Marine - Présence navale française au large du Liban (suite) - Nouvelles brèves de quelques programmes en cours : armes sous-marines
Présence navale française au Liban (suite)
Les opérations de présence navale française au Liban se sont situées dans un contexte de crise de niveau élevé et de longue durée. Elles ont mis en œuvre, nous l’avons vu, une part importante de la flotte de combat et de soutien.
L’objet de cette chronique, qui fait suite à celle consacrée à la succession des événements le mois dernier, est de mesurer l’impact d’une telle opération sur la Marine.
Soutien de la politique extérieure du gouvernement, la Marine est un outil dans la conduite des crises. Nous verrons, dans un 1er temps, en quoi les concepts nationaux en ce domaine ont pu être confirmés, et ensuite les enseignements plus particuliers qui en ont été tirés. Enfin nous envisagerons la résonance interne de ces opérations, c’est-à-dire l’impact sur le personnel.
Les concepts nationaux
La Marine constitue entre les mains du gouvernement, un instrument d’une grande souplesse pour contribuer, au niveau souhaité, à la réduction des crises.
Elle a effectivement permis de mettre en place à Beyrouth une force importante par la concentration rapide de moyens venant des théâtres Atlantique, Méditerranéen, et de l’océan Indien.
Elle a observé et surveillé l’environnement, et évalué la menace en particulier par les moyens d’écoute électronique.
Lorsque la tension a atteint un paroxysme, elle a manifesté la puissance et la détermination du gouvernement en attaquant les batteries d’artillerie qui tiraient sur notre contingent et en conduisant des opérations de rétorsion sur un camp d’entraînement à Baalbek.
Elle a assuré l’escorte de M. Yasser Arafat [futur président de l’Autorité palestinienne] et de ses fidèles et participé à l’échange de prisonniers israéliens et palestiniens.
Des commandos de la Marine, spécialement au cours de missions de nuit, et ses plongeurs démineurs remplissaient à terre leur rôle spécifique et participaient de plus aux tâches locales des éléments français. Elle a donc contribué à l’action à terre dans un environnement hostile.
Mais elle a aussi, et ce n’était pas la plus faible partie de sa mission, soutenu les forces françaises à Beyrouth et au Sud Liban. Parallèlement au transport aérien militaire de l’Armée de l’air, elle a, en effet, permis d’entretenir un flux régulier d’hommes et de matériels assurant ainsi les relèves indispensables. Elle a, de plus, fourni le soutien médical et particulièrement chirurgical aux victimes des attentats. Lorsque l’accès du port était interdit aux navires de commerce, lorsque l’aéroport était fermé, elle est restée le seul lien entre notre représentation diplomatique, nos forces et le reste du monde. Elle a enfin assuré une grande part des liaisons nécessaires aux Forces françaises à Beyrouth : acheminement d’informations, de messages de communications et même transport de personnel par hélicoptère entre Beyrouth et Larnaca (Chypre).
La Marine a donc participé avec efficacité à la conduite d’une crise de niveau élevé.
Les concepts d’utilisation d’une force aéromaritime en temps de crise s’en sont trouvés validés.
Enseignement précis
Dans les domaines opérationnel, tactique et logistique des enseignements précis ont été tirés sur les points suivant :
– la durée des opérations a nécessité renforts et relèves de moyens navals ; il a fallu faire appel à certains moyens appartenant aux forces de l’Atlantique ; l’importance d’une planification souple et prospective de ces mouvements est apparue clairement ;
– dans une telle opération, le soutien logistique maritime est fondamental ; l’importance du rôle joué par le pétrolier civil Port Vendres doit être soulignée ; une force à la mer de 10 à 12 bâtiments consomme environ 600 tonnes de carburant par jour ; le Port Vendres a permis de ravitailler le pétrolier ravitailleur militaire sur zone et a joué lui-même le rôle du ravitailleur dans des périodes intérimaires ;
– le besoin d’affréter un navire roulier civil (Esterel) est apparu aussi très tôt ; l’aptitude de la marine marchande à coopérer avec des forces militaires a été ainsi établie ; cela vient confirmer l’expérience acquise par les Britanniques aux Malouines (1982) sur une plus grande échelle, expérience qui montre aussi la nécessité de bien intégrer la manœuvre logistique ;
– l’intérêt de petits bâtiments à fond plat, de type Edic (Engin de débarquement d'infanterie et de chars), pour transporter les conteneurs et les marchandises en vrac, vers leur destination finale dans la zone, s’est révélé très fort ; entrant aisément dans des petits ports, ils ont joué en particulier le rôle de bâtiments de transport de zone ; l’hélicoptère seul aurait été excessivement coûteux ; enfin, de nombreuses améliorations techniques de détail ont pu être faites sur les bâtiments de transport militaires et l’infrastructure portuaire en métropole pour faciliter leur adaptation aux divers types de matériel ; la mise au point des procédures d’échanges d’informations concernant le fret facilitera la planification et l’exécution des opérations de transport à venir.
Les enseignements sont donc nombreux et pratiques. Les procédures sont mises à jour, des matériels adaptés rapidement et à peu de frais.
L’aptitude des forces des trois Armées à coopérer en sort considérablement améliorée.
Les opérations ont permis au personnel d’acquérir une expérience irremplaçable. Par le jeu des relèves, c’est une fraction très significative des effectifs de la Marine qui a été engagée dans cette action puisqu’environ la moitié de nos bâtiments de combat ou de soutien logistique ont à un moment ou à un autre, opéré au large du Liban.
Le contact avec une situation délicate, la conscience du danger, l’action, en soutien ou directement dans un environnement hostile, ont permis à chacun de mieux comprendre l’importance de ce qu’il faisait, l’importance de la tâche de la Marine, face à la menace la plus probable dans les années qui viennent, celle d’une forte crise en dehors d’Europe.
Les événements du Liban ont illustré de la meilleure façon la nécessité pour la Marine de conserver son aptitude à durer loin de ses bases, donc de posséder de puissantes forces de soutien tout en ayant des moyens militaires adaptés au temps de crise c’est-à-dire des forces aéronavales et de surface suffisamment nombreuses, capables de faire face à une menace utilisant certains des armements les plus modernes.
Nouvelles brèves de quelques programmes en cours : armes sous-marines
Missiles : Le SM-39
Le développement du missile lancé par sous-marin SM-39 a été décidé par le ministre de la Défense en août 1977. Ce développement est actuellement dans sa phase finale dite de qualification en vol.
Les premiers missiles de série entreront en service début 1985.
Ce missile dont les caractéristiques aériennes sont très proches de l’AM-39, lui-même dérivé de l’Exocet (missile antinavire), est lançable en plongée. Il est destiné aux sous-marins nucléaires lanceur d’engins (SNLE) refondus M4, aux sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) et aux sous-marins classiques de type Agosta.
Torpilles :
1) La F17 Mod.2
La version Mod.2 de la torpille filoguidée F17 possède une capacité anti-sous-marine que ne possédait pas son aînée la F17 Mod.1. Ses performances générales sont améliorées. Elle sera opérationnelle en 1985.
2) La torpille Murène
Destinée à devenir la torpille des années 1990 pour les aéronefs et les bâtiments de surface de la Marine française, cette torpille est entrée dans la phase de développement en septembre 1982.