Afrique - Nigeria : pétrole, facteur de sous-développement ? - Retrouver les bases d'une saine coopération
Nigeria : pétrole, facteur de sous-développement ?
Deux dates ont marqué l’histoire récente du Nigeria : le 31 décembre 1983, le général Buhari chasse du pouvoir l’autorité civile, avec l’intention, souvent formulée par les militaires nigérians, de le lui rendre après avoir consolidé les structures de l’État, lutté contre la corruption et amélioré la situation économique ; le 26 août 1985, le général Buhari doit céder la place au général Ibrahim Babangida, à la tête de l’AFRC (Armed Forces Ruling Council, c’est-à-dire le conseil de gouvernement des forces armées). Un homme originaire des États du Nord est ainsi remplacé par un natif du Centre-Ouest (1) qui, comme le général Gowon le fut à son heure, peut se montrer un bon médiateur entre l’autoritarisme des dirigeants nordistes et l’affairisme démocratique, populaire, turbulent et difficilement contrôlable des « bourgeois » de la côte. Cet affairisme n’est tempéré de temps à autre que par l’action plus ou moins violente des syndicats et des partis extrémistes, mais malgré les apparences, il a toujours compté de nombreux complices dans les États du Nord. Le putsch de 1983 et celui de 1985 ont en commun de s’être produits à l’instant qu’aurait choisi le gouvernement déchu pour disparaître sans provoquer de réactions sanglantes. Comme nous l’avons déjà dit, le pays est d’ailleurs habitué à ces interludes d’un pouvoir militaire qui joue un rôle d’observateur attentif dans une évolution relativement démocratique de la vie politique. Par le passé, des directions militaires affaiblies ont même été chassées par des équipes moins marquées dirigées par un nouveau groupe d’officiers, qui avaient l’intention de rectifier les erreurs tactiques de leurs prédécesseurs avant de remettre leur charge aux partis politiques. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays africains, l’armée nigériane n’a jamais cherché à créer le parti unique qui perpétuerait sa présence au pouvoir.
En décembre 1983, l’intervention des généraux dans la vie politique semble avoir été provoquée non seulement par l’impasse où se trouvait bloqué le gouvernement du président Shagari dans le domaine économique, mais aussi par la crainte qu’un putsch, déclenché par de jeunes officiers, n’engageât le pays sur une voie où les milieux politiques et la majorité de l’armée ne souhaitaient pas se lancer, celle suivie par le Liberia et le Ghana après les coups d’État de Doe (1980) et de Rawlings (1981), ou par le Burkina Faso après l’arrivée au pouvoir du capitaine Sankara (1983). Les généraux avaient installé le général Buhari à la tête de leur conseil suprême, bien qu’il n’occupât pas la place la plus importante dans la hiérarchie, parce qu’il semblait le mieux armé pour affronter les critiques du Fonds monétaire international (FMI) et pour négocier avec l’Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole). Président de la société nationale des hydrocarbures en 1977 et 1978, le général Buhari entretenait d’excellentes relations avec le représentant saoudien dans cette dernière organisation.
Il reste 88 % de l'article à lire