Afrique - Afrique australe : le poids des sanctions - Au Togo : les Jaguar de la paix
Les sanctions, décidées par le Congrès américain pour contraindre le gouvernement sud-africain à abandonner la politique de « développement séparé », toucheront le moral de la communauté blanche qui, depuis quelques mois, accrochait tous ses espoirs au soutien des États-Unis, tout en feignant d’ignorer les recommandations plus ou moins pressantes de l’Administration américaine. Toutefois, ces sanctions ne semblent pas constituer une mesure efficace pour atteindre l’objectif poursuivi, parce qu’elles n’imposent aucune solution concrète à la communauté blanche, actuellement détentrice du pouvoir, solution pour laquelle on aurait été certain d’avoir l’approbation de la communauté noire.
Pour sortir de la situation actuelle, se trouvent quatre types de propositions que l’on pourrait schématiser ainsi : celle du président sud-africain Botha, qui entend qu’on le laisse organiser des structures de l’État qui rendraient possible une libération des communautés noires, sans nuire aux équilibres ethniques du pays, politique qui réclamerait du temps pour porter ses fruits ; celle des opinions américaine et européenne qui, dans leur ensemble, assimilent le problème auquel est confronté l’Afrique du Sud à un problème de décolonisation et qui estiment qu’il peut être résolu par l’extension rapide du suffrage universel à toutes les communautés, les milieux politiques de Washington et des pays occidentaux n’étant pas tous enclins à souhaiter une évolution trop brutale, par peur des conséquences économiques qu’aurait une élimination de la communauté blanche ; celle des pays de la « ligne de front », solidaires des revendications d’une partie de la population noire, et qui, sans avoir la possibilité eux-mêmes d’appliquer des sanctions à l’Afrique du Sud, exhortent les pays occidentaux à le faire ; celle des pays socialistes, qui ne voient d’alternative au pouvoir blanc que l’installation définitive, en Afrique du Sud, de l’African National Council (ANC), parti qu’ils soutiennent depuis sa création, et qui, maître unique de cet important État déjà industrialisé, aurait l’avantage de consolider l’influence soviétique dans d’autres pays africains, tributaires de l’économie sud-africaine, et de donner à l’URSS le quasi-monopole de la fourniture de produits miniers dont ne peut se priver l’industrie occidentale.
Les opinions américaine et européenne, par leurs réactions, auxquelles les parlementaires de ces pays sont sensibles et qui conduisent les gouvernements à adopter des positions ambiguës, renforcent paradoxalement l’audience internationale de l’ANC. Le leader de ce mouvement, M. Nelson Mendela, incarcéré depuis presque vingt ans, fait figure, à leurs yeux, de seul représentant valable de la Communauté noire. En en faisant une sorte de martyr, Pretoria contribue pour sa part à accroître son renom, mais le gouvernement sud-africain, pour les mêmes raisons d’ailleurs que celui d’Israël, ne peut se résoudre à absoudre des actes de terrorisme. Il a sans doute tort de vouloir par ailleurs étouffer des courants qui, à l’exemple de l’UDF (United Democratic Front), poursuivent le même objectif que l’ANC, sans disposer des mêmes inquiétants protecteurs. Là encore, son attitude peut s’expliquer sinon se comprendre : dans l’état actuel des tensions de la Communauté noire, toute faiblesse de sa part serait interprétée comme une preuve de la connivence de ces mouvements non marxistes avec le pouvoir blanc : Pretoria juge peut-être utile de créer des martyrs au sein d’autres tendances idéologiques que l’ANC, afin de préserver l’avenir. L’ANC prétend, à juste titre, qu’en agissant ainsi, le parti national veut faire croire qu’en cas d’abandon du système constitutionnel qui assure sa primauté, les luttes partisanes et tribales atteindront une telle violence que le pays se disloquera. Les partisans de M. Mendela en appellent à l’unité en se référant à l’exemple du Zimbabwe où deux partis, appuyés sur deux ethnies différentes, après avoir combattu pour l’indépendance, se sont entre-déchirés ; leurs luttes ont provoqué, selon eux, l’exode de nombreux Européens, ce qui aurait pu être évité.
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