Marine - Le Centre d'enseignement supérieur de la Marine (CESM)
L’École supérieure de guerre navale (ESGN) avait presque un siècle d’existence. Créée en 1882, elle avait dû attendre 1895 pour voir le jour à Brest à bord des croiseurs Amiral Charrier, Latouche-Tréville et Suchet. Abandonnant Brest deux ans plus tard, elle s’était ensuite installée à Paris, à l’École militaire qu’elle ne devait plus quitter jusqu’à ce jour de mai 1993 où, vaincue par une lame de fond interarmées, elle avait dû se résigner à programmer une dernière leçon destinée aux stagiaires de l’ultime promotion, la 84e, puis fermer ses portes.
Ce 28 mai 1993, Jean-François Deniau avait accepté de venir prononcer un vibrant plaidoyer intitulé « Tradition et liberté » en faveur de la vie, du courage et du caractère. Loin d’être l’oraison funèbre d’une école prestigieuse, cette dernière leçon annonçait ainsi le renouveau de notre enseignement militaire supérieur.
Il ne s’agissait bien évidemment pas de regretter un passé brillant, mais bien au contraire de préparer un avenir qui le soit encore davantage, d’annoncer ainsi l’ouverture du Collège interarmées de défense (CID) qui prend désormais la relève des écoles supérieures de guerre des trois armées et de la gendarmerie. La finalité est la même : former des officiers supérieurs qui soient à la fois des opérationnels convaincants et des gestionnaires convaincus. Seul le cadre change, il est désormais totalement interarmées et international (58 nationalités représentées en 1993), parfaitement cohérent avec les exigences de l’environnement stratégique actuel et des nouvelles conditions d’emploi des forces armées.
Il restait pour la Marine à résoudre le problème des autres tâches confiées à l’ESGN, celles que le CID ne peut reprendre à son compte. C’est désormais le Centre d’enseignement supérieur de la Marine (CESM) qui s’en charge. Tenant compte de son héritage, le Chef d’état-major de la Marine (CEMM) lui a également confié des responsabilités nouvelles dans le domaine de la communication. C’est ainsi qu’est né le CESM, du double constat d’un besoin de formation complémentaire et d’un rayonnement accru de la marine. Il est situé dans les locaux occupés précédemment par l’ESGN, à l’École militaire.
Formation
En ce qui concerne la formation, les choses sont relativement simples. Le CESM, comme autrefois l’ESGN dont il est l’héritier, continue à organiser, plusieurs fois par an, des stages « à la carte » destinés à des officiers supérieurs, d’active et de réserve, appartenant aux corps des officiers de la Marine, des commissaires de la Marine, des médecins des armées, des administrateurs des affaires maritimes, des professeurs de l’enseignement maritime et des ingénieurs des travaux maritimes ; stages de quatre semaines pour l’attribution du brevet technique, stages d’une semaine pour un rafraîchissement rapide des connaissances des officiers de réserve.
Le CESM apporte également son concours au CID lors des phases d’enseignement spécifique « marine » : trois mois répartis dans l’année. Outre ses locaux et sa documentation, le CESM met à la disposition des stagiaires « Marine » du CID son système de simulation Resa qui permet notamment de valider les idées de manœuvre élaborées à l’occasion des exercices d’application de la méthode d’appréciation de situation militaire.
On pourrait citer bien d’autres tâches de formation, telles que l’enseignement des langues étrangères, la création d’une unité de valeur « méthode » à Paris et dans les régions, l’organisation des épreuves du concours d’entrée au CID, l’aide apportée aux candidats complétée, pour ceux qui sont reçus, d’une préparation particulière à l’entrée au CID, le suivi des stagiaires français dans les écoles de guerre étrangères, etc.
Rayonnement
Le CESM est désormais chargé de conduire des actions contribuant au rayonnement de la Marine dans les cercles, groupes ou instances influents du monde civil et militaire. Ces actions de communication visent à promouvoir les aspects maritimes et navals des problèmes, pour mieux faire apparaître le rôle que la Marine joue ou sera amenée à jouer dans la défense du pays, et à encourager le développement de la réflexion et de la pensée maritime. Pour satisfaire cet objectif ambitieux, l’imagination et l’innovation ne manquent pas et les projets en gestation sont nombreux. Certains ont déjà vu le jour, tels le prix « Amiral Daveluy » et le « Cercle des personnalités associées au CESM », créés en 1993.
Le prix « Amiral Daveluy » est destiné à susciter, encourager et promouvoir des travaux de recherche historique sur la stratégie maritime, et en particulier navale, qui soient riches en enseignements pour le présent et l’avenir de la politique maritime menée en France et en Europe. Attribué chaque année, et pour la première fois en 1994, ce prix peut comporter trois récompenses, deux allant à des mémoires de maîtrise ou de DEA dans le but d’encourager la poursuite des travaux, et une à une thèse de doctorat. Cette initiative devrait contribuer à rapprocher l’université et le monde de la mer.
Le « Cercle des personnalités associées au CESM » a pour but de rassembler des personnalités qui militent en faveur d’une meilleure prise en compte des enjeux maritimes dans notre pays. Les membres permanents, en nombre restreint, conseillent le CESM et le font bénéficier de leur expérience, de leurs relations et de leur introduction dans les milieux influents. Les membres associés, en nombre plus important, sont des personnalités sympathisantes cooptées, agissant principalement en tant que relais d’opinion. Les premières actions concrètes ne se sont pas fait attendre : citons en particulier l’organisation d’un colloque à l’École militaire début 1994 et une présence toujours plus active dans les enceintes où sont évoqués les problèmes du monde maritime et de la défense, colloques et séminaires notamment.
Le colloque « Marine et gestion des crises », placé sous la présidence effective du CEMM, a un double but, d’une part placer le CESM parmi les cercles de réflexions parisiens, d’autre part, et surtout, montrer les multiples atouts de l’outil naval dans la gestion des crises. Rassemblant des intervenants prestigieux, civils et militaires, français et étrangers, il répond parfaitement à la vocation du CESM, la sensibilisation à l’importance des enjeux maritimes.
D’autres projets sont à l’étude, telle l’organisation d’un stage de « communicateurs » pour officiers de réserve. L’idée est de rassembler à l’occasion d’un stage très court un petit nombre d’officiers de réserve assumant des responsabilités importantes dans le secteur civil pour en faire des relais actifs, au plus haut niveau de leurs entreprises, des idées développées par la marine.
L’action du CESM s’appuie également sur une bibliothèque riche en ouvrages maritimes, un centre de documentation en voie de développement, un bulletin de liaison trimestriel, des actions ponctuelles de relations publiques, etc. Inutile de présenter la bibliothèque du CESM, c’est celle de l’ESGN, possédant quelque dix mille ouvrages couvrant l’ensemble des questions maritimes et des aspects géopolitiques et économiques du monde contemporain. Une salle de lecture attenante propose environ quatre-vingts journaux et périodiques d’information générale ou spécialisée sur la marine et la défense.
Le centre de documentation nouvellement créé a pour ambition de devenir, à terme dans son domaine, le Centre de documentation de la Marine. Informatisé, il regroupe un ensemble d’ouvrages et de textes pouvant être utilisés à des fins d’enseignement ou par ceux qui souhaitent préparer une intervention, rédiger un article, effectuer une étude, etc.
Le bulletin de l’enseignement supérieur de la Marine est appelé à voir ses articles se diversifier et sa diffusion s’élargir. Initialement tribune réservée aux stagiaires de l’École supérieure de guerre navale, il s’ouvre aujourd’hui à tous, les critères de sélection des articles publiés demeurant l’intérêt du sujet et la qualité de l’expression. C’est ainsi qu’en dehors de ceux trop exclusivement techniques, tous les grands thèmes relevant de la stratégie, de la géopolitique, des sciences humaines, de l’histoire, etc., peuvent y être abordés. À court terme, ce bulletin devrait aussi évoluer dans sa présentation et adopter une formule plus attrayante. ♦