stratégiques
Le volume des stocks
Les méthodes de financement des stocks
Les méthodes de gestion des stocks