Revue des revues
• Le n° 21 de Stratégique (premier semestre 1984), revue publiée par la Fondation pour les études de défense nationale, contient une série d’articles tous forts intéressants sur « la grande muette et le petit écran » (par Bernard Paqueteau), « La protection civile dans divers États européens » (par Michel Garder), la 2e partie des « réflexions sur les systèmes à l’ère de l’électro-informatique » (par Jean-Baptiste Margeride). Il nous a paru particulièrement intéressant de signaler le 1er d’entre eux qui est une traduction de 70 pages faite par le général Laurent, ancien attaché des Forces armées à Moscou, d’un ouvrage du Maréchal de l’Union soviétique Ogarkov intitulé Toujours prêt à défendre la Patrie et datant de 1982.
Destiné à un large cercle de lecteurs, ce livre est à rapprocher de l’ouvrage du Maréchal Sokolovski, Stratégie militaire, dont la dernière édition est de 1968 et dont la traduction en français vient d’être publiée aux Éditions de L’Herne. Il semble cependant qu’il s’agisse plus que d’un simple aggiornamento d’une doctrine ancienne mais d’une véritable remise en ordre de la pensée militaire soviétique. On y trouve de plus une assez curieuse analyse des théories les plus récentes que les Soviétiques prêtent aux Américains sous un vocabulaire souvent difficile à comprendre où l’intimidation ou la dissuasion « réaliste » caractérisent la counter-vailing strategy, telle que l’a exprimée par exemple la directive n° 59 du président Carter. Les Soviétiques, de plus, prêtent au président Reagan une doctrine de guerre nucléaire « limitée » en Europe dont ils rejettent formellement le concept, toute guerre nucléaire ne pouvant être pour eux que générale.
Ce travail est trop long pour être analysé en détail dans le cadre de cette chronique. On peut cependant relever quelques points qui frappent lors d’une première lecture. Un de ces points est l’insistance mise sur « opérations en profondeur, nouveau procédé de conduite des opérations offensives actives avec des armées de masse équipées de matériel ». Le Maréchal Ogarkov en fait remonter le concept à 1932, les corps blindés formés à cette époque ayant été dissous à la suite d’interprétations erronées des expériences acquises lors de la guerre d’Espagne (1936-1939). Ogarkov insiste également sur l’évolution de l’organisation militaire, les armées ayant été réunies en « fronts » dès 1900. Il est apparu la nécessité d’une nouvelle forme d’action militaire : l’opération. Dès la Seconde Guerre mondiale, on a dû unir les efforts de plusieurs fronts sous la direction du Haut commandement suprême. Avec l’aviation, apparaît maintenant la nécessité d’un nouvel échelon de commandement : le théâtre d’opérations.
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