Revue des revues
• La revue américaine Orbis, publiée par l’Institut de recherches en politique étrangère conjointement avec l’Université de Pennsylvanie, commence chacun de ses numéros par un « Forum » réunissant plusieurs articles sur un même sujet. Le numéro de printemps 1986 de cette année est ainsi consacré à la prise de décision en temps de crise.
Dans un premier article, David E. Kaiser, professeur associé d’histoire à l’Université Carnegie-Mellon, se demande ce qui l’emporte dans la réalité de la dissuasion ou des intérêts vitaux. Il montre qu’en 1914, la guerre a éclaté parce que les grandes puissances ont décidé que les enjeux en cause justifiaient le risque d’une guerre. Celle-ci a été déclenchée par un enchaînement de calculs sur ce que chaque pays considérait être ses intérêts nationaux. En 1941, le Japon a estimé qu’il ne pouvait pas reculer en Chine et en Indochine, même si ses chances de victoire étaient faibles. Actuellement on exagère peut-être le rôle de la dissuasion dans les relations américano-soviétiques. David Kaiser en déduit que chacune des deux superpuissances a soigneusement évité de mettre en cause les intérêts vitaux de l’autre, d’où une stabilité politique plus profonde qu’on ne le croit. On pourrait simplement objecter à David Kaiser que la dissuasion n’est pas autre chose et que, dans le concept français de dissuasion, la notion d’intérêt vital occupe une place majeure.
L’article suivant, par Adam M. Garfinkle, est assez long et peu lisible en raison de spéculations très théoriques où il oppose idéalistes et réalistes. Il a paru plus utile d’analyser en détail l’article d’Hannes Adomeit, « senior staff member » au Stiftung Wissenschaft und Politik à Ebenhausen et « senior fellow » au centre Rand/UCLA (Université de Californie à Los Angeles) pour l’étude du comportement international des Soviétiques. Mannes Adomeit constate d’abord que le développement de la puissance militaire soviétique n’a pas créé de crise majeure entre superpuissances. Il cherche ensuite à définir le « style » des Soviétiques dans la conduite d’une crise, c’est-à-dire les formes de leur comportement et la logique de leurs raisonnements. Il apparaît alors nécessaire de se doter de concepts. Il faut distinguer les conditions objectives d’une crise de ce qui en est la perception. Une crise se produit quand une provocation est suivie d’une rétorsion. Entre l’Est et l’Ouest, elle exige qu’il y ait au minimum trois éléments : des deux côtés, la perception que les risques de conflit armé ont considérablement augmenté ; les décideurs sont pris dans d’étroites limites de temps ; des intérêts vitaux sont en jeu.
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