Aéronautique - La SAR (search and rescue) de l'avenir : le système SARSAT-COSAPAS (Search and rescue satellite aided tracking-Cosmicheskaya Sistyema Poiska Avariynich Sudow)
Le problème
En dépit du degré de confiance quasi illimité attribué par tout un chacun à la fiabilité des moyens de transport modernes, navals ou aériens, qui n’a jamais pensé, en fréquentant les régions particulièrement hostiles à l’homme, à l’accident et aux chances que passagers et équipage auraient d’être rapidement secourus.
En fait, les chances de survie des accidentés dépendent pour une grande part de la rapidité d’intervention des secours qui, elle-même, repose sur la localisation rapide et précise de l’accident.
Les moyens de localisation actuels sont assez limités. Ils font appel à des balises de détresse qui émettent sur une fréquence donné, 121,5 mégahertz ou 243 MHz, un signal modulé en amplitude. L’émission est déclenchée manuellement ou automatiquement au moment de l’impact et dure jusqu’au déchargement complet d’une batterie incorporée. Le signal émis permet l’orientation goniométrique des avions de recherche qui peuvent ainsi repérer l’appareil accidenté. La portée de détection par un aéronef est de 50 km environ, mais la portée pratique de localisation précise ne dépasse pas les 25 km. Ainsi, pour recevoir des signaux de détresse et pouvoir les exploiter, il est indispensable qu’un avion survole la zone de l’accident ou, en mer, qu’un navire passe à proximité. Or il faut garder à l’esprit qu’à un instant donné de nombreux avions en vol se trouvent en dehors de toute couverture radar et que leur position instantanée n’est souvent connue que très approximativement par les services de contrôle au sol ; il en est d’ailleurs de même des navires à la mer. Cette méconnaissance relative de la position précise des aéronefs ou navires, jointe à la limitation de portée utile des balises de détresse, explique le fait que de nombreux appareils accidentés ne sont pas retrouvés à temps. Ainsi, en août 1982, les services canadiens de recherche et de sauvetage ont placé un accident survenu en Colombie Britannique en urgence secondaire après… 1 780 h de vaines recherches aériennes.
Le système SARSAT-COSPAS
Toutefois, le système SARSAT-COSPAS, actuellement en phase expérimentale, basé sur l’utilisation des satellites pour la localisation permet d’être foncièrement optimiste pour l’avenir.
Schématiquement, ce système est un relais par satellites. Il capte les signaux émis par des balises de détresse particulières et les transmet à une station au sol qui en détermine l’origine et alerte le centre de coordination sauvetage le plus proche pour déclencher les opérations de recherche et de sauvetage avec les moyens appropriés.
L’idée d’utiliser les satellites en tant que moyens SAR n’est pas totalement nouvelle. De fait, le programme SARSAT (Search and Rescue Satellite Aided Tracking, ou recherche et sauvetage assistés par satellites) a vu le jour en 1979 à la suite d’études menées conjointement par les États-Unis, la France et le Canada. Parallèlement, les Soviétiques imaginaient un programme similaire, le programme COSPAS, et signaient en 1980 un accord garantissant la compatibilité COSPAS-SARSAT. Par la suite, d’autres pays, la Grande-Bretagne et la Norvège, se sont associés à SARSAT.
La phase expérimentale a débuté le 30 juin 1982. À cette date, le premier répéteur de recherche et de sauvetage COSPAS 1 a été placé sur orbite avec le satellite COSMOS 1383. Depuis mars 1983, un répéteur SARSAT placé à bord du satellite météorologique NOAA-E est également sur orbite. Actuellement, 9 stations au sol peuvent recevoir les signaux transmis par SARSAT-COSPAS. Ces stations, nommées LUT (Local Use Terminal ou Station à couverture locale) sont réparties aux États-Unis (3), en URSS (3), en France (1), au Canada (1) et en Norvège (1).
Avantages
L’intérêt d’un tel système est assez évident.
La zone couverte par un satellite est extrêmement vaste et, en aucun cas, comparable à celle observée par un avion. Ainsi le COSMOS 1383 qui parcourt une orbite polaire circulaire à 1 000 km d’altitude peut surveiller une bande de largeur égale à 5 000 km environ.
Le gain de temps sera considérable. De fait, les signaux de détresse seront captés à coup sûr dès qu’un satellite survolera la zone alors qu’aujourd’hui, il est indispensable qu’un avion ou qu’un navire passe à proximité immédiate de l’appareil accidenté. On estime qu’avec 4 satellites, le temps nécessaire à la détection d’une situation de détresse sera inférieur à 1 h, quelle que soit la région du globe concernée.
La précision de localisation sera considérablement améliorée. Actuellement d’une trentaine de kilomètres avec le système SARSAT-COSPAS expérimental, elle devrait atteindre les 2 à 5 km avec le système opérationnel complet faisant appel à des balises plus performantes.
SARSAT-COSPAS a déjà fait ses preuves car depuis le début de l’expérimentation plus d’une vingtaine de personnes ont été sauvées. Ainsi en septembre 1982, les passagers d’un Cessna 172 disparu lui aussi en Colombie-Britannique ont été secourus 26 h après l’accident ; également en septembre 1982, au Canada, le passager d’un Piper Cherokee recevait des secours en 6 h : enfin, en octobre de la même année le COSPAS permettait de retrouver un trimaran qui avait chaviré à 550 km au large des côtes de la Nouvelle Angleterre.
À moyen terme, la précision de localisation, de l’ordre de 3 km, évoquée précédemment, sera obtenue par effet Doppler : utilisation du glissement de fréquence à la réception correspondant à la vitesse de déplacement du satellite.
Par ailleurs, les balises de détresse seront plus puissantes : 5 watt au lieu 100 mW ; elles émettront sur 406 MHz d’où, bruit de fond sensiblement plus faible : le signal émis comportera sous forme codée un indicatif d’identification et des informations sur la nature de la détresse. Enfin, le signal ne sera plus simplement réfléchi vers les stations au sol par les satellites au moment du recueil de l’information mais garde en mémoire et transmis en différé à la première station survolée.
Cette notion de mode différé semble quelque peu contradictoire avec la notion de rapidité attachée à toute opération de sauvetage mais elle résulte de compromis indispensables.
De fait, la fonction localisation ne peut être effectuée que par le couple satellite-station au sol sauf à équiper les balises de systèmes essentiels qui les rendraient hors de prix pour de nombreux usagers. Le seul procédé de localisation utilisable fait alors appel à l’effet Doppler qui pour être pleinement efficace, nécessite une variation rapide de distance entre l’émetteur du signal et le récepteur et, seuls les satellites placés en orbite basse répondent à cette nécessité. Enfin, cette orbite doit être très proche de l’orbite polaire pour des raisons de couverture.
Ainsi, à moins de multiplier à l’infini le nombre de stations au sol, le mode de transmission ne peut être que différé car les liaisons avec les satellites en orbite polaire ne sont possibles que pendant de courts instants.
Certes, on peut imaginer une solution idéale fournissant instantanément l’alerte et la position de l’accident ; elle consisterait à utiliser des satellites géostationnaires. Il en faudrait toutefois un nombre beaucoup trop important car il est nécessaire, pour pouvoir déterminer une position avec ce type de satellites, que le signal soit reçu simultanément par au moins 2 d’entre eux.
La solution la plus probable pour l’avenir consistera alors à utiliser conjointement les 2 types de satellites.
Certes les investissements pour la réalisation d’un système totalement opérationnel sont considérables mais il est sécurisant de penser qu’en tous points du globe un invisible fil d’Ariane pourra relier équipages et passagers aux centres de sauvetage, de plus, dès qu’il s’agit de sauver des vies humaines, les chiffres ne doivent plus avoir la même signification. ♦