Afrique - Algérie : inquiétude générale - Le Sommet de la francophonie à Dakar
Dans un Maghreb à la recherche de son identité, les problèmes économiques empêcheront peut-être d’apaiser tout à fait les tensions. L’Algérie ne peut se lancer dans une coopération maghrébine totale en position de faiblesse. Or, il se trouve que la seule force dont elle dispose actuellement, face au Maroc qui jouit de la stabilité acquise par le prestige de la monarchie, est son potentiel économique. Le renoncement aux principes sur lesquels avaient été fondés son organisation politique et son développement, la fragilité d’un pouvoir ébranlé par les émeutes d’octobre 1988 et leur répression, l’impopularité d’une hiérarchie politique et même d’une administration qui furent obligées d’utiliser la violence pour se protéger, la nécessité de trouver des solutions pragmatiques aux problèmes vitaux qui se posent et, à ce propos, l’opposition d’idéologies concurrentes et leur affrontement, risquent d’obliger le pouvoir en place, ou tel autre appelé à lui succéder, à se replier sur lui-même afin de protéger à nouveau le pays des influences extérieures. Car la crise qui menace est plus qu’une crise de régime, c’est l’existence même de la personnalité nationale qui peut être mise en cause.
Il est difficile de revenir sur les fautes passées : elles sont moins dues à une planification erronée, quoiqu’il y ait eu, en matière économique, un manque d’évaluation du coût de certaines productions locales qui a conduit à des investissements inutiles, qu’à une grave déficience de gestion dont les technocrates locaux et étrangers sont en grande partie responsables. Pour construire la personnalité algérienne et l’État, l’expérience socialiste paraissait indispensable. Encore aurait-il fallu informer les personnels intéressés de l’objectif poursuivi afin qu’ils n’ignorent pas que leurs efforts seraient couronnés par une libéralisation future de l’économie et qu’ils ne donnent pas à leur action un caractère trop idéologique. Résultat : l’industrialisation, financée à grands frais par les revenus pétroliers des années fastes, n’a pas fourni à l’exportation des produits s’avérant compétitifs sur les marchés mondiaux. Les hydrocarbures représentent toujours 98 % des exportations. On ne peut guère espérer diminuer cette proportion par une ouverture plus large des frontières avec les pays voisins, le trafic avec eux étant plus profitable à l’importation qu’à l’exportation.
Au début de l’année 1989, les responsables de l’économie avaient l’espoir que surviendrait une stabilisation à la hausse du prix des produits pétroliers. Leur optimisme se fondait sur les résultats de la réunion de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole, Opep (novembre 1988), où avaient été définis des quotas de production permettant de maintenir le prix du baril aux environs de 20 dollars. La fin du conflit entre l’Irak et l’Iran et un accroissement de la demande avaient favorisé l’entente. Celle-ci fut de courte durée puisqu’à la réunion de Vienne (juin 1989), tout fut remis en cause. Le Koweït, en réclamant en sa faveur la révision des répartitions, s’est opposé à la thèse saoudienne qui voulait limiter la production pour que les cours restent maintenus au taux atteint depuis fin 1988. Le ministre koweïtien a accepté le plafond proposé par Riyad de 19,5 millions de barils par jour, mais il a laissé entendre que son pays dépasserait le quota qui lui était imparti. Il a été suivi par les Émirats arabes unis, le Gabon et l’Équateur. L’Algérie ne désire pas que l’on change les quotas mais que l’on s’inspire, en septembre 1989 de l’état du marché pour relever ou non le plafond. Il est probable que, quoique la demande reste forte, l’offre devenant plus importante, les prix recommencent à diminuer. Cela ne fait ni l’affaire du budget algérien, ni celle de sa balance commerciale : aucun espoir donc, à moyen terme, d’un accroissement des importations.
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