Cinéma - Journées internationales du film militaire de Lausanne
Les 3es journées internationales du film militaire organisées à Lausanne par l’Association des officiers vaudois, qui viennent de se dérouler dans le cadre rénové du casino de Montbenon, n’ont pas eu le même éclat que les précédentes. Une certaine morosité se faisait sentir du fait que 14 pays seulement avaient répondu à l’appel : Allemagne (fédérale), Australie, Autriche, Canada, Corée, États-Unis, Finlande, France, Grande-Bretagne, Irak, Italie, Pays-Bas, Suède et Suisse, bien entendu. Non seulement aucun pays de l’Est n’a participé cette année à la compétition vaudoise, mais même certains pays de l’Europe occidentale qui avaient été présents deux fois ont déclaré forfait, notamment la Belgique, l’Espagne et la Grèce, sans que les organisateurs puissent s’expliquer cette carence.
Par ailleurs, les délégations étaient moins nombreuses, elles aussi représentant à peine quatre ou cinq pays avec un seul observateur (l’attaché militaire soviétique). L’annonce de la suppression pure et simple du festival international du film militaire, créé par votre serviteur soussigné en 1964 et qui s’est tenu 10 fois (huit fois à Versailles, deux fois à Paris) a plongé les délégués dans la consternation. Quelques Nations ont d’ores et déjà déclaré qu’elles étaient prêtes à prendre la relève du festival français, reste à savoir si les désirs des délégués seront exaucés par leurs ministères respectifs. Ce qui paraît certain, c’est que la disparition de la manifestation française renforcera le prestige de la compétition vaudoise, laquelle en a bien besoin après les journées assez ternes de cette année.
En ce qui concerne la confrontation proprement dite, il y a lieu de regretter le nombre beaucoup trop important de films publicitaires présentés non pas par les services officiels des armées mais par des producteurs privés au nom de firmes commerciales, le plus souvent de fabriques d’armements. Cela ne veut nullement dire que la compétition 1982 ait été sans intérêt, loin de là. De nombreux films d’instruction ou de relations publiques (information) ont séduit aussi bien les membres du jury que les professionnels et le public clairsemé qui assistait aux séances dans la salle Paderewski à l’entrée de laquelle un autre grand musicien polonais, Karol Szymanowski, est honoré par une plaque commémorative. Comme toujours, il était cette fois encore difficile d’établir avec précision les mérites respectifs des nombreuses réalisations soumises à l’appréciation du jury, présidé avec compétence, courtoisie et fermeté par le général (brigadier) Jean-Gabriel Digier qui, pour la circonstance, avait abandonné pendant cinq jours son commandement. Le jury, composé de militaires et de personnalités civiles (écrivains, diplomates, historiens), a rendu des sentences qui tiennent compte à égalité des qualités militaires et des réussites artistiques des films projetés, c’est pourquoi le palmarès reflète très exactement l’opinion générale. Le film britannique Out of China, ‘cross the Bay, très humain et à tendances politiques, a été classé hors catégorie et s’est vu attribuer le prix du gouvernement du canton de Vaud. Des « guidons » ont été ensuite décernés dans les quatre catégories prévues par le règlement.
Les voici : pour la catégorie de l’instruction, Guidon d’or au film britannique Too Fat To Fight, œuvre spirituelle bien qu’un tantinet vulgaire sur la nécessité pour un combattant de se maintenir en parfaite condition physique, Guidon d’argent à Six heures pour une vie, film suisse présentant d’une manière convaincante l’organisation du service sanitaire. Guidon de bronze à Minentaucher (RFA), reportage vivant présentant le labeur des démineurs de la Wehrmacht ; pour les films de relations publiques (information) : Guidon d’or à un autre film allemand, Leo, Luchs und andere Typen qui montre la formation des soldats pour combattre les blindés ennemis, Guidon d’argent au film The Bulwark of National Defence (Corée du Sud), présentation admirablement filmée des forces armées avec exercices, défilés et compétitions sportives à Séoul, Guidon de bronze au film Tigris Helveticus, reportage sur la formation des pilotes suisses et sur les possibilités de l’avion Tiger-5E ; pour la catégorie « expériences » (reportages vécus). Guidon d’or pour la France avec Chasseurs Alpins qui met en relief l’aspect humain des exercices et des manœuvres en montagne, Guidon d’argent à la Grande-Bretagne pour une excellente rétrospective de la RAF (Royal Air Force) intitulée The RAF, Past and Present, Guidon de bronze non attribué. Enfin, le jury a attribué des diplômes d’honneur à trois films : Les Femmes dans les armées (France), The Finnish Airforce (Finlande) et Reaching for the Rainbow (Australie), relation sur le travail des ingénieurs militaires australiens en Guinée.
M. Georges-André Chevallaz qui, il y a deux ans, avait présidé à la remise des prix en sa qualité de président de la Confédération, est venu cette fois rendre visite à la manifestation en tant que ministre de la Défense. Il s’est particulièrement intéressé à la présentation des films français en vidéo réalisés par l’Établissement cinématographique et photographique des armées. Ces réalisations en vidéo ont également provoqué un intérêt très attentif des dirigeants de la cinémathèque suisse installée dans le même bâtiment et venus à la salle Paderewski en voisins. L’auteur de ces lignes qui eut l’honneur pour la troisième fois de représenter la France au jury des journées lausannoises se doit de souligner l’organisation sympathique et courtoise des responsables qui ne manqueront pas de multiplier leurs efforts pour une plus vaste réussite en 1984. ♦