Marine - L'entraînement synthétique dans la Marine
Généralités
La fréquence et la complexité croissantes des opérations combinées auxquelles la Marine participe, de plus en plus souvent dans des contextes interarmées ou interalliés d’une part, la mise en œuvre de systèmes de plus en plus perfectionnés d’autre part, nécessitent une qualification des personnels sans cesse entretenue par un entraînement régulier. Si l’exercice à la mer constitue un cadre réaliste qui s’impose, la part de l’activité qui peut lui être consacrée est en diminution ; par ailleurs, les concours nécessaires à l’entraînement deviennent rares et coûteux et la mise en œuvre d’armes réelles difficile.
Pour assurer cette qualification des équipages, la Marine a donc recours à l’entraînement synthétique, le plus souvent sous la forme de simulateurs. En effet, la simulation permet de créer des représentations de la réalité sous la forme la plus appropriée aux objectifs recherchés. L’informatique peut notamment offrir, grâce à ses capacités de calcul, une approche du réel rapide et conviviale. Elle est un instrument fondamental pour la plupart des problèmes de simulation et adapté au développement de moyens d’entraînement synthétiques.
Les simulateurs autorisent en outre une grande souplesse d’utilisation permettant une progressivité dans l’apprentissage, la répétition tant que nécessaire des points non acquis ou, selon les cas, l’entraînement à réagir dans des conditions limites peu habituelles, voire dangereuses à mettre en œuvre dans un exercice en vraie grandeur.
Les niveaux
Les équipements de simulation peuvent être adaptés au niveau des personnels à entraîner ou à la nature des tâches à accomplir. Ainsi, trois catégories ont été définies dans la marine.
Niveau 1 : il s’agit d’entraîner des opérateurs à l’utilisation d’équipements, à l’application de procédures ou le plus souvent à réagir rapidement face à des alertes. Les simulateurs associés requièrent des matériels pédagogiques représentatifs de la configuration réelle avec une importance de la fidélité des interfaces homme-machine. Cet entraînement est destiné à faire acquérir, puis entretenir, de manière répétitive, des actes réflexes face à des événements clés.
Niveau 2 : l’accent est mis sur la cohésion des équipes de quart et leur comportement pour analyser des situations variées et mettre en œuvre des procédures adaptées. Il s’agit plutôt d’un entraînement à utiliser des moyens représentatifs de la fonction à assurer ou de la procédure à mettre en œuvre avec une importance du dialogue entre les membres de l’équipe. La qualité des informations est prédominante sur la fidélité. Cet entraînement à agir rend souhaitable la confrontation au déroulement logique de scénarios bien choisis.
Niveau 3 : il s’adresse aux « décideurs ». Les qualités requises concernent davantage la puissance de traitement, la présentation, la richesse et la fiabilité des informations que les supports physiques qui peuvent être plus éloignés des matériels réels. Il s’agit de réfléchir et l’entraînement peut se dérouler dans des situations figées.
L’entraînement par simulation à la réflexion et à l’action s’acquiert souvent à terre dans les centres d’entraînement, avec le soutien et la compétence d’instructeurs, ou à bord lorsque les systèmes concernés comportent des fonctions de simulation, tandis que l’entraînement à la réaction doit pouvoir s’effectuer partout avec des moyens légers, car il s’agit d’entretenir des réflexes.
Les types de simulateurs
Dans les faits, la Marine distingue deux grands types de simulateurs :
– les simulateurs lourds, qui reproduisent le plus fidèlement l’environnement matériel et d’ambiance et exigent la mise au point d’équipements spécifiques dédiés ; ils permettent de replacer les opérateurs ou les équipes de quart dans les conditions d’environnement proches de la réalité et reproduisent à l’identique les faces parlantes des appareils ;
– les simulateurs légers, conçus à base de matériels et logiciels commerciaux standards permettant une productivité élevée et des délais de développement faibles, mais aussi la reproduction des faces parlantes et du fonctionnement des matériels.
Les forces sous-marines et l’aéronautique navale ont plutôt choisi la simulation globale, répondant mieux à leur besoin vital de sécurité et à leurs contraintes de disponibilité opérationnelle immédiate. Les forces de surface se sont plutôt orientées vers des simulateurs adaptés à chaque niveau d’entraînement.
Ainsi, les simulateurs d’entraînement au pilotage des divers types d’aéronefs et à l’utilisation des systèmes d’armes et de navigation de l’aéronautique navale sont souvent assez lourds. Ils doivent en effet permettre l’apprentissage au pilotage en économisant les heures de vol et en entraînant le pilote à réagir dans des situations limites ou face à des avaries possibles correspondant à des conditions difficiles à réaliser en vraie grandeur.
Les forces sous-marines disposent aussi de toute la gamme des simulateurs d’entraînement au pilotage et à la sécurité plongée, à la conduite de la propulsion et à la mise en œuvre des systèmes d’armes. Là encore, la justification tient à la nécessité d’une disponibilité opérationnelle rapide.
Les forces de surface disposent de simulateurs légers éventuellement embarquables pour l’entraînement à la mise en œuvre et à l’exploitation d’équipements électroniques ou de systèmes d’armes pris individuellement. En revanche, l’entraînement aux tâches, aux procédures tactiques et à la mise en condition des équipes opérationnelles se déroule dans des centres à terre.
La politique
La politique de la Marine concernant ces moyens de simulation consiste, dans un but de rentabilité et d’économie d’échelle, à rechercher des adéquations entre équipements de formation, équipements d’entraînement et matériels réels. Sont notamment recherchés :
– l’intégration chaque fois que possible des fonctions « simulation » dans les systèmes opérationnels à bord des unités (utilisation de la redondance des moyens de calcul), par exemple l’entraînement lié à la mise en œuvre des équipements et systèmes d’armes du porte-avions Charles-de-Gaulle ;
– le « plein-emploi » des simulateurs obtenu par regroupement de plusieurs utilisateurs ou domaines d’utilisation (effet d’échelle, utilisation des simulateurs d’instruction pour l’entraînement des forces) ;
– l’utilisation des bases de données existantes ou en développement ;
– l’adéquation des simulateurs légers aux objectifs recherchés en évitant tout perfectionnement inutile des modélisations et en se limitant à chaque niveau à la représentation des informations strictement utiles ;
– le recours à l’approvisionnement sur étagère de matériels existants (simulateur d’apprentissage à la navigation par exemple).
Dans tous les cas, la réalisation d’une simulation répondant à l’ensemble du besoin n’est pas simple et l’entraînement réel à la mer doit suivre impérativement l’entraînement initial synthétique et le compléter. ♦