Afrique - Afrique du Sud : violences contre réformisme - L'Algérie du président Chadli Bendjedid
Depuis la mise en application de la nouvelle Constitution (août 1984) qui, par un accroissement des pouvoirs du chef de l’État, une division de l’autorité parlementaire entre plusieurs communautés et une plus grande liberté de ces dernières à gérer leurs propres affaires, devait placer le pays sur la voie irréversible des réformes de structure, le gouvernement de M. Botha se voit contraint d’utiliser la violence pour combattre des désordres déclenchés, un peu partout et pour les motifs les plus divers, dans les « cités noires ».
Il est vrai que son nouveau régime n’a guère été consolidé par le soutien populaire des nations coloured et « indienne » dont les parlements n’ont été élus que par moins de 30 % d’électeurs pour les seconds et moins de 20 % pour les premiers. Ces abstentions (70 et 80 %) ne pouvaient pas pourtant être interprétées comme la condamnation sans appel d’une Constitution au sujet de laquelle les deux communautés avaient été consultées et qui leur accordait une place privilégiée dans la vie nationale. Elles signifiaient sans doute qu’à la fois les Coloured et les Indiens auraient aimé avoir pu participer, au même titre que les Blancs, au référendum constitutionnel et que, par ailleurs, bien qu’ils se fussent reconnus justement favorisés, ils ne pouvaient admettre que les « Noirs urbanisés », à savoir ceux qui n’avaient plus aucune affinité avec leur ethnie d’origine, ne bénéficient pas du même droit légitime qu’eux. Par ces abstentions, ils ne voulaient donc pas repousser le principe de la création de bantoustans (équivalent de régions), que l’on entendait conduire peu à peu à l’indépendance, à la condition que ces homelands devinssent des États géographiquement et économiquement viables ; mais ils espéraient attirer l’attention sur le fait que des compatriotes, ayant reçu la même instruction qu’eux, exerçant des fonctions souvent plus importantes que les leurs ou que celles de nombreux Blancs, fussent considérés comme des étrangers dans la province où ils étaient nés, dont ils parlaient la langue, dont ils avaient adopté la culture dominante, où ils travaillaient et où, sans doute, ils mourraient.
Cependant, depuis juillet 1983, M. Botha avait un avantage, celui de savoir qu’il pouvait compter sur l’appui d’une importante fraction de la communauté blanche et du Parti national (PN) pour mener une politique réformiste. En effet, les divergences qui, au sein de ce parti. avaient conduit les verkramptes (en particulier 18 députés, leur défection étant alors sans effet sur la majorité du PN au Parlement) à se séparer des « verlistes » (c’est-à-dire, si l’on veut et par analogie, les « faucons » des « colombes ») pour créer le parti conservateur, avaient provoqué, le 4 juillet 1983, la démission du professeur de théologie Carel Boshoff de la présidence du Broederbond (exactement « Afrikaner Broederbond », la « fraternité afrikaner ») et son remplacement par un proche de M. Botha, le professeur de Lange, recteur de l’Université de Rand. Fondée en 1918 par des intellectuels boers dans le but de sauvegarder la culture et les intérêts des Afrikaners qu’une anglicisation du pays dans tous les domaines tendait à effacer, cette association secrète se révéla, par la suite, l’instrument le plus efficace de la promotion des Boers dans le commerce, l’industrie et la politique. Elle permit aux descendants des vaincus de la guerre du Transvaal (décembre 1880-mars 1881) de dénouer l’écheveau d’intérêts, de principes, de structures, emmêlés par le colonisateur britannique, soucieux d’envelopper, comme dans un cocon, un peuple dont il ne pouvait détruire la vitalité. Elle maintint l’unité des Boers. Elle les conduisit à être les principaux bénéficiaires de l’indépendance et à demeurer la majorité unie de la minorité blanche. Le contrôle du Broederbond se présentait donc comme un atout déterminant pour le succès de la politique réformiste.
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