Faits et dires
* S’appuyant sur le fait que l’Union soviétique viole les accords de limitation des armes stratégiques (SALT II), le président Reagan a fait savoir, le 27 mai 1986, que les États-Unis ne se sentiront pas contraints de respecter ce Traité lorsqu’ils mettront en service leur 31e bombardier Boeing B-52 armé de missiles de croisière, à moins d’un « changement radical de l’attitude soviétique ». Trois jours plus tard, M. Caspar Weinberger, secrétaire à la Défense, affirmait sans ambages que les États-Unis n’étaient plus liés par SALT II. Mais par la suite, le secrétaire d’État [Affaires étrangères] George Shultz précisait que l’abandon des SALT ne signifiait pas que Washington allait cesser ses efforts en faveur du désarmement mais témoignait, au contraire, de la volonté américaine d’aller au-delà de ce qui a été fait jusqu’à ce jour. De son côté M. Nitze, conseiller du président pour les questions de désarmement, déclarait devant la commission de la Chambre que « la vie de SALT II serait prorogée jusqu’à la fin de l’été 1987 ». Enfin, la Chambre des représentants adoptait le 19 juin 1986 une résolution invitant la Maison-Blanche à respecter les limites du Traité SALT de 1979.
* Le 31 mai 1986, l’agence soviétique TASS faisait savoir que si les États-Unis violaient les paragraphes principaux des accords de 1972 (Traité ABM) et de 1979 (SALT II), jusqu’alors respectés par les deux parties, l’URSS prendrait les mesures pratiques nécessaires pour que ne soit pas sapée la parité militaro-stratégique existante. Puis le 16 juin 1986, au cours du plénum du Comité central du parti communiste soviétique, M. Gorbatchev révélait qu’il avait proposé aux États-Unis de ne pas abandonner le Traité ABM sur les armes anti-balistiques pendant au moins quinze ans : de limiter les recherches sur l’Initiative de défense stratégique (IDS) aux tests de laboratoire : de restreindre le niveau des armes stratégiques offensives à 1 600 unités de part et d’autre et de résoudre séparément la question des armes à moyenne portée capables d’atteindre le territoire de l’autre.
* Le 11 juin 1986, à la réunion du Pacte de Varsovie à Budapest, il a été proposé aux pays de l’Otan (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord) de réduire dans les deux ans de 100 000 à 150 000 le nombre des soldats de part et d’autre. Cette étape étant franchie, il serait ensuite procédé à une réduction de presque 25 % des troupes terrestres et de l’aviation tactique au début des années 1990.
* Le 19 juin 1986, le président Reagan prenait acte de ces différentes prises de position et affirmait : « Nous ne pouvons pas accepter ces propositions sans changement mais il semble que les Soviétiques ont commencé à faire un sérieux effort. Cela pourrait représenter un tournant ».
* Je tiens à réaffirmer la confiance de la France dans l’Alliance atlantique. L’adhésion de mon pays à l’Alliance est d’autant plus forte qu’elle est, grâce au choix français d’une stratégie de dissuasion indépendante, une adhésion totalement libre.
M. André Giraud, ministre de la Défense, le 6 juin 1986 à Utah Beach (Calvados)
* Tout en maintenant ses ambitions propres en matière de dissuasion, la France pourrait envisager, si la nécessité s’en faisait sentir, l’examen avec ses alliés européens d’un effort commun pour se protéger d’une éventuelle capacité anti-forces de l’adversaire… Le défi spatial porte d’ores et déjà sur l’observation, la navigation et les télécommunications. Consciente de la puissante mutation en cours, la France s’est dotée des moyens propres à anticiper l’évolution dans ces trois domaines, sans jamais dissocier la question spatiale du maintien impératif de l’efficacité et de la crédibilité de l’outil nucléaire.
M. André Giraud, le 17 juin 1986
* La dissuasion nucléaire demeure plus que jamais la priorité de notre défense. Car si nous n’avions pas cette composante, nous serions obligés d’avoir une défense horriblement plus coûteuse et elle serait certainement beaucoup plus faible.
M. André Giraud, le 22 juin 1986 au grand jury RTL-Le Monde
* Nous sommes en face d’une convergence redoutable : un équipement militaire à renouveler rapidement (porte-avions et bâtiments de soutien âgés, diminution continue, à éviter ces prochaines années, du nombre d’avions de combat, par exemple), des technologies modernes et coûteuses à développer dans nos armements pour assurer leur crédibilité (techniques spatiales, robotique, informatique, balistique), des parades à mettre en œuvre face à des menaces nouvelles comme le terrorisme et, enfin, des moyens opérationnels à déployer en permanence au regard d’une situation internationale en état continu de crise plus ou moins aiguë. Face à une telle situation, la France ne devra pas ménager son effort pour sa défense.
M. André Giraud, le 27 juin 1986 au journal Le Monde