Aéronautique - Efficacité et économie caractérisent la gestion des matériels techniques de l'Armée de l'air
Assurer le maintien en condition opérationnelle de tous les matériels – avions, aides à la navigation, armements, matériels d’environnement… – est l’une des tâches essentielles confiées au plan technique aux grands commandements qui composent l’Armée de l’air. Cet objectif est réalisé aux divers échelons chargés de la maintenance par l’application de mesures d’entretien et par l’exécution de travaux de remise en état. Ces opérations impliquent le remplacement périodique ou occasionnel d’équipements par des matériels neufs ou sortant de réparations et la consommation d’éléments non réutilisables. Pour faire face à ces besoins, le service du matériel de l’Armée de l’air doit constituer des stocks et livrer aux forces les rechanges destinés à compenser les consommations et à assurer une réserve de sécurité couvrant les besoins des forces aériennes en cas de crise ou de conflit pour une période donnée et dans des conditions définies par l’état-major à partir des directives gouvernementales.
L’organisation générale du système de gestion, la présentation des principes qui le régissent et un aperçu sur le bilan obtenu seront successivement abordés.
Une évolution nécessaire
Chaque échelon de l’Armée de l’air, unité, base support, service central, dispose d’éléments ravitailleurs ayant compétence pour l’ensemble des matériels utilisés ou réparés à son niveau. Il en résulte une répartition très fractionnée des ressources, tant au plan quantitatif que géographique. Plus de 1 000 abonnés sont ainsi ravitaillés par une soixantaine de centres de distribution. À l’époque de l’application manuelle et locale de règles de calcul de stocks et de définition de niveaux de sécurité, l’effet cumulatif des différents échelons conduisait à une surestimation des besoins réels. Par ailleurs, la dispersion géographique impliquait, après distribution, une perte de connaissance des ressources encore existantes.
Aussi, l’Armée de l’air, dès les années 1960, a entrepris une réorganisation de son système de gestion. En 1969, après plusieurs années d’études et de mises au point en liaison avec des sociétés civiles spécialisées, une nouvelle procédure de gestion automatisée est entrée en service. Appliquée tout d’abord aux rechanges de l’avion Fouga, elle est maintenant généralisée à la totalité des matériels, ce qui représente environ 500 000 articles de ravitaillement différents gérés suivant une méthode dite des « matériels à distribution automatisée » ou MDA. Le système repose sur une organisation informatique qui permet la transmission des données logistiques entre les différents échelons de ravitaillement et un organisme central : le Centre de gestion des matériels techniques de l’Armée de l’air (CGMTAA) implanté à Châteaudun.
À partir de 1978, l’Armée de l’air se dotait enfin des moyens nécessaires pour assurer le transport de ses matériels techniques. Ces derniers sont mis en œuvre au sein du Système de transport de surface de l’Armée de l’air (SYTSAA), sous le contrôle d’un centre d’opérations installé à Saint-Cyr-l’École.
Les principes de fonctionnement
La gestion MDA est caractérisée par l’application de règles qui découlent de quatre principes de base.
Le système est prévisionnel. Pour un matériel considéré, est tout d’abord réalisé un Lot d’approvisionnement initial (LAI) défini en liaison avec le constructeur et les services techniques de la délégation générale pour l’armement. Ce lot est déterminé à partir du taux d’activité prévu, des calculs de fiabilité espérée, du plan initial d’entretien et de l’expérience acquise sur des matériels similaires. Les besoins en réapprovisionnement sont ensuite déduits de l’exploitation des consommations réellement enregistrées et de leur transposition au nouveau taux de fonctionnement prévu au Plan d’utilisation (PU) par l’application de modèles statistiques – loi de Poisson – : basés sur la consommation moyenne mensuelle, l’écart-type et le choix de la valeur des paramètres de sécurité, ils donnent un taux de couverture théorique de 95 % pour faire face aux aléas.
La gestion est ensuite de type centralisé. Tout changement d’état logistique d’un article – distribution à un abonné, montage sur un ensemble, indisponibilité, etc. – est transmis journellement au centre de gestion qui exploite les informations.
Elle est, par voie de conséquence, automatisée, puisque seule une architecture informatique permet d’avoir en mémoire toutes les données relatives à l’ensemble des matériels et de traiter dans des délais satisfaisants les quelque 15 000 faits logistiques journaliers transmis au centre. En cours de rénovation, le système comprendra schématiquement une cinquantaine d’ordinateurs locaux T 15/27 assurant le recueil des informations et reliés par un réseau Transpac des PTT (Postes, télégraphes et téléphones), en attendant la mise en service ultérieure du réseau Réséda spécifique à l’Armée de l’air, aux deux ordinateurs centraux DPS 7/80 : Châteaudun et Cinq-Mars-la-Pile en secours.
Elle est enfin globale et c’est à partir de la connaissance complète des ressources existantes dans toute l’Armée de l’air ou attendues – livraisons prochaines par les industriels de pièces neuves ou sortant de réparations – que sont entreprises les opérations logistiques nécessaires à la satisfaction des besoins des utilisateurs et que sont lancés les ordres de mouvement. Lorsque les ressources sont suffisantes, tout le traitement est effectué de manière automatique.
Des résultats probants
Près de 500 000 articles de ravitaillement sont maintenant gérés dans cette chaîne. Le taux de service du système, défini par le rapport des quantités d’articles délivrés automatiquement au total général incluant aussi les matériels délivrés sur interventions manuelles en raison de situations critiques, a été de 97,6 % pour l’ensemble de l’année 1984. Il est d’ailleurs pratiquement stable depuis 1981. Dix millions de pièces détachées sont livrées chaque année.
En cas de manque de pièces au niveau local, l’organisme ravitailleur support émet une Demande exceptionnelle de matériel (DEM). Pour les douze derniers mois, 80 % des DEM ont été satisfaites à partir des existants du stock air et 13 % sur des attendus en provenance de l’industrie.
La qualité du service rendu est enfin démontrée de façon globale par l’augmentation de la disponibilité moyenne des flottes aériennes en service. Elle est passée d’environ 60 à 80 % sur la période 1975-1984, alors que dans le même temps, les crédits consacrés à l’achat des rechanges aéronautiques diminuaient en francs constants de plus de 30 %.
La disponibilité instantanée des matériels a aussi été améliorée par la constitution de lots opérationnels décentralisés mis à la disposition des unités de combat et permettant un fonctionnement théorique d’environ un mois sur terrains de déploiement avec éloignement géographique des unités de support technique et de soutien logistique. Ils comprennent environ 500 articles sur les 25 000 nomenclatures différentes qui constituent le soutien nécessaire à une flotte comme le Mirage III ou le Jaguar. Réactualisés en permanence en fonction des consommations constatées ou de la priorité attribuée à certaines fonctions, ils ont démontré toute leur efficacité au cours des exercices majeurs (Airex et Datex) de l’Armée de l’air ou des détachements extérieurs de certaines unités (notamment en Afrique).
Assurer le juste besoin des forces est l’objectif permanent du système de gestion automatisée. À cet effet, outre les résultats attendus de la rénovation des matériels et de la mise en service d’applications informatiques nouvelles permettant un meilleur suivi et un meilleur contrôle, des axes de recherche ont été définis et des améliorations seront encore apportées. Une meilleure adéquation des ressources budgétaires aux besoins prévisibles devrait être obtenue par une optimisation du calcul par flotte des besoins en réapprovisionnement. Une connaissance plus complète des existants à l’échelon national est en cours d’acquisition par mise en mémoire des stocks de rechanges identiques existant au niveau des industriels. Enfin, des efforts sont faits en permanence pour réduire tous les délais de traitements, de transmissions, de transports et de réparations.
Conclusion
Les matériels de combat sont par nature très performants : les générations qui se succèdent sont marquées par des évolutions technologiques importantes qui se traduisent par des augmentations de coûts d’acquisition considérables. Les inévitables limitations budgétaires ne permettent généralement pas d’acquérir les quantités de matériels souhaitables.
À cet égard, les améliorations du support logistique qui conduisent à une augmentation du pourcentage de disponibilité des matériels de combat existants sont déterminantes pour atteindre un potentiel convenable de nos moyens de défense.