Afrique - Maroc : une diplomatie sur le fil…
Le roi marocain Hassan II et le président de l’État d’Israël Shimon Peres se sont rencontrés à Ifrane, les 22 et 23 juillet 1986. Cet événement a fait l’objet des critiques de la presse internationale. Les commentaires ont été presque uniquement consacrés aux conséquences qu’il pourrait avoir sur un règlement global des problèmes du Proche-Orient. Certains observateurs ont mis en parallèle la position du roi du Maroc à l’égard d’Israël et celle du président de la Côte d’Ivoire Houphouet-Boigny qui, malgré l’opposition de la grande majorité des membres de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), continue à soutenir que l’ouverture d’un dialogue des États africains avec l’Afrique du Sud serait le moyen le plus efficace de combattre l’apartheid.
Si les deux démarches procèdent peut-être de prémisses différentes, l’opposition qu’elles suscitent dans les milieux intéressés accentue leurs similitudes : les partisans du recours à l’action violente, dans l’un ou l’autre cas, accusent les deux chefs d’État de chercher à affaiblir leur position internationale, et, par une caution indirecte des thèses d’Israël et de Pretoria, de tendre à prolonger la lutte armée tout en diminuant la portée psychologique des « actes de guerre ». Ils refusent d’accorder le moindre intérêt à la thèse suivant laquelle une pression militaire sans l’ouverture d’un dialogue ne conduirait qu’à l’impasse que l’on connaît déjà, tant qu’Israël et l’Afrique du Sud disposent de forces bien supérieures à leurs assaillants.
En réalité, Abidjan et Rabat visent des objectifs plus généraux : ils partagent l’impression qu’un prolongement ou une accentuation de ces deux conflits locaux ne peut que favoriser la pénétration soviétique au Proche-Orient et en Afrique, que ceux qui préconisent l’usage de la violence ne l’ignorent pas mais qu’ils poursuivent un autre but que le but avoué de rétablir les Palestiniens dans leurs droits ou celui de mettre un terme à l’apartheid. L’ouverture d’un dialogue pourrait replacer les deux problèmes dans leur contexte régional ; il pourrait également mettre un élément étranger en position d’agir plus directement sur les différentes tendances de la communauté blanche d’Afrique du Sud ou de la population juive d’Israël. Il semble aussi que le président ivoirien, comme le souverain chérifien, soit soucieux d’éviter un amalgame que la composition de l’OUA favorise mais que la raison et l’histoire condamnent : aux États d’Afrique noire revient seul le soin de traiter de l’Afrique australe, aux États arabes celui de trouver une solution aux problèmes du Proche-Orient.
Il reste 81 % de l'article à lire