Institutions internationales - L'encyclique « Sollicitudo rei socialis » - La théologie de la libération
Pour n’être pas tous d’égale valeur ni de même intérêt pour l’observateur politique, les enseignements pontificaux n’en méritent pas moins une attention scrupuleuse surtout en France où l’histoire a façonné nos habitudes spirituelles et morales entre les baptistères et l’autel. Que la foi vous ait quitté ou que vous ayez abandonné toute pratique religieuse, il n’en demeure pas moins vrai que le christianisme reste un facteur essentiel de notre patrimoine. Avant d’être l’œuvre des rois, notre pays n’a-t-il pas été le fruit de ses moines ? Sans être toujours une obédience, le catholicisme symbolise l’ordre.
Convient-il de se poser la question qui préoccupait Thomas S. Éliot en 1939 : « Sommes-nous encore en chrétienté ? » Au terme d’un essai coruscant, l’auteur du Meurtre dans la cathédrale concluait qu’une « société dont la doctrine politique est fondée sur la foi chrétienne est impossible et irréalisable » dans le monde contemporain caractérisé par des tendances totalitaires et socialisantes (1). Dans son encyclique Ecclesiam suam, Sa Sainteté Paul VI en déduisait que l’Église devait s’immuniser contre le monde sans toutefois se cantonner dans l’immobilisme ou le conformisme ; elle devait s’ouvrir au dialogue puisque la prédication est le premier apostolat. Ces directives devaient, trois ans plus tard, être au centre de l’encyclique Populorum progressio marquée par l’optimisme de l’époque en matière de développement.
Pour éviter tout malentendu, sans doute est-il nécessaire de préciser d’emblée que l’analyse qui suit résulte d’une lecture volontairement temporelle de l’encyclique Sollicitudo rei socialis. Nous sommes bien conscients qu’elle ne marque en rien une sécularisation de la foi et à maintes reprises le Saint-Père rappelle que les réalités terrestres sont si peu autonomes qu’elles doivent être placées sous le regard du Christ. Que le croyant se rassure donc : notre méthode ne signifie aucunement que nous partagions ce point de vue de Teilhard de Chardin selon qui « nous agissons en dernière analyse pour obéir au monde, pour nous incorporer au monde, pour nous achever avec le monde » (dans L’Énergie humaine p. 174).
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